• inventaire topographique, quartier Bas-Chantenay
Carrières Miséry, 1 rue Joseph-Cholet
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bas-Chantenay - Nantes
  • Commune Nantes
  • Adresse 1 rue Joseph-Cholet
  • Cadastre HX 3 4
  • Précisions anciennement commune de Chantenay
  • Dénominations
    brasserie, carrière
  • Appellations
    Carrières Misery
  • Destinations
    carrière, brasserie, zone de stockage ville de Nantes

XVIe siècle - début du XXe siècle : La carrière granitique de Miséry

L'exploitation du site est attestée par de nombreuses sources dès la seconde moitié du XVIe siècle. Plusieurs types de pierre en sont extraites : la baryte sulfatée ainsi que deux variétés de granit (une roche très dure gris-bleu et une roche friable jaune). La légende veut que la carrière hérite du nom de Miséry car elle aurait servi de refuge à des miséreux ainsi qu'à des ermites. Cette carrière appartient aux seigneurs de la Hautière qui en accordent la jouissance à la Ville de Nantes à l'extrême fin du XVIe siècle. Au XVIIIe siècle, la carrière ne cesse de s'agrandir provoquant des discordes entre la ville, les propriétaires et les riverains. Elle sert de lieu d'exécution au moment de la déroute de l'armée vendéenne lors de la Terreur. Au cours du XIXe siècle, le granit de Miséry est utilisé pour paver les rues nantaises. L'activité d'extraction se poursuit au début du XXe siècle cohabitant quelques années avec l'activité brassicole.

1900-1985 : les brasseries de la Meuse

Sur les matrices cadastrales de 1837, une brasserie, tenue par René Plumard, existe sur le terrain situé en face de la carrière. En 1900, Eugène Burgelin, originaire de l'est de la France, installe sa brasserie sur une partie du site de la carrière. En 1905, les trois plus grosses brasseries de Nantes Schaeffer, Rottenbach et Burgelin, fusionnent et regroupent leurs activités à Miséry. L'entreprise devient la Société des Brasseries Nantaises, avec pour emblème un paludier. En 1906, les trois associés vendent une partie de leurs actions aux Brasseries de la Meuse créées en 1890 par Adolphe Kreiss, à Bar-le-Duc. Leur développement est fulgurant : les brasseries rayonnent sur 22 départements.

La fabrication et le conditionnement :

En 1919, des travaux de surélévation d'une partie des bâtiments, conduits par les architectes Francis Leray et André Chauvet, sont réalisés afin de construire une nouvelle salle de brassage. En 1928, suite à l'élaboration d'un procédé innovant, le premier atelier d'embouteillage de France conditionnant la bière est mis en place à Miséry : 200 000 bouteilles sortent quotidiennement des chaînes. La main-d'œuvre est essentiellement féminine. L'orge utilisée pour la fabrication du malt provient de la Mayenne, de la Sarthe, du Maine-et-Loire, de l'Indre, de Beauce et de Champagne. Les brasseries font elles-mêmes leur malt et disposent d'une malterie pneumatique. Parallèlement à la fabrication de cinq types de bière (le Petit Bock, le Paludier, la bouteille de table, La nourrice des nourrices, la bouteille export), une chaîne met en bouteilles, limonades, sodas et sirops commercialisés sous la marque "Les Couronnes". Des chercheurs mettent au point, en 1938, les jus de fruits Vivor : orange, pamplemousse et ananas, des fruits dont le port s'est fait une spécialité.

La politique sociale de l'entreprise :

A la pointe du progrès technique, les Brasseries Nantaises ne sont pas en reste en matière d'œuvres sociales. En 1896, Frédéric Burgelin crée une caisse de secours pour ses ouvriers. Puis, avec la croissance de l'entreprise, la Direction met en place de nouveaux services. Des maisons d'habitation sont construites rue de la Poignée ainsi qu'une crèche (cf dossiers : crèche et maisons ouvrières) . Une infirmerie est ouverte et, chaque semaine, les salariés et leur famille peuvent s'y rendre pour des consultations gratuites. Une salle de douche est mise à disposition du personnel qui peut, de plus, bénéficier de prix avantageux sur des produits de première nécessité, par l'intermédiaire d'une coopérative.

Les années 1940-1950 :

Soucieuse de trouver de nouvelles sources d'approvisionnement en eau, la direction fait creuser en 1938-39, un puits, mais l'eau révèle une trop forte teneur en fer et s'avère impropre à la fabrication de la bière. Elle sert cependant à celle des jus de fruits et est commercialisée, à partir de l'été 1942, en eau gazeuse "la Duchesse Anne". Pendant la Seconde Guerre mondiale, les approvisionnements en agrumes sont suspendus ; la gamme de jus Vivor utilise les fruits locaux : fraise, cassis, groseille, framboise et raisin. L'usine fabrique alors du cidre pour parer aux manques de houblon et d'orge. La malterie, avec son toit en béton très épais, sert parfois d'abri en cas de bombardement et abrite les ouvriers et les habitants du quartier. Au début des années cinquante, les Brasseries de la Meuse sont considérées comme l'une des brasseries les plus importantes de France. L'usine emploie plus de 50 personnes en saison, l'année 1953, et vend en moyenne 500 000 bouteilles par jour.

La fermeture :

Le déclin de la consommation de bière et le rachat de l'usine par le groupe BSN-Gervais-Danone signe l'arrêt de mort de l'usine qui ferme ses portes, au cours de l'été 1985, malgré de vives protestations. L'usine est détruite en 1987. Puis, en 1995, ce sont le grand hall et le chalet de réception qui disparaissent à leur tour du paysage. Aujourd'hui, cet espace est en friche. La ville de Nantes est propriétaire de l'ensemble du terrain (31 000 mètres carrés) depuis 2004. Depuis le printemps 2010, une association d'architectes et de paysagistes investit régulièrement le site où elle se livre à des expériences artistiques et végétales. Les anciennes façades sont mises à disposition de la ville pour les graffeurs. En 1998, un ancien viticulteur, Luc Ropert, brasse à nouveau de la bière dans le quartier. Deux autres microbrasseries existent dans l'agglomération nantaise, l'une à La Chapelle-sur-Erdre, et l'autre, près du rond-point de Paris.

Les premiers bâtiments des Brasseries construits par Frédéric Burgelin se situent dans la partie ouest de la carrière. Ils comprenaient des caves, une malterie, des salles de fermentation de brassage, une tonnellerie et un hangar "rince-fûts". En bordure de la rue Joseph Cholet se trouvaient les bureaux, les ateliers, la chaufferie, les bureaux, les vestiaires, le réfectoire ainsi que le parc à charbon et des garages. La canetterie est édifiée en 1928 dans le fond de la carrière sous l'école des garçons des Garennes, ainsi que la limonaderie, le long de la voie. C'était une grande halle en béton avec des bas-côtés et une structure composée de fermes métalliques ajourées avec une partie de verrière au faîtage.

  • Murs
    • pierre
    • enduit
    • maçonnerie
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler

Les anciennes carrières de Miséry constituent un site remarquable par son emplacement, ses dimensions et ses usages.

Bibliographie

  • BLOYET, Dominique. L'histoire des brasseries nantaises in Les dossiers de la mémoire. Editions C.M.D., Nantes, 2000

  • Chambre de Commerce de Nantes. Exposé des travaux de la Chambre de Commerce pendant l'année 1900. Rapport sur la situation commerciale et industrielle en 1900. Nantes, impr. Grimaud et fils, 1901.

  • Chambre de Commerce de Nantes. Exposé des travaux de la Chambre de Commerce pendant l'année 1913. Rapport sur la situation commerciale et industrielle en 1913. Nantes, impr. Grimaud et fils, 1914.

  • GARNIER, Hélène. Le patrimoine industriel nantais, élément de réflexion urbaine, 1994.

  • KEMENER, Yann-Ber. Bières et brasseurs de Bretagne, traditions et renouveau, septembre 1995.

  • Les Annables de Nantes et du Pays Nantais, Les perrières de Miséry en Chantenay, in Chantenay hier et aujourd'hui, n° 206, 1982.

  • ROCHCONGAR, Yves. Capitaines d'industrie à Nantes au XIXe siècle, Nantes, éd. MeMo, 2003.

Date(s) d'enquête : 2012; Date(s) de rédaction : 2012