Dossier d’œuvre architecture IA53004405 | Réalisé par
Barreau Pierrick (Contributeur)
Barreau Pierrick

Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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  • enquête thématique départementale, rivière Mayenne
Bourg de Saint-Jean-sur-Mayenne
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation

Une position défensive convoitée

Le site de Saint-Jean-sur-Mayenne, propice à la défense, apparait comme occupé depuis une période reculée. Le bourg est implanté sur un étroit retranchement cerné de tous côtés, sauf au nord, par les rivières de la Mayenne et de l'Ernée qui se rejoignent légèrement plus au sud. A environ un kilomètre au nord, la mise en défense est facilitée par un premier resserrement entre les deux rivières : on trouve d'ailleurs à cet emplacement une multiplicité de vestiges et d'indices témoignant de cette mise en défense à différentes époques : l'oppidum gaulois de Château-Meignan, protégé Monument Historique en 1924, la butte (artificielle ?) de la Cohue, la motte castrale d'Orange dite "camp des Anglais", le toponyme "le Châtelier".

On trouve moins de vestiges dans le bourg lui-même, à l'exception d'un grand pan de mur surplombant l'Ernée, daté du Haut Moyen Age et caractérisé par des contreforts et des cordons de briques. Il s'agirait d'un vestige du monastère mérovingien dédié à saint Trèche et saint Jean, autour duquel s'est développé la petite agglomération. Réputé fondé par l'ermite Trèche envoyé par l'évêque du Mans pour favoriser l'évangélisation du Bas Maine, le monastère de Busoglius ou de Buxiolus est cité en 710 dans les Actus pontificum Cenomannis. Il est donné comme refuge aux moines de Noirmoutier par Charles le Chauve en 854. Il semble disparaitre dans le courant du Xe siècle. Le site est ensuite occupé par une chapelle, remaniée voire reconstruite à de nombreuses reprises. Le moulin de Boisseau conserve le souvenir du nom Buxiolus. Les origines de l'église paroissiale, très remaniée et peu documentée, demeurent en revanche très floues (XIIe siècle ?).

Le fief de Saint-Jean-sur-Mayenne, puis celui de la Girardière, apparaissent respectivement aux XIIIe et XIVe siècles parmi les possessions de la famille Mathefelon, châtelains de la Motte-Serrant à Montflours. L'abbé Angot rapporte que les seigneurs du Fouilloux s'en réclamaient également propriétaires au moins dès le XIVe siècle, d'où une querelle de préséance dans l'église paroissiale. Au début du XVIIe siècle, l'achat de la seigneurie par Urban de Montecler, devenu seigneur du Fouilloux, aux seigneurs de la Feuillée héritiers des Mathefelon, clarifie la situation. La mouvance du fief de Saint-Jean, dont témoignent des plaids et remembrances, incluait le presbytère et la fabrique, le fief du Plessis-Saumon, la ferme du Verger, la chapelle de la Cohue et les maisons du bourg. Parmi ces dernières figure une certaine "Grand Maison de Saint-Jean", qui n'est plus identifiable aujourd'hui : il s'agissait, selon toute vraisemblance, du manoir seigneurial, résidence du seigneur et lieu d'exercice de son pouvoir administratif et judiciaire avant l'annexion à des seigneuries plus importantes. Au XVIIIe siècle encore, Davelu écrivait : "le bourg est placé dans la fourche à la jonction des rivières de Mayenne et d'Ernée, il est assez peu considérable [...]. L'église dédiée à Saint-Jean est rebâtie depuis peu".

L'évolution du bourg jusqu'au XIXe siècle

Quelques éléments concernant l'histoire du franchissement de la Mayenne à cet endroit nous sont connus. Des passages à gué devaient exister, notamment entre le Port et la Girardière si l'on se fie aux chemins encore visibles sur le plan cadastral napoléonien du XIXe siècle. Un pont n'est attesté à Saint-Jean qu'à partir du XVe siècle, mais on en sait peu de chose. En 1606, l'acte d'acquisition de la seigneurie de Saint-Jean-sur-Mayenne par Urban de Montecler indique que le fief était assorti du droit "de pontonnaige et passaige sur la rivière de Mayenne".  Au XVIIIe siècle, le pont consistait en un tablier en bois (appelé "les Planches") posé sur des piles en maçonnerie. Un pont en pierre est édifié en 1842 : il sera reconstruit à deux reprises, en 1863 et suite à son bombardement en 1944.

Le village conserve en grande partie son faciès ancien, bien que l'essentiel des façades des maisons sur la voirie témoigne de l'importance des remaniements du XIXe et du XXe siècle. En 1899, l'instituteur communal peut encore écrire à ce sujet : "[Le bourg] est traversé en son milieu par un chemin vicinal sinueux, bordé de vieilles maisons construites sans aucun alignement. Au centre sur la place, se trouve la vieille église […]. A part quelques constructions nouvelles, toutes les maisons sont vieilles, grisâtres et de forme très irrégulière". On doit la relative préservation de l'organisation du centre-bourg à l'aménagement d'une route de déviation dans les années 1840, afin de faciliter la circulation : il s'agit de l'ancienne route de grande communication n°31, actuellement rues Saint-Trèche et de l'Ancienne Mairie. Arrivant de Changé, elle enjambe l'Ernée, passe sous la chapelle saint-Trèche, contourne les maisons du bourg et l'église, dessert le pont et repart en direction d'Andouillé.

Dans le cœur du village, seule la suppression du cimetière, indispensable à l'agrandissement de l'église, vient créer une aération nouvelle à partir des années 1830. Le bourg ne connait pas de véritable accroissement au cours du XIXe siècle, mais plutôt un renouvellement du bâti ou plus certainement des façades. Néanmoins, quelques maisons s'implantent long de la nouvelle route établie parallèlement à l'ancienne dans la 2e moitié du XIXe siècle : elles sont orientées vers la Mayenne dont on s'attache à jouir de la vue, par la construction de balcons, de terrasses et de pavillons.

La réappropriation d'un village pittoresque

L'attrait du site de Saint-Jean-sur-Mayenne, village perché sur un escarpement entre deux rivières, est reconnu progressivement à partir du XIXe siècle et conduit à la réalisation de certains aménagements visant à renforcer son caractère pittoresque. La construction de la mairie et de l'école de garçons, en 1850, donne lieu à la réalisation d'un bâtiment en forme de chapelle médiévale dessiné par l'architecte Renous. Sa silhouette, récemment entourée d'immeubles qui la dénaturent, domine la vallée au nord du bourg, en surplomb du cimetière. A sa suite, l'architecte Boutreux proposera une école de filles en forme de manoir, projet qui sera finalement revu avec plus de modestie. En 1876, un nouveau presbytère est construit au sud du bourg, dominant l'Ernée. Tirant parti de l'escarpement rocheux, le curé procède ensuite à des aménagements pittoresques : une grotte, peut-être de l'excavation laissée par un ancien four à chaux évoquée par l'abbé Angot, est peuplée de groupes sculptés représentant des scènes de la Passion, tandis qu'une reproduction de la grotte de Lourdes est surmontée d'une imposante maquette de la basilique, en deux dimensions. Enfin, en 1916, la chapelle Saint-Trèche est remaniée en sanctuaire dédié à la mémoire des morts de la grande guerre.

En parallèle, quelques maisons de villégiature que l'on nomme vulgairement cottages, construites pour des Lavallois, s'implantent en périphérie du bourg à la fin du XXe siècle et au début du XXe siècle. Celles-ci demeurent moins nombreuses et plus dispersées qu'à Changé, mais ont été généralement moins remaniées. Certaines sont tournées vers la Mayenne, comme Ker Plaisance, ou vers l'Ernée, comme le Ravay, ancien moulin réaménagé pour le compte de Roger Lambelin. Tout comme Changé, Saint-Jean-sur-Mayenne, ses sites pittoresques et ses panoramas sur la vallée de la Mayenne attirent les promeneurs lavallois, les peintres et peut-être quelques touristes si l'on en croit le guide de Laval et sa région de 1897. Celui-ci décrit le paysage avec poésie : "La capricieuse Ernée forme contraste avec la majestueuse Mayenne, les hautes et souvent sévères collines qui bordent celle-ci et les mystérieux lointains que la trouée de son lit fait entrevoir en amont ont pour pendant le délicieux tableau de l'immense vallon jalonné d'innombrables peupliers et les coteaux à la luxuriante chevelure faite d'arbres de toutes essences, le tout s'éteignant là-bas dans un brumeux dégradé que domine de sa silhouette l'église de la Baconnière". Au même titre que le paysage, les belles maisons de villégiature y sont présentées comme des sujets d'admiration et d'étonnement.

Le bourg de Saint-Jean-sur-Mayenne n'échappe pas à l'étalement urbain de l'agglomération lavalloise dans la 2e moitié du XXe siècle : malgré les contraintes topographiques, des zones pavillonnaires sortent de terre au nord et au sud du bourg, ainsi qu'une zone d'activités à Chaffenay, et grignotent progressivement la campagne environnante. En revanche, l'arrivée depuis l'est, du côté du pont et de la Mayenne, demeure préservée.

  • Période(s)
    • Principale : Haut Moyen Age, Temps modernes, Epoque contemporaine

Le bourg de Saint-Jean-sur-Mayenne occupe un étroit escarpement rocheux calcaire légèrement au nord de la confluence de la Mayenne et de l'Ernée : le village s'en trouve cerné au nord, à l'est et au sud, et accessible par deux ponts. Il se trouve au croisement de plusieurs routes secondaires reliant Laval, Louverné et Andouillé. Les maisons s'étagent le long de deux rues parallèles sur cette étroite bande de terrain : la rue ancienne, densément bâtie et qui s'étire entre l'église et la chapelle Saint-Trèche (rue Maurice Courcelle), et la route moderne du XIXe siècle (rues Saint-Trèche et de l'Ancienne Mairie), bordée de demeures plus vastes et orientées pour profiter de la vue sur la Mayenne, avec leurs terrasses et balcons. Des lotissements se greffent au bourg ancien au nord et au sud.

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Mayenne ; 14 J 430. Chartrier du Fouilloux ; terrier de la châtellenie, 1697, 1698, 1701.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 14 J 457. Chartrier du Fouilloux ; amendes et remembrances des plaids des fiefs et seigneuries de Saint-Jean-sur-Mayenne et la Girardière, 1601-1636.

  • Archives départementales de la Mayenne ; MS 80/5-5. Monographie communale de Saint-Jean-sur-Mayenne, par l'instituteur Duval, 1899.

  • Archives départementales de la Mayenne ; O 957/4. Bâtiments communaux de Saint-Jean-sur-Mayenne, XIXe-XXe siècles.

Bibliographie

  • ANGOT, Alphonse (abbé). Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne. Laval : Goupil, 1902.

  • DAVELU, Pierre-François. Répertoire topographique et historique du Maine. [Ouvrage manuscrit]. 1766-1774

  • GUEDON, Isidore. Laval et ses environs, guide de l'étranger, 1897.

  • Le patrimoine des communes de la Mayenne. Paris : Éditions Flohic, 2002.

  • PANNARD, Eugène. Saint-Jean-sur-Mayenne, petit essai d'histoire locale, 1953.

  • VALAIS, Alain. Les églises rurales du premier Moyen Age (Ve-XIe siècle) dans l’ancien diocèse du Mans et à ses confins. Thèse de doctorat d’histoire et archéologie, Université Paris-Nanterre, 2021.

Documents figurés

  • Collection de cartes postales anciennes des communes de la Mayenne. (Archives départementales de la Mayenne ; 5 Fi).

  • Plan de l'oppidum de Château-Maignen, au nord du bourg, par Louis Garnier (?), début du XXe siècle. (Archives départementales de la Mayenne ; 183 J 103).

  • Plan cadastral napoléonien de Saint-Jean-sur-Mayenne, 1811 (?). (Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 2817).

Date(s) d'enquête : 2021; Date(s) de rédaction : 2021
(c) Conseil départemental de la Mayenne
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Barreau Pierrick
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Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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