Dossier d’œuvre architecture IA53004346 | Réalisé par
Seure Marion (Contributeur)
Seure Marion

Chercheuse au pôle Inventaire du service du Patrimoine de la Région Pays de la Loire.

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  • inventaire topographique, Canton de Lassay-les-Châteaux
Hameau de la Bouchardière
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Ancien canton de Lassay-les-Châteaux - Lassay-les-Châteaux
  • Commune Thubœuf
  • Lieu-dit Bouchardière
  • Cadastre 2020 ZK 30/40/92
  • Précisions
  • Dénominations
    écart
  • Parties constituantes non étudiées
    grange, étable, logis, remise

L'écart de la Bouchardière est l'un des rares hameaux étudiés où l'on peut faire correspondre de manière assez précise la documentation ancienne avec le bâti encore en élévation. Il présente la spécificité d'avoir été très peuplé au XVIIe siècle, où dès cette époque, un morcellement des parcelles est en cours.

La Bouchardière est un lieu qui dépendait de la seigneurie du Bois-Thibault pendant tout l'Ancien Régime. Le chartrier de cette seigneurie est riche d'informations sur le village à cette époque. Son caractère noble n'est pas documenté mais la présence d'une maison de taille importante portant des armoiries laisse présager la présence d'habitants au statut privilégié. En 1743, la Bouchardière est qualifiée de "métairie".

Paysage, activités et organisation

Si la Bouchardière se trouve aujourd'hui dans un paysage non boisé, cela n'était pas le cas à la fin du XVe siècle. En effet, en 1484, un "bois de la Bouchardière d'un costé le ruissel de la petite Corberie" est mentionné. Sur la feuille C2 du cadastre ancien, une portion de chênaie est localisée au nord du village, à proximité de l'écart de Narbonne.

Fortement peuplé sous l'Ancien Régime, le village était organisé autour d'une cour commune, qui appartient encore à tous les habitants du lieu en 1813. Sa position centrale et la division ancienne des édifices entre nombre de propriétaires sont sans doute à l'origine de la propriété partagée de cette parcelle. Elle contenait entre autres une place de fumier (citée dès 1564) et une marre, qui servaient à l'ensemble des villageois. L'état de section du cadastre de 1813 mentionne un four, propriété d'un dénommé Patoux, également situé à cet endroit. Seul four documenté, il servait probablement à tous.

En 1564, les habitants de la Bouchardière détenaient le droit d'aller "exploiter les communes de la lande", qui se trouvait à l'ouest du village. La possession de ce privilège collectif est réaffirmée en 1668, puisque les tenants du fief ont droit d'"usage aux communes et landes dud. lieu, aux douets et puy et toutes franchises et libertés qui en dépendent". Cela est de nouveau écrit dans les aveux du XVIIIe siècle. L'ensemble des habitants, qui dépendent "censivement et roturierement" du Bois-Thibault (1765), est solidaire des 4 livres d'impôt dues au seigneur. Sans être qualifiée de "frérèche", la Bouchardière semble soudée par une importante solidarité villageoise.

Les documents anciens mentionnent les divers prés, champs à lin et à chanvre, pressoirs, granges et étables, détenus par les habitants, ce qui laisse supposer que la polyculture vivrière était le moyen de subsistance des habitants du lieu. Cela perdure jusqu'au début du XXe siècle, puisque, dans les recensements de population du XIXe siècle, les villageois sont tous propriétaires-cultivateurs ou cultivateurs. Aucune trace dans ces documents de tisserands ni de fileuses.

Phasage chronologique et évolution de l'architecture

XVe et XVIe siècle

Le premier document concernant la Bouchardière date de 1484. Il mentionne les possessions de Jean Penlou qui consistent en deux maisons et deux places de maisons avec courtils, vergers, jardins et estraiges.

En 1564, Martin Penloup, sans doute un des héritiers du précédant, possède "une chambre haulte avec un grenier en icelle, couverte de tuille, avec une cave au bout de lad. chambre", "une maison servant d'estable couverte de chaulme" "avec la quarte partye d'une maison, chambre, cellier, estable, chambrelle et grenier couverte de tuille pour partie, de chaulme pour aultre partye" et "un cares de maison servant de grange couverte de chaulme". La profusion de maisons et d'habitants cités quelques dizaines plus tard (1635), dans un document au caractère plus complet, laisse supposer que ces aveux rendus par la famille Penloup ne sont qu'une partie de ceux reçus par les seigneurs du Bois-Thibault.

Si l'on ne peut situer avec précision les édifices mentionnés ci-dessus, dont les descriptions demeurent floues du point de vue topographique, du moins certains éléments architecturaux datant vraisemblablement de cette époque peuvent être pointés. L'alignement oriental, le plus imposant du village par sa haute toiture, comporte sur sa façade occidentale deux linteaux à accolades, gravés d'armoiries parlantes (une couronne ; une couronne, un singe (?) et une branche de laurier) qui semblent en place. Sa façade orientale est ouverte d'une porte à arc segmentaire fortement chanfreinée. Dans le mur-pignon sud, au rez-de-chaussée, se trouve une cheminée, dont les piédroits sont également dotés de profonds chanfreins et surmontés de deux corbeaux finement ornés d'une moulure torsadée. La mise en œuvre des murs, faits de petits moellons non équarris, et la hauteur de la charpente, à fermes et à pannes reposant sur des embrèvements, corroborent cette datation ancienne.

XVIIe siècle

En 1635, l'ensemble des 9 chefs de feu de la Bouchardière rend aveu au seigneur du Bois-Thibault. Leur déclaration est réunie dans un même ensemble de feuillet, qui permet d'avoir une vision globale du village à cette époque. La précision de ce document a permis de localiser de manière assez précise l'ensemble des édifices cités. Plusieurs points peuvent être tirés de son analyse. Tout d'abord, l'ensemble des édifices actuellement en élévation à l'est de la route devaient déjà exister en 1635, sous des formes plus ou moins similaires. Une "maison-étable" et une chambre haute sur une cave n'ont pu être situées : le village du début du XVIIe siècle était sans doute légèrement plus étendu que le hameau actuel. Ainsi, en 1635, la Bouchardière comprenait 4 maisons à cheminée, 1 maison-étable, 1 emplacement de maison, 3 chambres comprenant cave et grenier, 1 cellier, 3 petites maisons à cheminées servant d'étables, 1 grange-étable et 2 granges. La localisation de la plupart de ces éléments a permis de mettre en évidence l'importante division des alignements entre les différents propriétaires. Le schéma de la ferme-bloc, relevé pour certains écarts avant le XVIIIe siècle (La Guiberdière de Rennes-en-Grenouilles, entre autres exemples) ne semble pas ici s'appliquer ou alors est à cette époque dépassé du fait du partage en lots lors des successions. L'aveu que rend Julien Boursin pour une cave, dont il ne possède pas l'étage supérieur (une chambre détenue par Françoise Penloup), montre que les édifices étaient non seulement partagés dans leur longueur, mais également dans leur hauteur.

Croiser ces sources écrites avec le bâti encore en élévation apporte de précieuses informations. De manière globale, une certaine pérennité dans les usages et dans le bâti est à noter, notamment en ce qui concerne l'alignement oriental et la partie est de l'ensemble nord. Concernant cette dernière, sont recensés en 1635 d'est en ouest une chambre et grenier sur cave, une maison à cheminée, couverte de tuile, et une grange. Ces trois entités existent encore aujourd'hui et comportent des éléments stylistiques pouvant être antérieurs à ces premières années du XVIIe siècle : dans la maison orientale, fondée sur une cave, la cheminée de la chambre haute, dont les piédroits comportent de profonds chanfreins et sont surmontés de corbeaux à deux ressauts, ainsi que sa charpente à embrèvements. Accolée à l'ouest se trouve une maison dont la cheminée comporte les mêmes caractéristiques, avec en plus un visage taillé dans le congé du corbeau de gauche. Le bâtiment situé à l'ouest de cette maison, couvert de tuile plate, présente encore les caractéristiques d'un bâtiment agricole. Il est donc vraisemblable que seules les ouvertures aient été refaites, certaines avec des matériaux de remploi anciens (encadrements de portes à chanfrein concave).

XVIIIe siècle

A la Bouchardière, le XVIIIe siècle ne semble pas être une période d'expansion. Les aveux de cette période se situent dans la continuité de ceux rendus en 1635. Seules quelques ouvertures semblent avoir été modifié, comme le linteau en granit gris à arc segmentaire de la cave est de l'alignement nord.

XIXe et XXe siècle

On ne compte pas plus d'habitants au XIXe siècle qu'aux siècles précédents. Les recensements de population dénombrent en 1841 7 foyers et 21 habitants ; en 1861 7 foyers et 28 habitants ; en 1881 5 foyers et 11 habitants ; en 1901 5 foyers et 14 habitants et en 1936 3 foyers et 7 personnes.

Les matrices cadastrales rapportent une nouvelle construction en 1839 (alignement ouest, maison sud) : il semble en fait s'agir de la rénovation d'une maison à chambre haute et cave en soubassement déjà mentionnée en 1635. Si le plan et l'organisation demeure la même, l'encadrement de ses baies, en belles pierres de granit, sont refaites en cette première moitié du XIXe siècle.

La partie occidentale de l'ensemble nord est reconstruite en 1871. Elle se détache par sa profondeur de l'alignement. Cette maison est ensuite fortement restaurée dans la 2e moitié du XXe siècle. Le village ne connaît pas d'expansion marquante après la révolution. Les constructions d'une remise en pan de bois, dotée d'une porte chartière, et d'une maison à l'ouest de la route, après la Seconde Guerre mondiale, doivent néanmoins être relevées.

Synthèse

Le village de la Bouchardière conserve aujourd'hui dans les grandes lignes l'aspect qu'il revêtait déjà au XVIIe siècle, époque où la population était nombreuse : les maisons à chambre haute fondée sur cave existaient déjà à cette époque et on ne note pas de différence fondamentale dans la répartition des dépendances agricoles et des logis, intégrés au sein de mêmes alignements. 3 cheminées et 2 charpentes pouvant dater d'entre la fin du XVe siècle et le début du XVIIe siècle demeurent à l'intérieur des alignements nord et est. L'alignement oriental semble être le plus ancien.

  • Période(s)
    • Principale : 15e siècle , daté par source
    • Principale : 16e siècle , daté par source
    • Principale : 17e siècle , daté par source
    • Principale : 18e siècle
    • Principale : 19e siècle

Le village de la Bouchardière se trouve dans la commune de Thuboeuf, à proximité du petit ruisseau de Corberie.

Forme et organisation de l'écart

Le village est formé d'un seul noyau d'habitations. Les trois bâtiments principaux sont répartis autour d'une cour centrale. Chacun constitue un alignement de logis et de dépendances agricoles, répartis de manière aléatoire sous le même faite. L'un est orienté vers l'est, tournant le dos à la route, l'autre vers le sud et le troisième vers l'ouest, bien qu'il dispose d'ouvertures vers l'est. Ce dernier est le plus important par sa hauteur. Au sud se trouve une remise en pan de bois et à l'ouest, de l'autre côté de la route, une maison individuelle.

Bâti de l'écart

Les édifices du village sont construits en petit moellon de grès schisteux local (dénommé pierre d'argelette), non équarri, non assisé et sans chaînage d'angle. Les matériaux de couverture sont divers et peuvent varier sur un même édifice : ardoise, tuile plate, tôle.

Les alignements ouest et nord comportent à la fois des logis de plain-pied, des logis fondés sur une cave, accessibles par un escalier extérieur et des bâtiments agricoles à deux niveaux (fenil sur étable). L'unité agricole située au centre de l'alignement nord était constituée d'une grange accessible par une porte chartière, ensuite diminuée pour ajouter un niveau de fenil, et d'une petite étable ouverte d'une plus petite porte.

La lecture de l'alignement est, ancienne maison à laquelle étaient accolées des dépendances, est perturbée par sa transformation en bâtiment agricole. Ses linteaux à accolades et son ouverture à arc surbaissé donnant vers l'est, sa cheminée légèrement ouvragée et sa monumentale charpente lui confèrent un caractère élitaire. La petite fenêtre à chanfrein concave de la face orientale, dotée d'une menuiserie en forme de demi-croisée possiblement ancienne, laisse deviner que l'étage de cet édifice était habité. Les sablières de bois, sur lesquelles reposent la charpente, soulève la question de l'existence ancienne d'une structure à poteaux porteurs. Nulle trace n'en a été retrouvée.

  • Murs
    • grès moellon sans chaîne en pierre de taille
  • Toits
    ardoise, tuile plate, tôle nervurée
  • Couvertures
  • Escaliers
    • escalier de distribution extérieur
  • Techniques
    • sculpture
  • Représentations
    • accolade, armoiries, animal, laurier, couronne
  • Précision représentations

    Sur l'alignement oriental se trouvent deux linteaux de porte à accolade et armoiries : l'un portant une couronne, l'autre un animal difficilement identifiable (singe ?), une couronne et une branche de laurier.

    Le congés d'une des cheminées est sculpté en forme de visage humain (alignement nord).

  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne privée

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 2850/5. Feuille B2 du cadastre napoléonien, 1813.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 1024. Etat de section du cadastre napoléonien, Thuboeuf, 1813.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 6 M 443. Recensement de la population de Thuboeuf, 1861-1891.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 2 J 320. Chartrier de la seigneurie du Bois-Thibault, fief de la Bouchardière.

Date(s) d'enquête : 2018; Date(s) de rédaction : 2020
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Seure Marion
Seure Marion

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