Dossier d’œuvre architecture IA49010752 | Réalisé par
  • inventaire topographique, Fontevraud-l'Abbaye - Montsoreau
Ancien cimetière paroissial de Fontevraud-l'Abbaye (disparu), Fontevraud-l'Abbaye
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
  • (c) Archives départementales de Maine-et-Loire

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Fontevraud-l'Abbaye - Montsoreau - Saumur-Sud
  • Commune Fontevraud-l'Abbaye
  • Adresse allée Sainte-Catherine , place Saint-Michel , rue du 11 novembre 1918 , place du 8 mai 1945 , rue Robert-d'Arbrissel
  • Cadastre 1813 E1 28 à 58 ; 2011 F 1 à 20, 26 à 31, 33 à 39, 45 à 50, 52, 881, 882, 884, 888, 964 à 966, 977 à 981, 1008, 1010, 1011, 1022 à 1025

L'ancien cimetière de Fontevraud et les espaces, bâtis ou non, qui lui ont été substitués forment l'un des points les plus intéressants de l'urbanisme de la commune, voire les plus intrigants de l'histoire du village médiéval. D'une superficie très importante au regard de ce qu'était le bourg ancien, le cimetière constitua un secteur sanctuarisé aux abords mêmes de l'abbaye pendant les six ou sept premiers siècles de l'histoire du village de Fontevraud. Amputé très ponctuellement au XVIe et un peu plus largement au XVIIIe siècle, ce cimetière est transféré loin des habitations au début du XIXe siècle. Dans la première moitié du XIXe siècle, l'espace ainsi libéré voit se redessiner le centre du village qui prend son allure actuelle, avec les deux voies, si différentes entre elles, qui caractérise désormais le paysage de Fontevraud-l'Abbaye : la rue Robert d'Arbrissel et l'allée Sainte-Catherine. La chapelle funéraire Sainte-Catherine, seul témoin encore ostensible de la présence ancienne du cimetière, permet de lier intimement cet ensemble parcellaire à la fois à l'histoire du bourg et à celle de l'abbaye.

L'origine du cimetière (XIIe siècle

Il est difficile d'établir la date à laquelle fut délimité l'espace qui constitua l'ancien cimetière de Fontevraud. La présence d'un lieu d'inhumation au voisinage de l'abbaye est attestée très tôt au XIIe siècle et Baudri de Bourgueil mentionne que Robert d'Arbrissel avait formulé le voeu d'y être enterré ("in cemeterio Fontebraldensi meum cadaver inhumari jubeo"). Par ailleurs, le pape Calixte II consacre le cimetière lors de son passage à Fontevraud en 1119. Toutefois, il pourrait ne s'agir dans ces deux cas que d'un cimetière à usage des moines et moniales, propre à l'abbaye et situé aux abords mêmes de celle-ci. L'existence d'un cimetière destiné aux laïcs peut toutefois être envisagée comme étant survenue précocement, puisqu'en 1144, le pape Lucius II adresse à l'abbesse Pétronille de Chemillé un texte qui ordonne que quiconque, laïcs compris, puisse être enterré dans n'importe quel endroit de la clôture, y compris dans les bâtiments abbatiaux. Cette injonction pontificale prouve, de fait, que, dès la première moitié du XIIe siècle, les laïcs n'étaient a priori pas inhumés au même endroit que les religieuses et religieux de l'ordre de Fontevraud. Le détachement de la paroisse de Roiffé et l'établissement d'une paroisse à Fontevraud en 1177 est marqué par la construction d'une église paroissiale. La question se pose dès lors de savoir si l'église prit place dans ce qui était alors déjà le cimetière ou bien si l'édification de l'église s'accompagna de la délimitation d'un espace jusqu'alors vide et qui serait désormais consacré aux inhumations des paroissiens.

La seconde interrogation que suscite ce cimetière paroissial concerne sa superficie qui, avant le milieu du XVIe siècle, est de plus de deux hectares : à titre de comparaison, cela correspondait à cette date à deux fois la superficie du cimetière des Innocents, à Paris, pourtant connu pour son ampleur. Une telle étendue est-elle à mettre en relation avec un essor de l'abbaye qui aurait, au XIIe siècle été si spectaculaire que l'on pensa nécessaire un tel espace ? Ne faut-il y voir, plutôt, l'un des moyens utilisés, tant par l'abbaye que par l'évêché de Poitiers, en accord avec les directives pontificales du XIIe siècle, pour sanctuariser un vaste espace à proximité immédiate de l'abbaye, afin de limiter l'installation de laïcs trop près de celle-ci ?

Le cimetière et les Fontevristes (XIIIe-XVIIIe siècle)

Une histoire de ce cimetière peut être tissée à partir de quelques jalons. La chapelle funéraire Sainte-Catherine y est érigée avant 1209 par Alix de Bourbon, abbesse de 1208 à 1209. Divers textes évoquent la construction de maisons au voisinage du cimetière aux XIIIe et XIVe siècles. Un acte de 1478 atteste de l'existence, à cette date, d'un portail situé près de l'église Saint-Michel, qui clôt le cimetière et dont la grille est refaite en 1589 et qui, en 1749, est décrit comme composé d'une barrière et d'un tourniquet par lequel on passe pour aller à l'église. Toutefois, cette clôture ne fait pas pour autant du cimetière un lieu en retrait de la vie fontevriste et de nombreuses mentions montrent qu'il est sans cesse parcouru et utilisé par les habitants. Ainsi, au milieu du XVIe siècle, le conseil de fabrique de la paroisse tire profit de la vente de noyers, de l'herbe et des noix du cimetière, usages qui perdurent jusqu'au début du XIXe siècle. En 1539, puis en 1577, des Fontevristes reçoivent des amendes pour y avoir mené illégalement paître ses bêtes et en 1590 d'autres sont poursuivis pour avoir en démoli les barrières et murs. Les procureurs de la fabrique vont jusqu'à bailler des emplacements dans l'enceinte du cimetière pour qu'y travaillent des artisans ou pour servir de dépôts.

Les registres paroissiaux, qu'impose l'édit de Villers-Cotterêts en 1539 et qui sont conservés à Fontevraud à partir de l'année 1579, permettent pour les deux siècles qui suivent de mieux connaître l'organisation spatiale de ce cimetière. On distingue ainsi un carré des enfants, dit cimetière des Innocents ou Petit cimetière, d'un Grand cimetière où l'on trouve les sépultures des Fontevristes adultes avec des aires où se concentrent les tombes familiales ("apud parentes") et où l'on discerne une certaine hiérarchie sociale. Des espaces sont réservés aux inhumations des plus pauvres, voire aux fosses communes, et les non Fontevristes sont enterrés à l'écart. Ce cimetière paroissial n'est toutefois pas le seul lieu où l'on enterre les Fontevristes, puisque l'église Saint-Michel accueille les sépultures de quelques familles de notables comme, aux XVIIe et XVIIIe siècles, les Delamothe ou Delamotte dont plusieurs membres sont architectes et officiers de l'abbaye. On trouve aussi mention d'inhumations de laïcs et de clercs séculiers de la paroisse au sein même de la clôture abbatiale où se trouvent les lieux de sépulture des moines et moniales et notamment le cimetière que l'on voit sur les plans du XVIIIe siècle entre la Madeleine et le chevet de l'église abbatiale. Les mêmes registres paroissiaux témoignent, enfin, de ce que très exceptionnellement des inhumations purent se faire hors du cimetière. Ainsi, en mars-avril 1639, lorsque la peste qui frappe la paroisse est à son plus fort, les victimes qui décèdent trop loin du bourg ou qui ne trouvent pas de volontaires pour approcher trop longtemps les corps et les mener au cimetière sont ainsi enterrées près du lieu de leur décès ("in agro proximo [...] in agro circum jacente"), à la Haute-Ânerie, à Beaurepaire (qui servait alors de lieu de quarantaine) ou encore à la Vacherie.

Un cimetière progressivement réduit (XVIe-XVIIIe siècles)

La superficie du cimetière, qui était surdimensionnée au regard de la population paroissiale, est réduite à plusieurs reprises, au XVIe puis au XVIIIe siècle. En 1549, l'abbesse Louis de Bourbon obtient en effet du roi la création d'un marché hebdomadaire puis de deux foires annuelles à Fontevraud. Elle sollicite alors l'évêché de Poitiers, dont dépend la paroisse, et la permission lui est accordée par Messieurs les Grands vicaires de Poitiers, en datte du 18 juillet 1549 de prendre une partie du cimetière de la paroisse qui étoit vague et inutile pour y construire les halles, pour la commodité du marché et des foires. L'angle nord-est du cimetière est ainsi soustrait et accueille dès lors les halles, puis, plus tard, quelques maisons. En novembre 1709, l'abbesse Louise-Françoise de Rochechouart de Mortemart sollicite du pouvoir royal le rétablissement des foires, qu'elle obtient en janvier 1710. Afin de leur donner une pleine ampleur, elle demande que soit utilisée une partie du cimetière. En décembre 1711, l'évêque de Poitiers lui concède ainsi un bon tiers du cimetière, à l'ouest, pour y établir le champ de foire (dont une petite partie sera prélevée par la suite pour établir quelques jardins privatifs et élever des bâtisses), en contrepartie de quoi l'abbesse doit organiser le transfert des tombes et ossements qui s'y trouvent et rebâtir un mur de clôture occidental pour la portion qui demeure cimetière. En 1741, la fabrique de la paroisse obtient de l'évêché de Poitiers d'amputer encore le cimetière pour ériger des maisons, près des halles.

Au XVIIIe siècle, plusieurs documents (textes et plans) attestent de la présence d'une monumentale croix de cimetière, érigée dans la partie nord du cimetière (à l'emplacement des maisons aujourd'hui situées entre le 31 et le 37, rue Robert d'Arbrissel) ; cette croix, peut-être plus ancienne encore, fut probablement détruite entre la Révolution française et le transfert du cimetière.

Le transfert du cimetière et son allotissement (début du XIXe siècle)

En application du décret impérial du 23 prairial an XII (12 juin 1804) et de ses préoccupations hygiénistes, les autorités municipales de Fontevraud décident, dès 1807, d'abandonner l'ancien cimetière au coeur du bourg pour en établir un nouveau, à l'écart des habitations, ce que réclamait également des habitants de la commune.

Le Conseil municipal espère profiter des projets de réfection de la route Montsoreau-Loudun pour voir une modification de son tracé qui fasse passer la route par l'allée centrale de l'ancien cimetière afin de vendre comme lots à bâtir les parcelles qui la bordent de chaque côté et réaliser ainsi une forte plus-value. Ce projet est toutefois rejeté en 1812 par les services de voirie, qui privilégient l'ancien tracé de la Grande-rue (actuelle rue Robert-d'Arbrissel), mais envisagent favorablement qu'une petite voie soit tracée entre l'église et le champ de foire, de part et d'autre duquel pourront tout de même être bâties des maisons.

Le cimetière est divisé en deux portions le long de cette nouvelle promenade. Au nord, où aucune inhumation n'a été pratiquée depuis longtemps, les parcelles sont considérées comme prêtes à bâtir et sont donc évaluées plus cher. Au sud, où l'on enterre encore, les terrains ne pourront être constructibles, selon les termes du décret du 23 prairial An XII, que cinq ans après la dernière inhumation et après obtention d'une autorisation par décret préfectoral ; ils sont donc mis en vente à moitié prix. La chapelle Sainte-Catherine n'est pas mise en vente et demeure, alors, aux mains de la commune. Un cahier des charges est édicté pour les futurs acquéreurs, des lots qui règlent notamment l'usage de l'allée centrale et imposent d'enclore l'ensemble du terrain. La vente aux enchères est organisée le 18 juillet 1814, mais, peu fructueuse, elle est réorganisée le 1er août suivant et les derniers lots ne trouvent acquéreurs que lors d'une troisième vente publique, le 22 août 1814.

Il n'y eut pas de transfert d'ossements et de sépultures vers le nouveau cimetière, qui désormais installé à l'écart du bourg.

  • Période(s)
    • Principale : 12e siècle , (incertitude)
    • Principale : 1er quart 19e siècle
    • Secondaire : milieu 16e siècle
    • Secondaire : 1ère moitié 18e siècle
  • Dates
    • 1549, daté par source
    • 1711, daté par source
    • 1741, daté par source
    • 1814, daté par source
  • Auteur(s)

L'ancien cimetière de Fontevraud était situé au cœur du bourg, face à l'entrée de la clôture abbatiale, bordé par l'église Saint-Michel, l'ancienne route de Saumur (rue Robert d'Arbrissel) et le Clos Bourbon. Sa configuration initiale de n'est pas connue, mais au début du XVIe siècle, l'aire qu'il occupait était immense, formant une parcelle polygonale de 60 à 100m de côté par 230 à 260m de long, soit presque 2ha.

Il est légèrement amputée une première fois, d'à peine 1000m2, lors de la création des halles au milieu du XVIe siècle, puis bien plus largement au début du XVIIIe siècle, où on lui soustrait plus de 8000m2 pour y établir le champ de foire.

Cette emprise foncière ne se perçoit aujourd'hui qu'avec difficulté dans le parcellaire du bourg actuel, puisqu'il faut envisager un espace qui correspondait à la place du 8 mai 1945, y compris la caserne des pompiers et la Société des Tilleuls, à l'allée Sainte-Catherine et au jardin qui la borde au sud, ainsi qu'à la plupart des parcelles bâties sur le versant sud de la rue Robert d'Arbrissel, de la mairie à la place Bernard Triquier.

Néanmoins, quelques vestiges rappellent encore la présence ancienne de cette ancienne nécropole. Au premier rang de ceux-ci on note la chapelle Saine-Catherine, ancienne chapelle funéraire et lanterne des morts qui occupait une position relativement centrale dans ce cimetière. Le mur de clôture qui séparait le cimetière du Clos Bourbon s'élève encore sur toute la bordure sud du jardin public. Plus discret et aujourd'hui pris dans la maçonnerie du pignon nord de la maison du 2, rue du Logis Bourbon (parcelle F41 du cadastre de 2011), on peut encore observer le piédroit sud du portail qui fermait cette clôture, à l'est. Établi entre l'ancienne halle (disparue) et l'église Saint-Michel, ce portail commandait aussi l'accès à l'église. Enfin, ouverte à la circulation dès la vente par lots du cimetière, le tracé de l'allée Sainte-Catherine perpétue sans doute ce qui devait être une allée de l'ancienne nécropole.

Documents d'archives

  • AD Maine-et-Loires. 122 G 2. Clergé séculier. Église paroissiale Saint-Michel de Fontevraud : registre des titres et rentes dus à la fabrique (1750, continué jusqu'en 1836).

  • AD Maine-et-Loire. 101 H 39 Abbaye de Fontevraud. Église paroissiale Saint-Michel : service religieux, culte, affaires diverses, fabrique, réparation à la cure (1516-1770).

  • AD Maine-et-Loire. 101 H 53 Abbaye de Fontevraud. Foires et marchés ; diverses pièces relatives à la conversion de parties du cimetière en lieux de marché, halles et champ de foire (1548-1711).

  • AD Maine-et-Loire. 101 H 159. Abbaye de Fontevraud. LARDIER, Jean (dom). Volume septiesme, inventaire des titres de la Petite Recepte de Font-Evraud divisé en 3 cantons, etc., manuscrit, Fontevraud, 1658 (mis à jour jusqu'en 1756).

  • AD Maine-et-Loire. 101 H 160 Abbaye de Fontevraud. LARDIER, Jean (dom). Thrésor de l'ordre de Font-Evraud disposé en 3 volumes. Volume 1. Contenant l'inventaire des registres et extraits de conseil des abbesses pour les affaires qui regardent l'abbesse & le temporel de ladite abbaye par ordre alphabétique du temps de M. Jeanne Baptiste de Bourbon, XXXII. Abbesse, chef & générale dudit ordre, manuscrit, Fontevraud, 1649.

    Folios 372-373
  • AD Maine-et-Loire. O 560. Biens communaux : Fontevraud-l'Abbaye. Dossier "cimetière" : pièces diverses sur l'ancien cimetière (1807-1814).

  • AM Fontevraud-l'Abbaye. E 1 / 1 à 24. Etat civil. Registres paroissiaux : Baptêmes, Mariages, Sépultures (1579-1793).

  • AM Fontevraud-l'Abbaye. 1 N 5. Cimetière. Pièces relatives à l'ancien et au nouveau cimetière (1813-1833).

Bibliographie

  • BAUDRI DE BOURGUEIL. Vita B. Roberti de Arbrissello. In Patrologia latina, t. 162, éd. J.-P. Migne, Paris, 1854, col. 1043-1078.

  • MELOT, Michel. L'abbaye de Fontevrault, de sa réforme à nos jours, 1458-1963. Étude archéologique, thèse de l'École des Chartes, 2 volumes dactylographiés, 1967.

  • POULAIN, Jean. Un village à l'ombre d'une grande abbaye : Fontevraud. Comité d'histoire fontevriste, 1998, volume multigraphié.

Date(s) d'enquête : 2010; Date(s) de rédaction : 2010
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
(c) Conseil départemental de Maine-et-Loire - Conservation départementale du patrimoine