Dossier d’opération IA72058858 | Réalisé par
Ferey Marie (Contributeur)
Ferey Marie

Chercheur auprès du Service Patrimoine de la Région des Pays de la Loire.

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  • inventaire topographique, Les faubourgs manceaux
Les faubourgs du Mans : présentation de l'opération d'inventaire
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

  • Aires d'études
    Mans (Le)
  • Adresse
    • Commune : Le Mans
      Lieu-dit : les Sablons, Saint-Pavin-des-Champs, Sainte-Croix, Saint-Georges-du-Plain, Pontlieue, Adresse : avenue, Rubillard, avenue, Heuzé, avenue, Bollée, avenue, Geneslay, avenue , Gambetta, rue de Ruaudin

1. Cadre administratif

La ville du Mans, préfecture du département de la Sarthe dans la Région des Pays de la Loire, Ville d'art et d'histoire fait l'objet de plusieurs campagnes de recherches depuis les années 2010. Dans le cadre de sa candidature à l'UNESCO (concernant la reconnaissance de son mur d'enceinte gallo-romain), la ville a lancé, en partenariat avec la Drac, l'INRAP et l'Université du Mans une vaste campagne de fouilles et d'analyses qui permis d'affiner la connaissance du centre-ville. Depuis 2019, la Ville a pour volonté de réviser son secteur sauvegardé en l'élargissant à des zones faubouriennes. Des campagnes de labélisation ACR (architecture contemporaine remarquable) sont venus complétés l'intérêt porté aux espaces périphériques à la "cité Plantagenêt".

Dans ce contexte, l'inventaire général du patrimoine a entrepris à partir de 2017 une étude portant dans un premier temps exclusivement sur l'habitat sériel avant d'ouvrir l'analyse à des quartiers entiers de la ville pour y aborder un inventaire topographique. Celui-ci fait l'objet d'une convention de partenariat avec la Ville du Mans de 2017 à 2024. Afin d'approfondir la recherche et d'élargir les objectifs de valorisation, une convention avec l'Université du Mans a également été contractée de 2021 à 2023.

2. La méthodologie : un inventaire topographique ?

A. De l'habitat sériel aux quartiers outre-octroi

La première étude menée sur Le Mans avait pour ambition d'être principalement thématique. Elle ne prenait donc en compte que l'habitat et en particulier sa notion de sérialité si présente dans la périphérie mancelle. Cependant, la nécessité d'ouvrir l'étude afin d'y inclure les équipements, les unica, etc, s'est révélée rapidement essentiel. L'étude s'est transformée en une étude topo-thématique tant l'attachement au territoire reste un enjeu majeur des réflexions de l'inventaire général et de la compréhension de la fabrique urbaine. Cependant, la question de la sérialité devant être l'unique axe d'entrée à l'origine, ce thème s'est tout de même révélé être particulièrement présent. Mais l'étudier en tant que telle sans la replacer sous un prisme historique et territorial large et problématisé n'aurait pas permis de concevoir l'étude telle qu'elle est présentée ici ; surtout, il semble évident que les conclusions de l'enquête, qui servent la notion de sérialité, n'auraient pas trouver la même profondeur si la notion territoriale n'avait pas été prise en compte. Certes la notion d'habitat sériel, sans être systématique, est abondante et convoque l'analyse d'objets certes annexes mais néanmoins complémentaires pour la compréhension du sujet principal. Ainsi, malgré un rétrécissement de la donnée étudiée, le corpus n'en est pas moins large et complet.

Ainsi, bien que l'étude du Mans porte principalement sur l'habitat sériel, ce qui se justifie par le terrain même car la sérialité est une identité forte du territoire, il est apparu rapidement, qu'une déconnexion complète de l'habitat avec d'autres types de bâtis ne serait pas satisfaisante. Plusieurs typologies structurant la ville et son maillage doivent être abordées afin de comprendre et d'analyser l'implantation de cette sérialité. Par exemple, les grands projets d'urbanisme qui structurent la ville étendue du Mans (caserne Chanzy, Percée centrale, etc) doivent être étudiés notamment en ce qu'ils créent le nouveau visage des quartiers. Ainsi la majorité des maisons aux abords de la caserne de Chanzy est bâtie en suivant son implantation, formant à la fin du XIXe siècle un "quartier d'Infanterie". La caserne et son analyse sont incontournables pour l'étude car celle-ci transforme le territoire et entraine la mise en place de l'objet d'étude. Certainement plus prégnante encore est la question des industries qui modifient le paysage, concentrent la main-d'œuvre et donc créent des logements entrainant une identification au lieu où elle s'établit. L'habitat et l'industrie deviennent dès lors des objets d'Histoire. Il semble impossible d'étudier l'habitat sériel du Mans sans rendre compte du déploiement des industries et de leur implantation, en particulier celles de grande ampleur telle que la manufacture des tabacs employant 615 ouvriers en 1884. Cependant, n'étudier que l'habitat et son lien à d'autres objets sans avoir une approche de repérage et d'étude des sources territoriales entrainerait une mécompréhension de la fabrique urbaine qui ne serait que comprise justement du fait de l'industrie et de la gare. Hors, il faut concevoir, comme cette étude le montre, que Le Mans connait la même constitution que la majorité des grandes villes européennes car elle présente une réserve foncière pour des investisseurs potentiels qui émergent au début du XIXe siècle. Inversement, les édifices générés par la concentration nouvelle de population (bains douches, salles de bal, bouliers…) sont également à prendre en compte en ce qu'ils résultent de cette démographie dynamique. Ainsi, il n'est pas envisageable à l'échelle du Mans de ne travailler que sur le principe de sérialité dans l'habitat mais bien de traiter ce sujet avec une double approche méthodologique.

Le Mans s'est développé en deux phases distinctes : à travers ses communes limitrophes annexées au XIXe siècle et par des grands travaux de densification ou d'extension urbaine ayant fait surgir des quartiers ex-nihilo. Bien que ces deux modèles témoignent d'une implantation particulière de l'habitat, ils seront traités selon les procédés topographiques propres à l'inventaire général. Ainsi, les anciens quartiers outre-octroi Saint-Pavin-des-Champs, Saint-Georges-du-Palin, Sainte-Croix et Pontlieue tout comme les urbanisations programmées (Maroc, Pins, Maillets, Sablons, Ronceray, Bellevue), sont analysés dans leur ensemble pour rendre compte du véritable processus de fabrique urbaine.

B. Quelle définition pour ces quartiers ?

Depuis quelques années, l'étude de la fabrique urbaine connait un renouveau. Les thèses universitaires portant sur les quartiers parisiens annexés par Haussmann ou sur les quartiers londoniens et madrilènes, ont permis un dépouillement systématique des archives, notamment notariales et ont apporté un nouveau regard sur la constitution de ces quartiers faubouriens. Les conclusions de ces thèses, qui montrent un mouvement urbain similaire, ont éclairé l'étude des quartiers du Mans. Guidant en partie la recherche, elles ont permis de constater une similarité nette entre tous ces espaces, qui ont au départ comme seul dénominateur commun la proximité d'avec une ville et donc leur position en dehors de l'octroi.

Carte des espaces faubouriens étudiés par l'inventaire général.Carte des espaces faubouriens étudiés par l'inventaire général.

En effet, cette position en dehors de l'octroi jusqu'à l'annexion en 1855 pour Saint-Pavin-des-Champs, Saint-Georges-du-Plain et Sainte-Croix puis en 1865 pour Pontlieue et les privilèges sur les taxes, qui se perpétuent bien après l'annexion, conditionne l'histoire du territoire. Certes, l'arrivée du chemin de fer en 1854, des industries (forge Bollée-Martin en 1846, manufacture des tabacs en 1877, Renault en 1920…), et des équipements (caserne Chanzy en 1877, hôpital en 1888) ont une conséquence sur la transformation des faubourgs, entrainant une croissance démographique sans précédent. Cependant, leur rôle est à compléter avec le processus de spéculation non programmée sur les terres vierges, mené par une multitudes d'acteurs qui ont créés la ville.

C. L'application méthodologique

Les critères

La connaissance préalable du territoire s'appuyait principalement sur des recherches réalisées par des associations patrimoniales (PLMO, Le Mans Nord, La vie Mancelle et Sarthoise...) ou des enquêtes relativement anciennes du XIXe siècle au début du XXe siècle. Ce que mettaient en évidence ces études était un territoire urbain dense ayant connu une mutation sans précédent à l'époque contemporaine. En effet, les érudits tels que Julien Pesche évoquaient "La jolie rue de Flore, qui ne contenait que deux ou trois habitations il y a 6 ans, est presque entièrement garnie aujourd'hui de jolies maisonnettes bourgeoises, la plupart à balcons saillants qui lui donnent un aspect tout particulier." en 1829. Nombreux ouvrages historiques sur la ville du Mans mentionnent un tournant au XIXe siècle dans la physionomie de la ville "métamorphose", "naissance" ou "renaissance" sont des termes récurrents confirmant une évolution urbaine qui, bien que générale aux villes occidentales, nécessite d'être étudiée pour elle-même ainsi que dans le cadre de projet d'aménagements urbains contemporains.

Déjà dans les années 1980, les conclusions de l'observation du territoire par le service de l'Inventaire Général soulignait qu'au Mans : "il serait particulièrement intéressant d'étudier cette forme nouvelle d'urbanisation originale à l'époque pour la ville et de la relier avec les théories des cités jardins et de l'univers pavillonnaire". Ainsi, la principale problématique de travail a été de comprendre l'implantation des édifices présents sur les territoires urbains étudiés (quels acteurs ? Quels dispositifs ? Quelle architecture ?) afin d'en établir des typologies claires et de comprendre les liens que cet habitat entretenait avec l'ensemble de son environnement : travail, loisirs, éducations, cultes... Il nous a fallu également identifier les espaces de rupture, rupture entre la ville et la campagne qui n'a eu de cesse d'être modifiée, mais également ruptures entre les quartiers soit au sein même de la zone faubourienne.

L'enquête de terrain

L'étendue hors-norme de la ville du Mans (comparé à la taille de la ville de Lyon) et la densité qui lui est propre a nécessité de découper le territoire en différents quartiers qui ont fait l'objet de repérage et d'étude les uns après les autres. L'enquête s'est déroulée de 2017 à 2023 et les dossiers électroniques ont été terminés d'être rédigés en 2024 :

- 2017-2019 : Saint-Pavin-des-Champs

- 2019 : Z.U.P. des Sablons et cité-jardin du Maroc

- 2020 : Saint-Georges-du-Plain et cité-jardin des Pins

- 2021 - 2022 : Sainte-Croix et Grands ensembles du Ronceray et du Glonnières

- 2022 - 2023 : Pontlieue

Chaque quartier a fait l'objet d'un arpentage systématique du territoire avec un outil SIG de repérage ayant produit une couche d'analyse avec plus de 500 000 entités repérées à l'échelle de la ville. La fiche de repérage reprenait un certain nombre de critères qui ont éclairés les modes de construction différent d'un quartier à l'autre. Par exemple, la majorité des maisons dans la partie ouest de Sainte-Croix s'est révélée de plus grande ampleur, avec un décor façade plus prononcé que dans les autres faubourgs. Après l'établissement de statistiques indiquant les caractéristiques des typologies architecturales des faubourgs du Mans et l'analyse des résultats de terrain, un certain nombre d'entités a été sélectionné pour être étudié en s'appuyant sur des recherches dans différents fonds d'archives (archives municipales, archives départementales, archives nationales, IFA, archives historiques de la SNCF, CHT, etc.) qui ont apportées des précisions quant à l'histoire de la construction et de l'implantation des éléments architecturaux : processus de lotissement, spéculations foncières, montage de SCI, etc. et ont permis de répondre aux problématiques soulevées par l'étude.

3. Les résultats

A. Les dossiers

L'étude d'inventaire a donné lieu à la rédaction de dossiers d'architecture privée ou publique, ainsi qu'à de nombreux dossiers d'aire d'étude qui avait pour objectif de répondre à la problématique du zonage urbain, des dossiers de synthèse qui présentaient les familles architecturales retenues (maisons, immeubles, équipements et ensemble industriel). Des dossiers thématiques qui concernent des éléments propres au Mans ou particulièrement saillants sur le territoire ont mis en avant l'architecture de culte au XXe siècle comme un sujet qui éclaire l'installation de nouveaux quartiers et l'arrivée de nouvelles populations. Les lotissements créés par les associations "castors" ont retenu l'attention de la recherche en ce qu'ils évoquent un processus d'auto-construction propre à une période définie et encadré par des structures associatives inédites. Une société industrielle ayant œuvré dans plusieurs faubourgs manceaux et dont les demeures patronales ont pu être identifiées a fait l'objet d'un dossier spécifique qui pourra être alimenté par l'étude en cours sur les ports de la façade Atlantique.

Les 211 dossiers sont répartis comme suit :

Dossiers Aire d'étude

11

Dossiers collectifs

14

Dossiers thématiques

3

Dossiers architecture

183

Répartition des dossiers Gertrude

B. Les temps de valorisation

Les résultats ont donné lieu à deux ouvrages de synthèse (collection Découverte. Patrimoine en Région et collection Images. Patrimoine en Région) :

- FEREY Marie et GROS Philippe, Architectures sacrées. Le Mans au XXe siècle, Nantes, Ed. 303, 2021.

- FEREY Marie, Les faubourgs du Mans. La fabrique de la ville moderne, Nantes, Ed. 303, 2023.

Une exposition intermédiaire, portant sur un quartier a eu lieu en 2019 à la Maison du Pilier rouge avec le soutien du service Patrimoine de la Ville. Une exposition restitutive Mécanique d'une ville. Les faubourgs du Mans, a été inaugurée le 18 octobre 2023 au musée Jean-Claude Boulard - Carré-Plantagenêt en co-commissariat avec les équipes musées.

La Région des Pays de la Loire a voulu innové dans ses actions de valorisation par la réalisation avec les studios GONG d'une série de podcasts dans sa collection L'aventure des Lieux portant sur la ville du Mans : https://www.radio.fr/podcast/laventure-des-lieux.

Un colloque a été organisé en partenariat avec l'Université du Mans et le CHS les 16 et 17 novembre 2023, intitulé : Habiter les faubourgs et les banlieues de la fin du Moyen Âge à aujourd’hui. Nouvelles approches croisées sciences sociales, patrimoine et médiation. Les actes ont été publiés aux éditions 303.

Par ailleurs, l'étude a fait l'objet de parution d'articles émanant de participation ou non à des colloques qui ont permis à la recherche menée au Mans d'être visible au sein de périodiques ou d'actes brassant un large public.

Annexes

  • Le Cahier des clauses scientifiques et techniques
Date(s) d'enquête : 2017 - 2023 ; Date(s) de rédaction : 2023
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Ferey Marie
Ferey Marie

Chercheur auprès du Service Patrimoine de la Région des Pays de la Loire.

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