Dossier d’œuvre architecture IA53004337 | Réalisé par
Seure Marion (Contributeur)
Seure Marion

Chercheuse au pôle Inventaire du service du Patrimoine de la Région Pays de la Loire.

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  • inventaire topographique, Canton de Lassay-les-Châteaux
Hameau de la Beslinière
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Ancien canton de Lassay-les-Châteaux - Lassay-les-Châteaux
  • Commune Sainte-Marie-du-Bois
  • Lieu-dit la Beslinière
  • Adresse
  • Cadastre
  • Dénominations
    écart

Le village de la Beslinière constitue un exemple exceptionnel pour comprendre l'évolution de l'architecture rurale du territoire de Lassay en raison de la richesse du fonds documentaire le concernant. En effet, si le chartrier du Bois-Thibault renferme des dossiers sur de nombreux écarts, peu sont aussi denses et anciens que celui de la Beslinière. Son statut de petite seigneurie n'a pas été avéré malgré la présence d'une maison d'apparence noble.

Les modifications apportées au village au XIXe et XXe siècles sont marginales. Le bâti ancien a été adapté par la modification de certaines ouvertures, la reconstruction de granges-étables indépendantes et, plus récemment, la destruction de maisons inhabitées gênant les la circulation. Ainsi, des éléments architecturaux anciens ont pu être retrouvés à l'intérieur des édifices.

De la première mention textuelle de la Beslinière, en 1440, jusqu'à la Révolution, ce fief dépendait directement de la seigneurie de Bois-Thibault. Il était parfois également nommé "Montoyer de la Beslinière". Ce toponyme dérive sans doute du patronyme "Belard", puisque, en 1485, un dénommé "feu Michel Belard" est cité.

Paysage, activités et organisation

Le village se trouve à environ 200 mètres d'un ruisseau appelé le "ruisseau du vieil étang". Il semblerait que ce vieil étang se trouvât au nord du village de la Beslinière et à l'est de celui de la Vieille Pellière, si l'on interprète la parcelle C 852 du cadastre ancien comme sa trace fossile. Il n'est pas représenté sur la carte de Cassini et est déjà nommé "vieil étang" dans un texte de 1771, ce qui suggère son état d'abandon. Au milieu du XVe siècle, deux champs clos sont mentionnés dans les aveux des habitants de la Beslinière au seigneur du Bois-Thibault : le "clos de sur les rues" (1451, appartenant à Colin Trople) et le "cloux nommé la Broce, tant bois que terre arable" (1440, appartenant à Lucas Fouquault). Le nom des parcelles a perduré jusqu'à la constitution de l'état de section du cadastre (1825), permettant de les localiser à l'ouest du village. Au milieu du XVe siècle, ces "clos" étaient bordés du "bois de l'essart". Une chênaie peut être située au nord du village. Toutes ces informations offertes par les textes médiévaux brossent le portrait d'un paysage majoritairement inculte. Les descriptions postérieures, et notamment celles des XVIIe et XVIIIe siècle, mentionnent des jardins en plus grand nombre, dont la fonction est spécifiée : à choux et poiriers, ou à lin et chanvre. Ils résultent d'une exploitation plus importante des abords du village, d'un recul de l'inculte et sans doute du morcellement de parcelles. Par exemple, ce qui à l'origine devait être une unique chênaie est transformée en un jardin à lin et à chanvre, nommé "le jardin de la chesnaie", au XVIIe siècle. Ce jardin apparait divisé en plusieurs parcelles sur le cadastre ancien (1813). L'image que celui-ci donne des abords du village de la Beslinière est celle d'une mosaïque de petits jardins autour des habitations, puis d'un deuxième cercle de terres et de prés.

A la fin du XVe siècle, et peut-être avant, les habitants de la Beslinière formaient une frérèche, c'est-à-dire une communauté solidaire de la taxe seigneuriale. Depuis cette date, et de manière récurrente jusqu'au milieu du XVIe siècle, lorsqu'un sujet rendait hommage pour une maison, l'ensemble du village était cité en fin d'aveu. Dans les documents du XVIIe siècle, ces listes de noms laissent place à l'évocation des droits détenus collectivement, à l'instar de Mathurin Bignon, qui en 1678, en plus de sa maison manable, son four, sa portion de pré, dispose de "communes franchise et liberté, avec droict aux craiers (?) dousves et fontaines dudict lieu et droict aux landes et boyes despendanct duct fief". Sur l'état de section du cadastre napoléonien (1825), il n'est pas fait mention de biens détenus collectivement.

En 1846, 62 personnes sont recensées à la Beslinière, réparties en 17 ménages : 7 cultivateurs, 1 sabotier, 1 journalier, 1 maçon et 2 fileuses (seules les professions des chefs de feu sont indiquées). Le nombre d'habitants chute d'une dizaine de personnes environ chaque décennie, jusqu'à atteindre 18 individus en 1921. Le petit artisanat diminue en même temps que la population : en 1921, tous les chefs de feu sont cultivateurs.

Phasage chronologique et évolution de l'architecture

Le XVe siècle

Du fait de la bonne conservation du chartrier du Bois-Thibault, un certain nombre de documents du XVe siècle concernant la Beslinière sont encore consultables. Il n'est pas assuré que l'intégralité du village ait toujours dépendu de cette seigneurie, mais le cas échéant, ces textes livrent des images assez précises de la structure de l'écart à cette époque. Au cours de la seconde moitié du XVe siècle, il était composé de 2 maisons. En 1440, l'une appartenait à Lucas Fouquault. Elle est ainsi décrite : "une maison assise sur estaiches", c'est-à-dire sur poteaux de bois. Des précisions sont apportées sur ce qui semble être la même maison en 1453, puis en 1462 : elle se composait de 4 estaiches (3 travées) et était couverte de chaume. S'il apparaît de prime abord périlleux d'envisager sa conservation dans le temps et a fortiori de la localiser, la découverte de poteaux de bois, inclus dans la maçonnerie, et d'une charpente ancienne dans la partie sud de l'ensemble situé parcelle ZC 66 permet d'émettre l'hypothèse de sa préservation sous forme de vestiges. Cette hypothèse est également permise par la promiscuité entre cette maison et les parcelles nommées "La Brosse" sur le cadastre ancien, microtoponymie qui renvoie peut-être au clos du XVe siècle alors lié à l'édifice. Le deuxième ensemble appartenait à Colin Trople en 1451 ; il est simplement décrit comme une place de maison.

Le XVIe siècle

Un autre ensemble non localisable apparaît dans la documentation du début du XVIe siècle (1515) : 2 parties d'une maison à cheminée avec pressoir, couverte en tuile, appartenant aux frères Vieilpeau ; il est possible que ce même ensemble, agrandi, soit mentionné en 1602 comme appartenant à Jehan Vieilpeau : "3 maisons couvertes de thuille, appartenant à Jehan Vieilpeau, avec jardins à chanvre, à lin, à poires et à choux".

Du XVIe siècle peut sans doute dater la maison aux armoiries (ZC 09). Le décor de ses linteaux et ses deux imposantes cheminées, au rez-de-chaussée comme à l'étage, la rapprochent stylistiquement d'une demeure noble, sans que ce statut ne puisse être démontré.

Le XVIIe siècle

Une synthèse rédigée au XVIIIe siècle regroupe les titres des différents propriétaires. S'ils sont inlocalisables, du moins nous permettent-ils de nous figurer l'architecture et la densité de l'écart. Si la liste des édifices est exhaustive, la Beslinière comportait au XVIIe siècle 3 maisons :

- une couverte d'ardoise avec cellier au bout, un four et fournil couverts de bardeaux devant (appartient à Mathurin Bignon en 1678)

- une deuxième dont dépend un cellier, un four et un pressoir (appartient à Jacques Lambert en 1679)

- une troisième, autrefois étable, couverte de tuiles, et un four

Il est intéressant de noter que chacune de ces maisons dispose de son four à pain. L'ardoise comme la tuile les couvraient. Les dépendances autres que les celliers ne sont pas mentionnées ici.

La maison de la parcelle ZC 09 (1 la Beslinière), servant aujourd'hui de poulailler, pourrait dater du XVIIe (ou lui être légèrement antérieure) : sa cheminée à corbeaux composés de deux ressauts et amortis par des congés sculptés de têtes humaines, ses chanfreins profonds, ses niches latérales, sa grosse et ses solives sont autant d'éléments qui vont dans ce sens. Ce n'est plus que le vestige d'un ensemble qui comprenait en 1811 à l'ouest une autre maison et à l'est un bâtiment agricole.

Le XVIIIe siècle

Entre les années 1670 et 1770, il semblerait qu'une division des parcelles et des propriétés ait été effectuée, aboutissant au fort morcellement perceptible sur le cadastre ancien. Alors qu'en 1678, Mathurin Bignon possède une maison manable, avec un cellier, four et fournil, ainsi que "le jardin de la chesnaie à faire lin et chanvre" (2 journaux), son descendant Jacques Bignon n'a plus qu'une place de four et la moitié du jardin de la chesnaie (25 perches). En 1724, François Dujarrié, tisserand qui demeure à Thuboeuf, possède la maison suivante : « une maison avec une grange, étable et partie de pressoir ou est le mettage au bout de la ditte étable, le tout sous même faîte avec les etrayes et vergers des deux cotes, et d'un bout ou est un four sans hayes, ni fossés, joignant le tour du pressoir ». On a là l'image d'un alignement conséquent, qui réunit dans un même édifice l'ensemble des dépendances d'une ferme. Le pressoir se trouve au bout du tout, accolé à la grange. Seuls le four et le gadage sont séparés.

La maison de la parcelle ZD 07 (4 la Beslinière) pourrait être une construction du XVIIIe, si l'on se base sur le rapport de proportion entre les murs et la couverture, ainsi que sur la forme de la charpente. De même, la grange-étable de la parcelle ZC 14 pourrait dater de la fin de ce siècle : sa maçonnerie de moellon non chaîné, ses linteaux de bois et sa présence sur le cadastre ancien vont dans ce sens.

Le XIXe siècle

Si la description de 1724 laisse supposer une certaine cohérence dans les alignements (un bâtiment appartenant à un même propriétaire et regroupant plusieurs fonctions), l'analyse du cadastre ancien et de l'état de section font voler en éclat ce constat pour le début du XIXe siècle : un même alignement est divisé en plusieurs parcelles, appartenant à des propriétaires différents (voir plan). Les fonctions peuvent être mixtes au sein d'un même ensemble, même si celle de maison est majoritaire.

Il n'y a eu que peu de modifications du tissu bâti au XIXe siècle : les édifices actuels apparaissent déjà sur le cadastre ancien. Certaines maisons ont été démolies à la fin du XIXe siècle, comme celles situées sur la parcelle ZD 08. Les maisons des parcelles ZD 11, 12 et 69 (situées parallèlement et au sud de la route), sans doute construites ou fortement modifiées (toiture, cheminée, ouvertures) vers la fin du XVIIIe siècle ou au début du XIXe siècle, semblent également avoir connu une phase d'abandon à la fin du XIXe siècle (l'une est démolie en 1874, deux sont déclarées en ruines dans les années 1880, selon les matrices cadastrales). C'est sans doute à cette époque que la partie orientale de cet alignement est remplacée par une haute remise étable indépendante.

Synthèse

Si l'on en croit les textes de la fin du Moyen-Âge, le village comportait deux maisons dont au moins une construite de bois. De nouveaux ensembles réunissant maison et dépendances sont construits au cours des siècles suivants. Lorsque la population diminue à la fin du XIXe siècle, certaines maisons sont abandonnées et transformées en bâtiments agricoles.

Alors que les descriptions du XVe et du XVIe siècle ne mentionnent pas les dépendances, celles du XVIIe et XVIIIe siècle décrivent des blocs réunissant maison et cellier, parfois aussi four et pressoir. Ces alignements importants sont encore perceptibles sur le cadastre du début du XIXe siècle, ainsi que dans le bâti actuel, bien que les fonctions originelles aient été modifiées.

  • Période(s)
    • Principale : 15e siècle
    • Principale : 16e siècle
    • Principale : 17e siècle
    • Principale : 18e siècle
    • Secondaire : 19e siècle
    • Principale : 20e siècle

La Beslinière se trouve à environ 200 mètres d’un ruisseau aujourd’hui appelé le « ruisseau du vieil étang », séparant les actuelles communes de Sainte-Marie-du-Bois et de Rennes-en-Grenouilles.

Forme et organisation de l'écart

Le bâti de l'écart est concentré le long d'un axe est-ouest, reliant la route départementale 216 à la route départementale 243. La structure des chemins a été simplifiée par rapport au plan du cadastre napoléonien sans être fondamentalement différente. Les deux habitations et le bâtiment agricole qui se trouvaient à l'écart de cet ensemble en 1813 ont disparu. L'ensemble des alignements qui comprenaient des maisons étaient orientés est-ouest et ouverts vers le sud, à l'exception de l'édifice portant des armoiries et conservant des poteaux de bois.

Bâti de l'écart

On dénombre aujourd'hui 2 maisons indépendantes (mais dont une faisait partie d'un ensemble plus large raccourci), 3 maisons accolées à des dépendances, 2 étables-granges, une remise, 2 fournils. Cela représente une notable diminution du nombre de maisons par rapport à 1813 : sur 26 parcelles bâties, on compte 15 maisons, 9 bâtiments, 1 fournil et 1 étable.

Tous les édifices sont construits en moellon de grès schisteux, matériau présent dans le sous-sol de cette partie du territoire. Les pierres sont plus ou moins gréseuses ou schisteuses en fonction des édifices.

Les maisons ne comportent pas d'étage carré à l'exception de la maison à armoiries. Les granges-étables indépendantes, aux murs hauts et comportant des linteaux en bois, sont d'un volume similaire.

  • Murs
    • grès moellon
    • schiste moellon
  • Toits
    ardoise, tôle ondulée
  • Techniques
    • sculpture
  • Représentations
    • portrait
  • Précision représentations

    Présence de corbeaux de cheminée anthropomorphes.

Image non consultable

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Mayenne ; 6 M 404. Recensement de la population de Sainte-Marie-du-Bois, 1846.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 708. Matrices cadastrales de la commune de Sainte-Marie-du-Bois.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 996. État de section de la commune de Sainte-Marie-du-Bois, 1825-1835.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 2 J 139. Chartrier de la seigneurie de Bois-Thibault, fief de la Beslinière.

Date(s) d'enquête : 2018; Date(s) de rédaction : 2020
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Seure Marion
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