Dossier collectif IA53004331 | Réalisé par
Seure Marion (Contributeur)
Seure Marion

Chercheuse au pôle Inventaire du service du Patrimoine de la Région Pays de la Loire.

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  • inventaire topographique, Canton de Lassay-les-Châteaux
Les fermes de l'ancien canton de Lassay-les-Châteaux
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    ferme
  • Aires d'études
    Ancien canton de Lassay-les-Châteaux

1. Généralités

a) Définitions et délimitation du sujet

Dans le Thésaurus de l'architecture, une ferme est définie comme un logis et ses dépendances, nécessaires à l'exploitation agricole. Elle forme donc une unité agricole, où logis et dépendances sont souvent disposés autour d'un même espace, depuis lequel ils sont accessibles. Or, dans l'ancien canton de Lassay, certains types de regroupements de population ne permettent pas d'avoir une vision claire de ce qu'était une ferme – à une date antérieure au remembrement et à la réorganisation agricole des années 1980. En effet, dans les hameaux, par endroits très peuplés, les fermes sont éclatées : le logis et les dépendances d'une même unité agricole peuvent se trouver dans des corps de bâtiments, qui eux-mêmes comprennent des logis ou des dépendances appartenant à des propriétaires différents. Dans de tels hameaux, seul un travail documentaire systématique – le dépouillement des états de section du cadastre ancien – aurait permis de définir le contour précis des différentes fermes, mais ce uniquement à la date de l'établissement de ce document financier, les propriétés pouvant rapidement muter. Les caractéristiques de la ferme éclatée, se rencontrant dans de nombreux hameaux, sont étudiées dans le dossier "Les hameaux de l’ancien canton de Lassay". Ce dossier ne prend donc en compte que les fermes isolées, c'est-à-dire les fermes situées dans un lieu-dit où elles constituent l'unique exploitation agricole, en opposition aux hameaux. Les fermes clairement reconnaissables mais se situant dans un hameau ne sont donc pas prises en compte ici - ce qui a pour conséquence de fausser légèrement les statistiques. En revanche, la dernière section de ce dossier, portant sur les dépendances agricoles, concerne l'ensemble des exploitations, qu'elle se situent dans un hameau ou dans une ferme. En effet, leur forme ne varie souvent pas que l'édifice se situe dans une ferme isolée ou dans un hameau.

b) Dénombrement

337 lieux-dits ont été repérés dans l'ancien canton de Lassay. Les villages, localement nommés bourgs, sont exclus de ce compte. 152 de ces lieux-dits sont des fermes, tandis que l'on dénombre 161 hameaux. Bien que ces deux chiffres soient proches, les hameaux regroupaient la majorité de la population, en raison de leur taille, par endroit très développée. De plus, le repérage se fondant sur l'état actuel du bâti (que les édifices soient occupés ou non), certains lieux-dits identifiés comme des fermes ont pu avoir été à une époque des hameaux, ce qui gonfle le chiffre des premières.

c) Répartition géographique

Alors que les confins des paroisses comptent des hameaux très peuplés, autour de Lassay ne sont installées quasiment que des fermes, sans doute en raison de l'attraction qu'a exercée la ville sur la population environnante. De même, les proches alentours des seigneuries possédant d'importantes propriétés foncières, comme celles du Bois-de-Maine, de Chantepie et de Torcé (Ambrières-les-Vallées), comprennent essentiellement des fermes isolées, qui dépendent du domaine et exploitent des champs de grande taille. Ces fermes sont appelées métairies dans les textes du XVIIIe et du XIXe siècle, non pas en raison du type de contrat qui liait le fermier mais au propriétaire terrien, mais en raison de la large superficie exploitée, comme cela était d'usage dans le Maine.

2. Typologies des fermes

Plusieurs typologies de fermes, basées sur leurs plans, ont été mises en évidence. Pour le détail du repérage, voir tableau en annexe.

a) La ferme en U à plan régulier

Ce type de ferme est composé d'un logis en fond de cour et de deux corps de dépendances disposés symétriquement de part et d'autre. 5 fermes de ce type sur 152 ont été dénombrées, soit environ 3 % du total des fermes. Sur ces 5 fermes, 4 ont été construites ex nihilo au cours de la seconde moitié du XIXe siècle : les Longchamps (Melleray), l'Érable (Rennes-en-Grenouilles) – reconstruite au nord de bâtiments préexistants, détruits –, la Petite Basse-Cour (Rennes-en-Grenouilles) et la Retenue (La Baroche-Gondouin). La Rajellerie (Melleray) conserve une portion de bâtiment ancienne. Ces cinq fermes ont été (re)construites par de grands propriétaires terriens : à Melleray, autour de 1900, par la famille d'industriels Salles, possédant le château de Torcé ; à Rennes-en-Grenouilles, vers 1890, par Christophe Georges, bourgeois ayant acheté le domaine du Bois-de-Maine ; à La Baroche-Gondouin, en 1854 par Jacques-Albert Dubois de la Drouardière, qui faisait alors reconstruire ce château.

Voir : Ferme de l'Érable

Ferme de la Retenue

Ferme de la Rajellerie

Ferme des Longchamps

b) La ferme en U à plan irrégulier

Ce plan est proche du précédant. Toutefois, le logis n'occupe pas systématiquement le fond de la cour et/ou les corps de dépendances ne sont pas forcément positionnés de manière symétrique. On compte 7 fermes de ce type dans l'ancien canton de Lassay. Celles-ci procèdent souvent d'une reconstruction partielle (logis ou dépendances) au cours du XIXe ou du XXe siècle, une partie de la ferme ancienne étant conservée. Par exemple, à la Cébaudière (Thuboeuf), les deux corps de dépendances sont antérieurs à la Révolution et sont disposés de manière irrégulière, mais le logis a été reconstruit au fond de la cour au début du XXe siècle. Aucune répartition géographique spécifique n'a pu être mise en évidence au sujet de ce type de ferme.

Voir : Ferme de la Basse-Cour

Ferme de la Noé

c) Les fermes de plan carré

Les fermes dites de plan carré sont des fermes dont l'ensemble des bâtiments est disposé autour et ouvert sur une cour, selon un principe plus ou moins régulier selon les cas. On en compte 10, dont la moitié a été dans une large mesure reconstruite au XIXe ou au XXe siècle. Trois ont des dépendances majoritairement réédifiées à cette époque.

Voir : Ferme de la Coquère

Maison de maître et ferme de la Guette

d) Les fermes à deux corps de bâtiments parallèles

10 fermes sont composées de deux corps de bâtiments parallèles : 2 sont édifiées ex nihilo au cours de la seconde moitié du XIXe siècle ou au XXe siècle (Villeneuve à Rennes-en-Grenouilles et la Maison Neuve à Saint-Julien-du-Terroux) ; 1 est complètement reconstruite à la période contemporaine (le Vieux Cerisier à Lassay) ; 4 possèdent un corps de dépendance (ré)édifié au XIXe ou au XXe siècle. Le tiers restant a conservé des bâtiments antérieurs à l'établissement du cadastre ancien.

Voir : La Tannerie

e) Les fermes bloc-à-terre

Les fermes bloc-à-terre sont des fermes dont le logis et la majorité des dépendances agricoles, souvent constituées d'au moins une étable-fenil, sont regroupés dans un même corps de bâtiment. 29 fermes entrent dans cette typologie, soit 19 %. Un tiers d'entre elles ont été construites ex nihilo du milieu du XIXe au début du XXe siècle. Les autres possèdent une base antérieure à l'établissement du cadastre napoléonien. Parmi celles-ci, 8 sont majoritairement composées d'édifices datant de l'Ancien Régime.

f) Les autres types de fermes

La plupart des fermes (89, soit 58,5 %) n'entrent pas dans les catégories précédentes. L'implantation de leurs bâtiments ne suit pas de disposition ou de géométrie particulières. Parmi elles, 3 sont des constructions ex nihilo de la seconde moitié du XIXe siècle et un tiers (29) a été en majeure partie réédifié au cours du XIXe siècle ou au début du XXe siècle. 7 conservent soit un logis (4) soit des dépendances (3) datant dans une large mesure de l'Ancien Régime. Les autres fermes datées (37) conservent leur implantation d'Ancien Régime ainsi que des vestiges architecturaux de cette époque, bien que des restaurations ou ajouts ponctuels d'édifices aient pu intervenir au XIXe siècle.

Voir : Ferme de la Bourgaudière

Ferme du Temple

Ferme de Bel-Éclair

Ferme de la Verdonnière

Ferme de la Rousselette

3. Quelques exemples spécifiques

a) Les fermes de marchands de bestiaux

Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, le commerce de bétail, qui a cours autour de Lassay depuis l'époque moderne au moins, prend de l'importance et enrichit des fermiers qui se spécialisent dans la vente de bestiaux. Ces derniers se font construire, en lisière des bourgs, de grandes demeures, associées à des étables. Les maisons correspondent à un modèle cossu : construites à l'arrière de la parcelle, entre une cour et un jardin, elles sont hautes d'un étage et se déploient sur au moins trois travées.

La maison qu'Étienne Barreau, marchand de bestiaux à Niort, édifie ex nihilo à l'entrée du bourg, au 15, rue du Bois-Frou, en 1869 adopte ce modèle. Sa façade, en pierre de taille de granit, est ornée d'un bandeau de granit gris, matériau qui encadre également ses ouvertures. La grange-étable se dresse dans la même cour, perpendiculairement à la maison.

La ferme du Fresne, située le long de la route reliant Lassay à Chantrigné, à la sortie de la ville, est édifiée par Emmanuel Breteau, marchand de bestiaux, qui s'installe à cet endroit en 1886. La maison possède un décor soigné. Dotée de trois travées, d'un niveau de soubassement et d'un comble habitable, elle est construite en pierres de taille de granit, chaînées de briques bichromes blanches et rouges. Les fenêtres sont encadrées du même matériau ; le haut de leur linteau est souligné d'une rangée de briques vernissées. La travée centrale est surmontée d'une lucarne de forme triangulaire ; de part et d'autre de sa fenêtre se déploient deux volutes de briques vernissées. Ses quatre étables, sa grange surmontée d'un fenil en surcroit et sa remise sont regroupées au sein d'un même corps de bâtiment, qui se dresse perpendiculairement à la route.

b) Les fermes de la famille Salles

Le domaine mayennais de la famille Salles, situé entre son château de Torcé (Cigné) et le bourg de Melleray, constitue un des exemples les plus significatifs de transformation de l'architecture agricole sous l'impulsion de grands propriétaires à la fin du XIXe siècle. La famille, détentrice d'une manufacture de toiles à La Ferté-Macé, doit sa fortune à l'investissement dans l'industrie du tissage à main dans les années 1820 et à sa mécanisation autour de 1860. À partir de 1850, elle acquiert des fermes dans le bocage normand, lui assurant des revenus importants et stables. À la suite du rachat en 1895 du château de Torcé, et au moment où l'industrie de la toile se fait moins rentable, Clovis Salles poursuit cette stratégie de placement de capitaux industriels dans la terre.

Les fermes de la Rajellerie, de la Verdonnerie et du Petit Bois-Pichard, situées à Melleray-la-Vallée, appartiennent au domaine dès l'achat du château. Entre 1895 et 1900, toutes font l'objet d'importants travaux, commandés par Francis Salles, visant à optimiser leur rendement. À ces possessions sont ajoutées la ferme de la Durtière et des terres à l'ouest du bourg, sur lesquelles sont construites ex nihilo en 1899 les fermes du Clos et du Grand Clos – aujourd'hui renommée de Longchamps.

Des points communs architecturaux relient les fermes de la famille Salles. Leur plan, rationalisé et hygiéniste, présente trois corps de bâtiments, se répartissant autour d'une cour. Le logis occupe l'emplacement central tandis que les dépendances se répartissent de part et d'autre. À la ferme des Longchamps, l'édifice consacré à l'habitation comprend trois logements, qui disposent d'un étage carré. Le fronton qui surmonte sa partie centrale, confère un caractère monumental à l'ensemble. Les ouvertures sont, dans la majorité des cas, encadrées de briques polychromes. À l'étage des maisons, une niche accueille une statue de saint : Jean-Baptiste aux Longchamps, le Christ su Sacré-Cœur à la Rajellerie et Joseph à la Verdonnerie.

Au sein des exploitations de la Rajellerie et de la Verdonnerie, réédifiées sur la base de fermes plus anciennes, une portion de l'édifice antérieur a été conservé, traduisant ainsi l'ancienneté du domaine. La ferme de la Verdonnerie permet de nuancer l'hégémonie des plans à trois corps de bâtiments séparant les fonctions. La conservation de l'édifice ancien antérieurs et la topographie du site ont prévalu sur l'application d'un modèle hygiéniste.

4. Les différents types de bâtiments agricoles

a) Les granges-étables

Lassay et ses alentours se caractérisent par la conservation d'une dizaine de granges-étables présentant une charpente sur poteaux porteurs datant de la fin du Moyen Âge. L'assemblage des pièces y est similaire à celui des maisons à ossature bois datant de la même époque (la sablière repose sur la face externe du poteau, creusée d'une encoche, l'entrait est posé sur la tête du poteau et sur la sablière et est retenu par une queue d'aronde ; voir : maison de Launay ; maison du Bas-Boulay) mais la taille des poteaux, mesurant de 3,5 à 5 mètres de haut, y est supérieure. Dans presque tous les cas, ces structures sont doublées de murs de pierre, qui ferment le bâtiment. Trois d'entre elles ont été datées par dendrochronologie : la grange de la Fortinière a été édifiée en 1444-1445, celle de la Guilbardière en 1480-1481 et celle du bourg de Rennes-en-Grenouilles en 1485. Tandis que quatre de ces édifices partagent la cour d’un manoir en pierre, à l’instar de la Fortinière ou de la Cour de Saint-Fraimbault, d’autres appartiennent à d’anciennes métairies seigneuriales, comme le Hameau, qui dépendait de la Drouardière, ou la Noë, qui relevait du Bois-Thibault. Les grands volumes et l'affiliation à des domaines nobles permettent de penser qu'il s'agit de granges seigneuriales. Leur conservation en nombre exceptionnel tient soit à la déshérence précoce des fiefs nobles auxquels ces bâtiments étaient liés, soit au manque d'intérêt des propriétaires du XIXe siècle pour leur domaine, et donc à l'absence de reconstruction, soit au fait qu'elles présentaient de vastes volumes adaptés à l'évolution de l'agriculture. Les granges les mieux conservées comportent trois travées. Les restes de traverses, insérées aux deux tiers de la hauteur des poteaux et formant des cloisons de refend, permettent de prouver que les travées latérales étaient recoupées par des planchers. Les prélèvements effectués dans les traverses de la grange du bourg de Rennes-en-Grenouilles permettent d'assurer la contemporanéité du niveau de stockage avec la structure porteuse. L'absence de plancher sur la travée centrale, permet d'y restituer une porte charretière, associée à un fond de grange. Ces édifices ont ainsi pu à la fois emmagasiner de grandes quantités de grains et accueillir des animaux en rez-de-chaussée. La grange de Rennes-en-Grenouilles constitue le seul exemple clos en pan de bois. Dans les autres cas, les poteaux sont placés en retrait des murs construits en moellons de pierre. L'absence de mortaise ou de rainure sous les sablières ainsi que sur la face externe des poteaux exclut la présence originelle d'un pan de bois ou de clayonnage. On peut donc émettre l'hypothèse que ces constructions étaient dès l'origine fermées de murs de pierre ou qu'elles étaient pourvues de vaisseaux latéraux, soit en structure légère, soit fermés par des murs maçonnés.

En dehors de ces exemples remarquables de la fin du Moyen Âge, on comptabilise peu de bâtiments agricoles non mitoyens des logis et antérieurs au XIXe siècle (sur 135 édifices agricoles isolés ; seuls 36 sont antérieurs au XIXe siècle). En effet, à l'époque moderne, étables et granges sont majoritairement édifiés dans le prolongement des logis (sur ce type d'organisation, voir dossier hameaux). Dans certains hameaux, les fonctions agricoles et d'habitation sont toutefois regroupées dans des corps de bâtiments différents, à l'instar du hameau de Remieu ou de la Thibeudière. Les étables alignées de Remieu, datant vraisemblablement du XVIIe ou du XVIIIe siècle, sont représentatives des édifices agricoles antérieurs au XIXe siècle. Des portes couvertes de linteaux de bois ouvrent sur de petites pièces accueillant veaux, ovins ou laiterie. Une porcherie en appentis termine la rangée. Des fenils, accessibles par des portes hautes passantes dans le mur gouttereau, sont aménagés dans le grenier.

À partir du milieu du XIXe siècle, l'introduction du chaulage dans les cultures permet d'augmenter les rendements et a pour conséquence la construction de dépendances plus imposantes. La grange-étable à haute porte charretière, indépendante des logis, marque l'architecture agricole de cette époque. Construite lors de la réédification complète de fermes ou ajoutée dans certains hameaux, elle témoigne de changements dans les pratiques agraires. Sa porte charretière, dans la plupart des cas couverte d'un linteau de bois, donne accès à un fond de grange, espace non planchéié communiquant avec les étages de stockage, situés de part et d'autre, au-dessus d'étables. Celles-ci sont accessibles par des portes plus basses et aérées par de petites ouvertures, qui revêtent le plus souvent la forme de demi-cercles. La brique, par ailleurs peu présente sur le territoire, est largement employée pour les encadrer les ouvertures de ces bâtiments. D'autres types d'édifices agricoles, à l'instar des porcheries ou des loges à pressoir, peuvent être édifiés en appentis contre les pignons de ces granges-étables. Les façades sont bien souvent ordonnancées. Les exemples les plus soignés présentent même une façade principale en pierres de taille, comme la grange-étable des Loges, qui arbore du grès provenant de la région d'Andaine, soigneusement mis en œuvre.

b) Les porcheries

75 porcheries ont été observées dans l'ancien canton de Lassay. Seules 5 constituent des édifices autonomes, toutes les autres étant mitoyennes d'autres dépendances, voir de dépendances et de logis. Environ 20 sont édifiées en appentis, ce qui s'explique par leur plus petite hauteur par rapport aux autres dépendances. Elles se reconnaissent par les ouvertures basses qui permettent aux animaux d'y pénétrer.

c) Les fournils et séchoirs

Les fournils sont des édifices indispensables à la vie domestique, dans la mesure où ils permettent la cuisson du pain, mais bien souvent aussi à l'exploitation, car ils servent aussi de bâtiment agricole (remise et plus souvent fenil occupant le comble, accessible depuis le pignon) ou de séchoir, notamment à chanvre. Les trois-quarts constituent des édifices autonomes, construits isolément des logis, et peuvent de cette manière servir à plusieurs foyers. Les fournils sont constitués d'une petite pièce quadrangulaire, dans le mur-pignon de laquelle est ménagée la bouche du four. La pièce du fournil peut ponctuellement servir de remise ou d'étable et accueillir dans ses combles un fenil. Le massif du four à pain est construit hors-œuvre. Lorsqu'il est maçonné, comme au four à pain du bourg de Thuboeuf, il dispose d'une couverture indépendante, mais lorsque son massif n'est couvert que de chaux. Le four lui-même est la plupart du temps voûté de brique réfractaire (XIXe-XXe siècle). Toutefois, quelques fournils plus anciens (époque moderne), à l'instar de celui de la Basse-Cour de Bois-Thibault, possèdent voûtées de pierre.

Les fournils ont par endroit revêtu la fonction de séchoir à lin et à chanvre. Ainsi, en 1773, lors du partage des biens de Guillaume Morice, parmi lesquels est compris un four à pain, tous les héritiers conservent le droit de faire cuire leur pain dans ledit four, d'y faire sécher lin et chanvre, ainsi que de broyer les fibres dans le fournil. Ces séchoirs ont simplement pu se trouver dans la pièce principale du fournil. Néanmoins, dans certains autres fournils, le massif du four, englobé par les murs extérieurs, est surmonté d'un plancher, accessible par l'extérieur, pouvant revêtir une fonction de séchoir, à l'image du four à pain du Grand-Guéné.

d) Les remises

Dans le courant du XIXe ou du XXe siècle de nombreuses remises sont édifiées pour abriter le nouveau matériel agricole. Alors que la majeure partie de ces remises est construite isolément des logis, certaines se trouvent à l'extrémité d'alignements, sous le même faîte, à l'instar de la remise du Bas-Hazay. Ce dernier emplacement correspond à des habitudes constructives de la période moderne, documentées par les sources écrites. Une partie des remises est accessible par une grande porte percée dans un des murs gouttereaux, tandis qu'une autre partie dispose d'un pignon ouvert. Dans la plupart des cas, leur structure est constituée de pan de bois, dont le mode d'assemblage diffère des granges-étables de la fin du Moyen Âge : l'entrait pénètre dans la tête du poteau sur laquelle la sablière repose (mode d'assemblage observé sur la maison en pan de bois de la Guiberdière, édifiée vers 1778). Ces pans de bois peuvent être clos de bardage ou remplis de torchis. Lorsque ces matériaux sont trop altérés, ils sont recouverts ou remplacés par de la tôle, qui permet, quelques temps encore, leur conservation. Sensibles aux intempéries et fragilisés par la perte de leur usage, ces édifices, autrefois nombreux sur le territoire, tendent à disparaître. Les remises en pan de bois, comme les autres édifices en bois et torchis, se rencontrent majoritairement au nord de l'ancien canton de Lassay.

e) Loges et pressoirs

De nombreux pressoirs traditionnels en bois demeurent dans les fermes, malgré la perte de leur usage. Dans la plupart des cas, ils sont abrités sous une loge ouverte, dépendance de petite taille souvent construite en bois, qui peut être isolée ou placée contre le pignon d'autres bâtiments agricoles. L'emplacement des pressoirs sous des loges et à l'extrémité d'édifices est documenté dès le XVIe siècle (descriptions de maisons dans les aveux de la seigneurie du Bois-Thibaut, notamment). Parfois, loges à pressoir et gadages sont construits à côté, ce qui permet de limiter la manutention lors du pressage.

Les gadages sont dévolus à l'écrasage des fruits, tandis que les pressoirs extraient le jus de la première mouture ou moût. Les plus couramment utilisés étaient les "pressoirs à paquets", à l'image de celui conservé au Rudeson. Sur la maie de bois, la motte était montée : du moût et de la paille (ensuite remplacée par des toiles) étaient alternés et retenus par des bats en bois. Le pressage s'effectuait grâce à la masse de bois, qui descendait le long d'une vis sans fin. La masse était actionnée manuellement, à l'aide d'un cliquet, ou par un vérin. Le jus tombait dans la rigole qui entoure la maie.

Conclusion

L'analyse du repérage montre que, contrairement à d'autres aires géographiques, à l'instar du pays segréen1, le phénomène de reconstruction complète des fermes au cours de la seconde moitié du XIXe siècle est resté marginal autour de Lassay. Les innovations en matière d'architecture agricole ont été peu nombreuses avant la fin du siècle. Les reconstructions complètes d'exploitations, selon un plan régulier et des normes hygiénistes, conférant une autonomie à la maison et aux dépendances agricoles, ont, comme ailleurs, en premier lieu touché les fermes attachées aux grands domaines et ne sont intervenues qu'à partir des années 1850. La majorité des fermes édifiées ou réédifiées au cours de la seconde moitié du XIXe siècle ou du début du suivant continue à suivre des plans et des modes d'organisation séculaires, à l'instar du bloc-à-terre. Ce dernier, prenant souvent la forme d'un logis-étable et parfois grange, est en effet mentionné dans les sources écrites dès le XVe siècle (voir hameau de la Maillardière). Ces logis-étables, qui semblent constituer les noyaux primitifs des fermes, subsistent parfois à l'état de vestiges dans des alignements par la suite allongés ou remaniés, ou au sein de fermes ou de hameaux plus tard agrandis. A défaut de posséder les moyens financiers pour réédifier entièrement leur ferme selon les normes architecturales, hygiénistes et agricoles élaborées au cours de la première moitié du XIXe siècle, les petits propriétaires terriens souhaitant moderniser quelque peu leur ferme se contentent de reconstruire un ou plusieurs bâtiments agricoles, qui sont alors le plus souvent détachés des maisons d'habitation. Le plan de la plupart des fermes, quelle que soit l'ampleur des reconstructions ou ajouts de bâtiments de l'époque contemporaine, procède de la disposition des édifices antérieurs au XIXe siècle, qui ne semblent pas organisés autrement qu'en fonction des contraintes du terrain, de l'orientation des logis (majoritairement ouverts vers le sud) et de la nécessité de regrouper dans une certaine mesure les différents bâtiments.

1Steimer (Claire), Cussonneau (Christian), Pelloquet (Thierry), Le pays segréen. Patrimoine d'un territoire, Nantes, éd. 303, 2009, p. 154-159

Annexes

  • Tableau du repérage des fermes isolées de l'ancien canton de Lassay-les-Châteaux
Date(s) d'enquête : 2017; Date(s) de rédaction : 2023
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Seure Marion
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