Dossier d’aire d’étude IA72059205 | Réalisé par
Ferey Marie (Contributeur)
Ferey Marie

Chercheur auprès du Service Patrimoine de la Région des Pays de la Loire.

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  • inventaire topographique, Les faubourgs manceaux
Quartier Sainte-Croix
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  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

  • Aires d'études
    Mans (Le)
  • Adresse
    • Commune : Le Mans
      Lieu-dit : Sainte-Croix
      Adresse : rue, Prémartine, rue des, Arènes, rue de, Chanzy, rue du Chemin de fer
      Cadastre : 2021 BN-BO-BP-BS-BT-BV-BW-BX-BY-BZ-DK-DL-DM-DN-DO-DV-DW-DX-DY-DZ-OT

Le diagnostic patrimonial du quartier de Sainte-Croix est disponible ICI.

Histoire de la paroisse, l'importance de la vigne

L'histoire de la paroisse de Sainte-Croix durant la période médiévale est liée à la vigne. Dans le testament de l'évêque Bertrand, rédigé le 27 mars 616, on trouve mention des vignes des Arènes. C'est dans ce même document que l'évêque évoque la construction d'une église et d'un hôpital à Sainte-Croix. Cette mention est dû à l'établissement d'un "grand cimetière". Il n'est plus fait mention de l'église jusqu'en 1080, ni de la paroisse avant 1212 sous le nom latin de Sancte-Crucis. Certains clos ou bordages sont mentionnés très tôt : Malum foramem, ancienne dénomination de Maupertuis apparaît en 1124, lors de la donation par l'archidiacre Hugue de Lavardin au chapitre Saint-Julien "domos suas tam petrinas quam ligneas cum plateis adjacentibus et grangiam in vico Mali Foraminis". Gazonfier est identifié comme Gazonfière dans des baux ou actes de vente dès le XIVe siècle. Il semble être constitué de plusieurs clos de vignes dont Douce-Amie appartenant aux religieux de Beaulieu dès 1346. Cauvin, dans son Dictionnaire statistique de la Sarthe, écrit à propos de Gazonfier que le site produit un vin "assez estimé qui se consomme dans le pays".

Du Sainte-Croix Ancien Régime ne reste aujourd'hui que très peu de traces architecturales. Sur le terrain, il a pu être repéré l'hôtel-dieu de Coëffort, des éléments de l'ancienne église, la demeure de Maupertuis et la ferme de l'Ardoise.

Sainte-Croix à la Révolution

La Révolution bouleverse le rapport à la terre et en particulier les principes de propriété. Comme sur l'ensemble du territoire français, les biens de l'Eglise sont confisqués, ouvrant dès lors la possible acquisition d'une réserve foncière étendue aux abords et dans le Mans. Avec notamment la fin des enclos conventuels (représentant 55 hectares), la densification urbaine commence et de nouveaux quartiers voient le jour, tel que celui de l'Étoile. La municipalité nomme une Commission financière chargée d'étudier l'opportunité de se porter acquéreur de ces terres vierges.

Sainte-Croix, commune indépendante : 1793-1855

L'évolution de la population de Sainte-Croix de 1780 à son rattachement au Mans en 1855 indique une nette croissance démographique dans la première moitié du XIXe siècle. Cet état de fait est décrit en 1848 dans le Projet de réunion à la commune du Mans des communes de Sainte-Croix et de Saint-Pavin. À l'article 5, il est possible de lire : "L'augmentation considérable de la population de Sainte-Croix qui a lieu, principalement, par suite de l'émigration des habitants du Mans qui vont s'établir sur ce sol privilégié, jouissant des avantages de la ville, sans en supporter les charges".

Alors que Sainte-Croix ne présentait pas de bourg primitif constitué sous l'Ancien Régime, qui poserait les bases d'une agglomération future, la première moitié du XIXe siècle permet d'affirmer qu'une partie agglomérée de Sainte-Croix se développait comme le prolongement naturel de la ville du Mans.

Dès lors, la population nouvelle qui s'établit à Sainte-Croix peuple en particulier la partie ouest de la commune. L'absence d'un tissu bâti dense primitif permet notamment l'établissement de maisons d'ample gabarit, même en bordure de l'octroi. Une description succincte mais éclairante des maisons dans un périmètre précis est menée en 1816 :  "les maisons situées dans le rayon de deux kilomètres et demi sont isolées pour la plus grande partie et toutes, même celles qui sont le plus rapprochées de la ville ont des jardins". De même, en 1823, lors de la volonté d'aligner la route royale, les maisons qui la bordent sont dites nouvellement bâties, avec un jardin clos aligné sur rue, et majoritairement placées à la lisière du Mans.

La comparaison des deux plans cadastraux de 1812 et 1846, complétée par l'analyse de l'état de la matrice mis à jour en 1830, permet d'appréhender l'évolution du bâti avec précision. À cette date, 142 maisons sont recensées dans la commune de Sainte-Croix, 2 fermes et 1 moulin. Grâce à la mention systématique du numéro de cadastre, il est possible de restituer l'emplacement précis de ces maisons, dont la plupart sont relativement nouvelles. Il est donc possible d'observer une première poche d'urbanisation autour du carrefour des arènes (Champgarreau, Tascher, Sainte-Croix, Grimace), de la rue de la Mariette et de manière plus disséminée autour de la route de Paris, actuelle avenue Bollée.

Quelques témoignages d'érudits du XIXe siècle abondent dans le sens d'une explosion de la construction à Sainte-Croix : "La jolie rue de Flore, qui ne contenait que deux ou trois habitations il y a 6 ans, est presque entièrement garnie aujourd'hui de jolies maisonnettes bourgeoises, la plupart à balcons saillants qui lui donnent un aspect tout particulier". écrit Julien Pesche en 1829. En effet, la progression de l'urbanisation dans les zones susnommées s'intensifie dans les années 1830 et 1840. Le cadastre de 1846 montre bien une concentration des constructions nouvelles au nord-ouest et autour de la route de Paris. Cependant, cette urbanisation ne s'est pas cantonnée à ces rues mais poursuit sa progression au sud de la rue de la Mariette. De plus, l'étude des petites annonces par carottage montre bien une évolution des types de bien à vendre ou à louer. Alors qu'à la période révolutionnaire et sous le Consulat, les mouvements concernaient dans l'immense majorité des terres, vignes ou bordage, à partir de 1820 la part des maisons devient plus importante pour devenir majoritaire dans les années 1845.

Sainte-Croix, de la commune au quartier (1855-1914)

La commune de Sainte-Croix est la première visée par la ville du Mans. Très tôt et de manière récurrente (1808, 1817, 1825, 1837), la question de la qualification de la commune comme banlieue ou comme faubourg du Mans apparaît. Cela concerne deux sujets principaux : l'accession aux écoles du Mans par les enfants de Sainte-Croix et le paiement de certaines taxes aux abords de l'octroi sur la commune de Sainte-Croix.

Le 16 mai 1847, le maire de Sainte-Croix prononce un discours sur la volonté du Mans de fusionner. Le Mans propose alors de subventionner la construction d'une église, d'un presbytère et du nouveau cimetière. Le conseil municipal de Sainte-Croix rejette alors cette proposition. Cette même année, un débat s'amorce entre les deux communes. Sainte-Croix accuse Le Mans de vouloir seulement accroitre sa population, et donc gagner des taxes. Alors que Le Mans évoque une "fraude à l'octroi". Pourtant le 17 mars 1855, la fusion des communes de Saint-Pavin, Saint-Georges et Sainte-Croix avec la commune du Mans est finalement actée.

L'analyse des données de la matrice cadastrale permet d'appréhender le rythme de la construction, et de considérer d'autre part l'évolution géographique de l'urbanisation. Pour Sainte-Croix, la conservation des registres avant la fusion permet de rendre compte d'un rythme plus précocement que pour les autres communes annexées. Ainsi, entre 1822 et 1845, 399 constructions nouvelles sont déclarées. Par la suite, on observe une augmentation drastique du nombre de constructions nouvelles entre 1865 et 1867 puis à nouveau entre 1872 et 1877. Le graphique permet de constater que le rythme des constructions n'est pas le même que celui des autres communes pour lesquelles l'urbanisation est relativement continue. À Sainte-Croix, les constructions nouvelles apparaissent par à-coup, avec des périodes de fortes hausses compensées par des baisses brutales.

Sainte-Croix, l'étalement urbain et densification (1914-1980)

Dans les années de l'entre-deux-guerres, le quartier de Sainte-Croix connait un accroissement de sa population et la construction de nouveaux quartiers qui poursuivent l'urbanisation de la zone vers l'est (Yzeuville). Parallèlement à cet étalement urbain, on constate une densification de la masse bâti avec le comblement des dents creuses dans l'ensemble des rues du quartier par des maisons aux formes art déco ou dérivées.

Contrairement aux quartiers de Pontlieue, de Saint-Georges-du-Plain et de Saint-Pavin-des-Champs, l'ancienne commune de Sainte-Croix n'accueille pas de grand programme de lotissement H.B.M. dans les années 1920-1930. Les quelques lotissements H.B.M. repérés sont relativement restreints par leur nombre et leur emprise géographique. C'est le cas du lotissement rue de l'Éventail dessiné en 1930 par l'architecte Paul Grosch, architecte départemental de la Sarthe. Les maisons entre Yzeuville et l'avenue Bollée présente des formes caractéristiques de la période dans cette zone du Mans (croupes, matériaux). 

Entre 1936 et 1946, la population mancelle croit de 19,05%. Les destructions dues à la Seconde Guerre mondiale entérinent le phénomène accru depuis les années 1930, qui est la pénurie de logements. Au-delà de l'application des projets d'urbanisme développés par Pierre Vago, la municipalité s'empare du problème et amorce une vague constructive sans précédent. Cette prise en charge par le politique s'installe dans les débats en conseil municipal dès 1942, afin de résorber une demande liée à la croissance démographique et au vieillissement des habitations existantes, s'inscrivant ainsi dans la lignée du décret « instituant des mesures exceptionnelles et temporaires en vue de répondre à la pénurie de logements ». La solution privilégiée est la construction de logements dans des zones non bâties. Plusieurs zones de Sainte-Croix sont touchées par la Reconstruction : croisement Mariette / Bollée, cité Malpalu, ilot viaduc Nord....

Dans cette même veine de construction plus intensive de logements pour répondre à une crise majeure aggravée par la guerre, le mouvement dit "castor" a également laissé des traces dans deux endroits du quartier : cité Bobette et cité du Tyrol. Le mouvement coopératif Castors au Mans est représenté par quelques cités construites dans les années 1950 en périphérie du noyau. Il s'installe, comme partout sur le territoire national, dans un contexte de crise du logement et de recherche de la propriété foncière dans toutes les catégories sociales.

Pour Sainte-Croix, des Castors se montent en deux associations distinctes :  les Castors de l'Eau, impasse du Tyrol, constituée de membres employés municipaux, et les Castors de la Sarthe, cité Bobette, regroupant des employés de différents entreprises. Les Castors de l'Eau construisent huit maisons entre 1954 et 1957 sur un terrain particulièrement accidenté. Les maisons doubles sont implantées au sommet d'une butte, sur le versant de laquelle est ménagé un escalier. Les Castors de la Sarthe, à la cité Bobette, bâtissent vingt maisons dont seize jumelles, neuf mitoyennes et une isolée. Une des caractéristiques de ces maisons est le système de distribution, avec un escalier extérieur en façade permettant l'accès au logement. Le rez-de-chaussée est donc dévolu au garage et à un espace de stockage.

Peu d'immeubles dans les quartiers périphériques du Mans peuvent être considérés comme résidentiels. La majorité d'entre eux ont été construit dans un souci de grand nombre et de rapidité. Pourtant, le quartier Sainte-Croix conserve quelques collectifs dont la facture et l'histoire diffèrent de l'ordinaire : résidence du parc, résidence Saint-Exupéry. Dans les années 1950, la municipalité et l'office HLM du Mans mènent un certain nombre de projets de collectifs dans la partie nord de Sainte-Croix et autour de l'avenue Bollée. Parmi ces projets, le Parc de Sainte-Croix est conçu par l'architecte Jean Vergnaud.

L'emprise choisie pour l'étude du quartier de Sainte-Croix correspond aux frontières de l'ancienne commune rattachée au milieu du XIXe siècle au Mans. Il est compris entre les rues de Prémartine au nord, de Chanzy à l'ouest, les voies de chemin de fer au sud et les frontières de la ville à l'est.

Le quartier s'est développé en "tache d'huile" de sa frontière avec Le Mans jusqu'à sa partie est. Le parcellaire diffère donc : dans la partie ouest, il est resserré, majoritairement composé de maisons mitoyennes à deux travées alignées sur rue et donnant sur un jardin à l'arrière à l'exception de l'avenue Bollée qui présente majoritairement des maisons de plus grandes ampleurs et entourées d'un parc. Les constructions comprises à l'est du quartier sont positionnées sur un parcellaire plus lâche avec généralement des jardins englobant. L'extrême est du quartier, au niveau de la vallée Saint-Blaise, est encore rural avec une majorité de fermes conservées sur cette partie du territoire.

Les chemin anciens ont conservé un tracé sinueux (Prémartine, Bollée, Chanzy et Mariette). Les autres voies et places du quartier en revanche sont percées plus tardivement, respectant l'alignement et la physionomie rectiligne du réseau viaire post révolutionnaire. Le relief est vallonné contrairement aux autres anciennes banlieues mancelles avec des points culminant à 116 mètres, notamment autour de la rue de l'Ardoise, ce qui correspond à l'entrée nord-est du massif armoricain.

Image non communicable
  • Plan cadastral de la commune de Sainte-Croix, 1810. 3 dess : encre sur papier. (Archives départementales de la Sarthe ; PC\329.)

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Sarthe ; 3 R 13. Etat des habitants de Sainte-Croix, 1831.

  • Archives départementales de la Sarthe ; 6 M 525. Tableau des cultures et de leur étendue dans l'arrondissement du Mans, 1836.

  • Archives départementales de la Sarthe ; 1M139. Nouvelles délimitations de communes après annexion, 5 septembre 1860.

  • Archives départementales de la Sarthe ; 9 M 21-23. Rapport sur la situation industrielle du département de la Sarthe, s.d.

  • Archives départementales de la Sarthe ; 2 O 182 / 44. Gestion des bâtiments communaux, quartier Sainte-Croix - écoles. 19e siècle.

  • Archives municipales du Mans ; 1 D 104. Délibérations du conseil municipal de Sainte-Croix, 1790-1836.

  • Archives municipales du Mans ; 1 D 106. Délibérations du conseil municipal de Sainte-Croix, 1840-1844.

  • Archives municipales du Mans ; 1 D 107. Délibérations du conseil municipal de Sainte-Croix, 1846-1855.

  • Archives municipales du Mans ; G 48. Augmentation et diminution de la matrice cadastrale, 1850-1913.

Documents figurés

  • Vue cavalière du cimetière du Mans en la paroisse de Sainte-Croix, 1641. 1 dess : peinture sur papier. (Archives départementales de la Sarthe ; HG1927.)

  • Plan de la Motte Rouge à Maupertuis, dressé en 1787. 1 dess. : encre sur papier. (Archives départementales de la Sarthe ; G 12/2).

  • Plan des lieux de Douce Amie et des Doucelles, 1787. 1 dess : encre couleur. (Archives départementales de la Sarthe ; G 12 / 4).

  • Plan visuel du champ de l'aistre Esnault, des vignes de Malpallu, du lieu de Vaugautier, du clos Augé, du lieu du pin et du clos de Gazonfière en Sainte-Croix, 1782. 1 dess : encre sur papier. (Archives départementales de la Sarthe ; G 12/3).

  • Plan cadastral de Sainte-Croix, 1845. 18 dess : encre sur papier. (Archives départementales de la Sarthe ; PC\183\293 à 311).

Date(s) d'enquête : 2017; Date(s) de rédaction : 2021
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Ferey Marie
Ferey Marie

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