• inventaire topographique, quartier Bas-Chantenay
Savonnerie Magra, 23 boulevard Chantenay
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bas-Chantenay - Nantes
  • Commune Nantes
  • Adresse 23 boulevard Chantenay
  • Cadastre IK 1 0  ; IK 3
  • Précisions anciennement commune de Chantenay
  • Dénominations
    savonnerie
  • Appellations
    Maison Bonet, Huteau & Housset Fils, puis Michaud, Bonnet et Lescop (Savonnerie), Huilerie et Savonnerie de la Loire, puis Magra (Société)

Émile Leblanc installe une huilerie, à la fin des années 1850, sur une parcelle située entre le canal de Chantenay et la Loire. Cette situation favorise l'acheminement des matières premières en bateau, depuis l'Afrique principalement ; elle permet également le rejet des eaux résiduelles de fabrication. La savonnerie porte ensuite le nom de Leblanc et Housset, puis Bonnet, Huteau et Housset fils, puis Huilerie et Savonnerie de la Loire. Le groupe Magra (Margarine Unie) rachète la savonnerie en 1926. En 1932, les savonneries Talvaud et Magra se regroupent de l'autre côté du boulevard de Chantenay, sur le site de Talvande, couvrant près de 2 hectares. Les bâtiments de la savonnerie, achetés par les Anciens Chantiers Dubigeon en 1938, servent ensuite de magasin et d'ateliers mécanique et électrique. Rachetés par le Cernat pour du stockage, puis par les chantiers de l'Esclain, ils sont, en 2012, occupés par des entreprises artisanales et libérales, et pour du stockage.

Spécificité nantaise  :

À Nantes, l'industrie savonnière s'implante fortement dans les années 1830, en bord de Sèvre ou de Loire. Cette industrie florissante est constituée d'une trentaine d'établissements, parmi lesquels Bonamy, Coninck et Cie, Serpette, Biette, Sarradin (depuis 1781), Bertin et Talvande. Elle développe un savoir-faire lui permettant de rivaliser avec l'industrie marseillaise. En imitant les procédés utilisés à Marseille, en recherchant des palliatifs et en utilisant la chimie et les énergies nouvelles, la savonnerie nantaise se développe en s'appuyant sur la fabrication de savon à partir d'huile de palme, de graines provenant des anciens comptoirs africains avec qui la cité ligérienne entretient des relations commerciales. L'utilisation de suif (graisse animale) est aussi très courante à Nantes. Fabricant de savons, le groupe britannique Lever (Unilever depuis 1929), l´un des quatre grands groupes internationaux de détergents avec Henkel, Procter et Gamble, Colgate-Pamolive, achète au début du XXe siècle les marques marseillaises. À Nantes en 1926, il achète Magra, puis Talvande et l'établissement Biette en 1948.

Activité de l'entreprise  :

Les états industriels nous renseignent sur l'activité de la Savonnerie de la Loire. À la fin de l'année 1882, la fabrique d'huile de savon emploie 25 ouvriers pour un salaire journalier de 3,5 francs ; en avril 1883, elle emploie 15 hommes et 2 garçons pour un travail journalier de 10 heures. Les salaires ont doublé en 25 ans, dans des proportions égales à l'évolution des prix des produits de première nécessité. A la fin du XIXe siècle, la production s'élève à 500 tonnes de savon par mois et l'usine emploie une trentaine d'employés. On trouve dans une savonnerie : des contremaîtres, des ouvriers spécialisés, des chefs d'équipe et un grand nombre d'ouvriers fabricants de savons et d'huile, travaillant au four à soude, mais également des menuisiers fabriquant des caisses d'emballage, des charretiers et des manœuvres. Les savons et huiles produits à Nantes s'appuient sur l'exploitation des huiles et graines grasses acheminées depuis l'Afrique et l'Océanie, notamment les graines de coton et les amandes de coprah. La préparation des lessives de soude caustique, l'émulsion des corps gras et de la base alcaline et le conditionnement constituent les trois grandes étapes de fabrication. L'usine Magra produit dans les années 1920 près de 6 000 tonnes de savon de ménage par an, soit un quart de la production nantaise, avec une centaine de salariés. Le savon marbré "l'Ancre" et le savon coloré "Le Pélican" sont ses produits les plus importants.

  • Période(s)
    • Principale : 3e quart 19e siècle
    • Principale : 2e quart 20e siècle
  • Dates
    • 1858, daté par source
    • 1920, daté par travaux historiques

Huilerie Leblanc (bâtiment A)  :

Sur les bases d'une huilerie plus ancienne, Émile Leblanc fait ériger un moulin à huile, achevé en 1858. Emmanuelle Dutertre, dans son ouvrage Savons et savonneries, le modèle nantais, remarque que "les restes d'une ancienne presse à huile, construite en fonte et encastrée dans les murs au premier étage du bâtiment, sont encore visibles aujourd'hui." La construction, formant un L, est réalisée en maçonnerie épaisse de moellons. Elle possède une structure intérieure en poteaux de fonte et une structure secondaire, sur certaines parties, en bois proposant des appuis intermédiaires aux planchers. Cette structure est parfois doublée de poutrelles métalliques. Les baies, formant des travées régulières, proposent plus de jour en rez-de-chaussée. De même que les chaînages d'angle, les encadrements de baies sont réalisés en brique. Les menuiseries en bois sont encore en grande partie en place en 2012. La charpente, en bois, est couverte d'ardoise formant croupes. Le pignon sud a très probablement été amputé d'une travée autour des années 1920, et détruit en partie pour l'installation d'une chaufferie, construite en structure métallique et remplissage de briques et parpaings agglomérés. Elle est intégrée comme magasin par les Anciens Chantiers Dubigeon en 1938.

Hall des chaudières (bâtiment B)  :

Ce bâtiment à structure métallique est reconstruit par les Établissements Joseph Paris dans les années 1920, sur la base d'un bâtiment plus ancien. Il s'élève sur 6 niveaux, sur un principe de charpente en acier riveté et remplissage de parpaings. Par gravité, la soude caustique contenue dans des cuves placées au dernier niveau se déverse dans les 5 chaudrons du 5ème étage, où le mélange est chauffé pour émulsion. La cuite de savon demande environ 4 jours. Puis, suivant le même principe de gravité, le savon liquide obtenu refroidit et durcit dans les mises du bâtiment de coulage, où il est ensuite découpé, estampillé puis préparé pour l'expédition.

Bâtiment de coulage et de frappage (bâtiment C), tour béton (bâtiment D)  :

Ce bâtiment est également construit par les Établissements Joseph Paris dans les années 1920. La structure est en grande partie métallique. Elle porte un système de fermettes métalliques formant des sheds couverts en tuiles mécaniques et panneaux de verre pour les pans orientés au nord. Il sert aujourd'hui d'entrepôt. Une tour béton est accolée au hall des chaudières et fait la liaison avec le bâtiment de coulage et de frappage.

Hall d'expédition (bâtiment E)  :

Monsieur Bernard, entrepreneur, réalise, après autorisation délivrée par la Ville en 1920, un bâtiment pour le compte de MM Bonnet et Lescop. Il s'agit d'un bâtiment en L formant alignement sur le boulevard de Chantenay et formant retour sur la limite ouest des terrains de la savonnerie. Il s'agit d'une extension du bâtiment de coulage et de frappage. La structure métallique est en remplissage de parpaings en façade, couverte sur des fermettes formant sheds en tuiles mécaniques et panneaux de verre pour les pans orientés au nord. Sur le boulevard de Chantenay, 21 trames régulières de 6,25 mètres, s'élèvent sur rez-de-chaussée et étage. À l'origine, la façade est dotée d'un large portail d'accès facilitant le chargement des transporteurs par un système de quai abrité sous porche ; la différence de niveau entre le boulevard et le plancher intérieur est de 75 cm environ.

Quais (en partie en place, bâtiment F) et bâtiments annexes (détruits)  :

Des bâtiments de remise, probablement destinés au stockage des matières premières, sont présents sur les plans anciens perpendiculaires au quai. Ils ont été détruits vers les années 1930, peut-être à la suite du rachat par les Anciens Chantiers Dubigeon.

  • Murs
    • métal
    • moellon
    • parpaing de béton
  • Toits
    tuile mécanique, tôle ondulée, ardoise, verre en couverture
  • Couvertures
    • toit à deux pans
    • shed
    • croupe
  • Statut de la propriété
    propriété d'une société privée

L'adaptation des bâtiments, que les Anciens Chantiers Dubigeon puis les entreprises en place ont réalisée pour la conduite de leurs activités, a permis de conserver dans un état relativement proche de son époque d'activité un grand nombre des structures de la savonnerie. Néanmoins, la partie la plus ancienne (huilerie Leblanc, hall des chaudières) menace ruine. Le partitionnement en bureaux des bâtiments du hall d'expédition et de stockage, sur le boulevard de Chantenay, bien que permettant la conservation par une mise hors d'eau hors d'air des structures, ne donne plus à comprendre les grands volumes originaux de la savonnerie. L'ensemble des bâtiments est inscrit sur la liste du patrimoine nantais du plan local d'urbanisme.

Documents d'archives

  • Archives municipales de Nantes. États de situation industrielle envoyés par le Maire de Chantenay de 1883.

Bibliographie

  • BARBIN, Céline. Les anciens chantiers Dubigeon de Chantenay (Nantes), in L'Archéologie industrielle en France , 2011.

  • DUTERTRE, Emmanuelle. Savons et savonneries : le modèle nantais Carnet d'usines, MeMo, 2005.

  • L'aventure industrielle en Loire-Inférieure. 1820-1930, Exposition proposée par les Archives départementales de Loire-Atlantique, du 23 octobre 2008 au 3 avril 2009.

Date(s) d'enquête : 2012; Date(s) de rédaction : 2012