Dossier d’œuvre architecture IA44008970 | Réalisé par
Plotard Rémi (Contributeur)
Plotard Rémi

Chargé de mission Inventaire - Syndicat mixte du SCoT et du Pays du Vignoble Nantais

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  • enquête thématique départementale, Pays du vignoble nantais
Établissement vinicole de négociant, établissements Bahuaud, puis Drouet Frères, puis Ackerman
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Pays du vignoble nantais
  • Hydrographies
  • Commune La Chapelle-Heulin
  • Adresse 4 rue de la Loge
  • Cadastre 2022 AI 335  ; 2022 AI 494  ; 2022 AI 495  ; 2022 AI 565  ; 2022 AL 79
  • Précisions
  • Dénominations
    établissement vinicole
  • Genre
    de négociant
  • Appellations
    Établissements Bahuaud, puis Drouet Frères, puis Ackerman
  • Parties constituantes non étudiées
    salle des machines

L'établissement vinicole situé rue de la Loge trouve son origine dans la fondation d'un négoce par Donatien Bahuaud. Alors qu'il exerçait son métier de tonnelier pour le compte de Ferdinand Baud (négociant à la Haie-Fouassière), il décide de se mettre à son compte et prend une carte de négociant. Il débute l'activité dans sa propre cave, à la Chapelle-Heulin. Son affaire prenant de l'ampleur, il fait construire, en 1942 les premiers bâtiments abritant cuves et bureaux. L'entreprise se situe alors nettement en dehors du bourg, comme le montre une vue aérienne prise en 1945. En cela le négoce Bahuaud s'inscrit dans la tendance à l'installation hors des bourgs de ce type de commerce : sa situation est comparable à celle des établissements Martin-Jarry à Divatte-sur-Loire ou Toublanc-Giraud à la Haie-Fouassière. Les activités menées par Donatien Bahuaud durant l'Occupation l'amène à être inquiété au lendemain de la Libération.

Après-guerre l'emprise du bâti ne cesse de s'accroître : de 1950 à 2012 chaque décennie voit la construction d'un ou plusieurs bâtiments. La capacité de stockage des chais Bahuaud s'accroît pareillement. Bien qu'il soit difficile d'estimer cette croissance en hectolitre, la surface occupée par de la cuverie passe d'environ 6 à 700 m² dans la décennie 1940 à plus de 2000 m² au début de la décennie 2010. En 1999 la capacité de stockage est de 40 000 hectolitres. La cuverie est tant aérienne (ciment verré, couvert en grès ou d'époxy, cuves inox) qu'enterrée. Cette capacité de stockage garantie au négoce de pouvoir fournir les quantités de vins nécessaires à une importante clientèle surtout composée de CHR et d'importateurs étrangers.

Une offre de transport est lancée en 1965. La naissance des transports Bahuaud correspond à un essor des sociétés de transport dans le vignoble (transports Barré, Moret-Paquier, Charpentier). En parallèle, il s'agit de l'un des rares négoces qui semble avoir fait un usage important du train : en 1973 un train complet de wagons citernes, remplis de muscadet et de gros-plant, part pour Budapest. Les vins sont alors destinés à être transformés en mousseux. Des trains partent également pour l'Allemagne de l'est. Une branche export est créée au sein de l'entreprise : elle expédie notamment vers la Belgique, l'Angleterre, le Canada, les États-Unis, le Japon.

Indépendante pour transporter son vin, l'entreprise Bahuaud l'est aussi pour sa mise en bouteille : elle se dote ainsi de ses propres groupes d'embouteillages dans les années 1960. La plupart des activités sont internalisées. D'après Lucien Rapp, ancien responsable d'exploitation du site, on compte jusqu'à une centaine d'employés dans l'entreprise : un tonnelier, des chauffeurs, de nombreux artisans, en plus des employés de chai et de bureau. La société fait également appel à des entreprises locales : l'entreprise Hervouët de Clisson pour la charpente métallique de certains hangars ; l'entreprise Simon de Vallet pour la fourniture de camion citernes en plastique armé ; l'imprimerie Galard de Vallet pour l'impression d'étiquettes ; des cartonneries de Clisson ou Mortagne-sur-Sèvre ; la société Moreau TMS pour ses cuves inox, etc. Elle gère durant un temps le cycle de vie de ses bouteilles, grâce à des laveuses : ce lavage cesse néanmoins relativement tôt sur chez Bahuaud, en raison de la réduction du poids des bouteilles (plus fragiles) et de la difficulté à retirer les étiquettes autocollantes. La société travaille alors à verre perdu.

Sur le plan de l'image, la société impose le prénom de son fondateur comme une marque : "Dites bien Donatien !" devient rapidement un slogan pour l'entreprise ; en 1984, une cuvée, le "Master de Donatien", voit le jour, hommage posthume au fondateur (décédé en 1978) et avant-garde qualitative des muscadets Bahuaud. Donatien Bahuaud se fait également remarquer pour ses campagnes publicitaires ambitieuses ainsi que ses sponsoring (course automobile et à la voile). Le musée d'histoire de Nantes conserve ainsi une collection d'objets publicitaires, dont certains sont la création de l'artiste Jorj Morin. L'acquisition du château de la Cassemichère, en 1957, s'inscrit dans la construction d'une image de marque et permet à la société Bahuaud de proposer sa propre production viticole. Donatien Bahuaud en fait le siège des "Gastronomes de la mer", une confrérie vineuse qu'il a contribué à fonder en 1966.

Du fait de sa taille, de la robustesse de ses marchés à l'export et de l'internalisation de nombreuses compétences, la société Bahuaud parvient à traverser la crise du début des années 1990 (épisodes de gel, fluctuation des prix et pertes de débouchés pour le muscadet) et poursuit son développement : nouveau laboratoire et agrandissement de la cuverie témoignent d'une vision optimiste de l'avenir de l'entreprise. La société connaît pourtant de nombreuses turbulences dans les années 2000 : de 2001 à 2003 une tentative de rapprochement avec le négociant Pierre Chainier (Amboise) échoue ; les établissements Bahuaud sont alors cédés, en 2004, au négociant rhodanien Gabriel Meffre ; placée en redressement judiciaire en 2006, la maison Bahuaud passe entre les mains de la société saumuroise Ackerman en 2009. Le site de production est vendu à Drouet Frères en 2007 puis est récupéré par Ackerman à partir de 2016.

La production cesse définitivement en 2022, après 80 ans d'activité.

  • Période(s)
    • Principale : milieu 20e siècle
    • Secondaire : 2e moitié 20e siècle
  • Dates

La description qui suit s'applique au site tel qu'il a été vu lors d'une visite menée en octobre 2021, alors qu'il était encore en activité. La production y a définitivement cessé en 2022.

Description générale du site

Le site de négoce rue de la Loge se compose d'un ensemble de bâtiments d'un seul tenant, dont la construction s'est échelonnée entre les années 1940 et 2000.

À l'est, l'ensemble bâti s'organise autour d'une vaste cour utile à la circulation, au chargement et déchargement ainsi qu'au parcage des camions et camions-citernes. Cette cour donne accès aux bâtiments de bureaux, aux hangars de stockage les plus récents, ainsi qu'à un petit bâtiment abritant des générateurs et des cuves de fioul (ces générateurs permettent au site de faire face aux coupures de courant imposées par le fournisseur). Elle est également bordée par le quai primitif, qui est ponctué de trappes permettant un déchargement direct des vins dans des cuves souterraines.

À l'ouest, des quais supplémentaires ainsi que des espaces de stockage en plein air sont dédiés aux matières sèches (ensemble des fournitures utiles à la production : bouteilles, étiquettes, bouchons, capsules, cartons, etc).

Secteur est

À l'est, l'aile la plus ancienne de l'ensemble se compose d'une première partie de plain-pied. On y trouve le bureau "historique" de Donatien Bahuaud, en demi-hexagone donnant à la fois sur la rue de la Loge et sur la cour. Bureaux et salles d'archives occupent le reste de l'espace. L'une des pièces, reconvertie en stockage, abrite un puit, dont l'usage a été abandonné à la suite d'un conflit d'usage avec le voisinage.

La seconde partie de cette section voit, à l'étage, s'aligner des bureaux dont les fenêtres donnent sur la cour. Cet alignement de bureaux évoque les prémices du travail en plateaux ouverts ("open space", non photographiés lors de la visite).  On y trouve les bureaux dédiés à la prospection et aux expéditions, où se répartissaient une équipe "internationale" et une équipe "France".

Au rez-de-chaussée de cette section, après les bureaux on accède à une salle de dégustation abritant de premières cuves. Cette pièce possède un éclairage sommital assuré par des blocs de verre pavant le couloir de l'étage supérieur. La pièce ouvre sur les principaux organes de circulation du site, permettant de rejoindre directement les entrepôts au nord (via la zone de cuverie) ou bien les espaces de production et de stockage de matière sèche, à l'ouest.

En remontant vers le nord depuis les bureaux, les zones de cuverie, construites entre 1940 et 1990, sont carrelées en opus incertum coloré. Il s'agit autant d'une cuverie aérienne qu'enterrée ou semi-enterrée. Quelques cuves sont encore verrées et dégradées ; l'intérieur des autres cuves a été couvert d'époxy, leur permettant de rester en usage jusqu'à la fermeture du site. On trouve, dans cette section, plusieurs escaliers descendant vers des couloirs de service dédiés à l'entretien des cuves semi-enterrées. Des trappes sont visibles dans les couloirs et donnent sur d'importantes cuves enterrées, d'une contenance moyenne de 700 hectolitres.

Le couloir en direction des espaces de production dessert une zone occupée par des cuves modernes en inox reposant sur des semelles en béton. Les carreaux au sol dessinent les initiales "DB", pour Donatien Bahuaud.

Secteur nord

Le nord de l'ensemble bâti est divisé en cinq zones de hangars. Les plus anciens, au débouché de la cuverie, date des années 1950 environ. Ils sont couverts d'une charpente de béton mâchefer. Des fûts y étaient stockés, ainsi que des produits dits "semi-finis".

Les autres hangars abritent pour l'essentiel des cartons et palettes en attente d'expédition. Ils sont construits dans les décennies suivantes. Les charpentes métalliques, datant des années 1980, sont l'œuvre de l'entreprise de métallerie Hervouët, située à Clisson. Le hangar le plus récent date de 2011. L'accès à la cour se fait par une porte à lanière souples ainsi que par deux quais munis de sas.

Secteur ouest

Les hangars permettent un accès aisé aux espaces de production, situés en partie ouest du site. Il s'agit principalement d'un vaste hall dédié à la mise en bouteille, à l'étiquetage et au conditionnement des bouteilles. Des lignes de production semi-automatisées occupent une grande part de la zone. Au sud du hall des espaces sont dédiés à la réception des matières sèches, ainsi qu'au lavage des bouteilles vides (bien que le lavage ait été abandonné depuis plusieurs décennies la laveuse était encore en place lors de la visite).

Les bouteilles vides sont acheminées dans le hall par son extrémité sud. Leur remplissage a lieu dans un espace cloisonné par des baies en verre : une "salle de tirage", sous air filtré, dont l'objectif est de réduire au maximum les risques de corps étrangers dans le vin. Les bouteilles poursuivent ensuite leur cheminement pour être bouchées, puis sont stockées sans forcément être immédiatement étiquetées. Un vaste espace de stockage des bouteilles pleines délimite ainsi l'extrémité ouest de l'ensemble bâti.

Secteur sud

Le bâti au sud du site est un ensemble d'habitation dont le rachat et la transformation par la société Bahuaud ont permis de créer plusieurs nouveaux espaces. Ceux-ci s'organisent autour d'une cour donnant directement sur la rue de la Loge.

Parmi les espaces les plus remarquables, citons la salle de réunion, qui occupe toute la hauteur d'une maison – dont l'empreinte de la cheminée et la charpente à l'entrait brut ont été conservés ; également le laboratoire, dont l'habillage a été réalisé par un artisan local. Cette installation dans ces bâtiments venait en complément d'un laboratoire de plus petite dimension, qui est encore en place à proximité.

Extérieurs sud et ouest

Les extérieurs se composent essentiellement de zones de stockage de matières premières. Trois quais munis de sas permettent l'accès aux marchandises par l'ouest. Au sud s'alignent un nombre important de cuves en inox, originellement installées sur un site de production à Ancenis, dont la plupart ont une contenance moyenne d'environ 350 hectolitres. Toutes reposent sur une semelle en béton d'épaisseur variable. Munies de serpentins refroidisseurs, elles présentent une capacité totale d'environ 30 000 hectolitres.

  • Murs
    • béton
    • métal
  • Toits
    tuile creuse, béton en couverture, métal en couverture
  • Étages
    2 étages carrés
  • Couvrements
    • charpente métallique apparente
    • charpente en béton armé apparente
  • Couvertures
  • État de conservation
    établissement industriel désaffecté, menacé
  • Techniques
  • Statut de la propriété
    propriété d'une société privée, Maison Ackerman, site en vente en 2022.
  • Éléments remarquables
    pavement

Sol carrelé (mosaïque), réalisé par une entreprise italienne dans les années 40. Les initiales DB pour Donatien Bahuaud, apparaissent au sol.

Documents d'archives

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 3 P 34/13. Matrices cadastrales de la Chapelle-Heulin, cases 131 et 132.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 21 U 735. Marques de fabrique.

Bibliographie

  • BOUILLE, Anne, BURKI, Réjane. Jorj Morin, l'œuvre publicitaire, éditions Herscher, 2010.

  • BOURGEON, Jean. Nantes et la Loire-Inférieure, 1940-1944, Vivre l'occupation. Coiffard Éditions, 2013.

  • GUETNY, Noël. Le château de la Cassemichère, Une histoire de Nantes et du vignoble nantais. Opéra Éditions, 2010.

Documents multimédia

  • Témoignage de Lucien RAPP, responsable transport puis d’exploitation, employé de 1972 à 2005.

  • Témoignage de Michel Bahuaud, négociant, fils de Donatien Bahuaud, négociant, recueilli le 23 mai 2022. (Musée du Vignoble Nantais du Pallet).

Date(s) d'enquête : 2021; Date(s) de rédaction : 2022
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
(c) Syndicat Mixte du SCoT et du Pays du Vignoble Nantais
Plotard Rémi
Plotard Rémi

Chargé de mission Inventaire - Syndicat mixte du SCoT et du Pays du Vignoble Nantais

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