Dossier d’œuvre architecture IA85001867 | Réalisé par
Suire Yannis (Rédacteur)
Suire Yannis

Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée à partir de 2017.

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  • patrimoine industriel, Les carrières des Pays de la Loire
  • inventaire topographique, Vallée de la Sèvre Niortaise, Marais poitevin
Fours à chaux de Benet
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Les carrières des Pays de la Loire
  • Commune Benet
  • Lieu-dit Richebonne
  • Adresse impasse des Fours à chaux
  • Cadastre 1835 C 132  ; 2023 AB 8, 129, 130, 204, 205, 206
  • Précisions
  • Dénominations
    usine de chaux
  • Parties constituantes non étudiées
    logement patronal, logement d'ouvriers, carrière

De la première carrière aux fours à chaux Piron

Les carrières de Richebonne sont, sans doute dès avant la Révolution, exploitées pour la chaux et le sable : sur le plan cadastral de 1835, l'endroit est appelé la Sablière à Ferret, et est divisé en un grand nombre de parcelles.

L'extraction de la pierre débute au milieu du XIXe siècle dans une première carrière qui s'étend entre les fours à chaux actuels et les logements (parcelle AB 202), et dont on observe encore les contours et, à l'ouest, le front de taille. A partir de la fin des années 1860, la carrière est exploitée par Louis Piron. Né en 1838 à Benet, fils de cultivateurs, il est entrepreneur de travaux publics à Saint-Pompain lorsqu'en 1865, il se marie, à Frontenay-Rohan-Rohan avec Flavie Lardy, fille de sabotier. Auguste Piron, son frère et témoin, est tailleur de pierre. Au recensement de 1872, Louis Piron est carrier à Richebonne de Benet, mentionné avec son épouse, leur fille et un ouvrier, Jacques Aubry, originaire de Faymoreau.

Un premier four à chaux est construit dans l'angle sud-ouest de la carrière, suivant autorisation préfectorale délivrée le 7 mars 1873 à Louis Piron. Cette autorisation est assortie d'une condition : le four ne devra pas être placé à moins de cent mètres de la route nationale. Or, il apparaît que le four est établi à 85 mètres seulement de la route, et à 42 mètres de la gare ferroviaire, engendrant des plaintes de riverains ainsi que du personnel et des usagers de la gare. Tous protestent contre les fumées et les risques d'incendie provoqués au passage de marchandises explosives ou inflammables dans la gare. Un nouvel arrêté du 20 mai 1875 enjoint Piron de surélever la cheminée de son four de manière à ce qu'elle dépasse le niveau de la corniche qui couronne la façade de la gare.

Tout en tardant à s'y conformer, Piron dépose dès octobre 1874 une demande de construction d'un second four à côté du premier. La Compagnie des chemins de fer, des riverains et l'administration des Ponts et chaussées émettent réserves et protestations, de même que le conseil municipal réuni le 14 décembre 1876. Le 1er décembre 1877, un arrêté du préfet autorise finalement la construction du second four, mais à 100 mètres au moins de l'abri de voyageurs de la gare, tout en ordonnant de nouveau la surélévation de la cheminée du premier four.

Au recensement de 1876, comme durant cette affaire, Louis Piron est qualifié de chaufournier. En 1878 et 1880, selon le cadastre, il fait construire des logements, sans doute pour lui et ses employés, peut-être déjà au sud du site. En 1881, 1886 et 1891, les recensements le mentionnent en tant qu'entrepreneur, chaufournier ou industriel, avec son épouse et leurs quatre enfants, ainsi que plusieurs carriers et leurs familles.

L'activité du four et de la carrière continuant à se développer, et le premier four engendrant des nuisances de fumées pour la gare voisine, un nouveau bâtiment contenant cette fois trois fours est construit en 1883, selon le cadastre, sur le front de taille à l'est de la carrière. Le cadastre en attribue la propriété non pas à Louis Piron mais à la veuve Bailly. Celle-ci fait aussi construire en 1890 deux maisons, un bureau et une forge. Au recensement de 1896, Louis Piron n'est plus mentionné, et le chaufournier est alors Auguste Tardy, né en 1858 à Sansais, époux de Laeticia Hervé.

De l'exploitation par les Mines de Faymoreau à la reconnaissance patrimoniale

Le site passe à cette époque dans les mains de la Société des Mines de Faymoreau qui, par le biais du chemin de fer qui la relie à Niort via Benet, entend utiliser les fours à chaux de Richebonne pour écouler son charbon. Une seconde carrière, bien plus grande que la première, est ouverte au nord-est. Au recensement de 1901, les différents employés de la carrière travaillent pour la Société des Mines de Faymoreau. Auguste Tardy est leur patron, gérant au nom de la Société de Faymoreau, comme l'indique le recensement de 1906 qui mentionne aussi des carriers, un machiniste et un comptable. Après la guerre de 1914-1918, la gérance du four est confiée à Anselme Geay, né en 1884 à Faymoreau (recensements de 1921, 1926 et 1931). Dans les années 1920, le site est électrifié à partir de la centrale électrique de Faymoreau. La traction mécanique pour tirer sur des rails les blocs de pierre depuis la carrière jusqu'au sommet des fours, est alors remplacée par un treuil électrique.

Une nouvelle bluterie est construite au nord du site en 1947, en remplacement d'une bluterie rudimentaire montée après la Première Guerre mondiale. La production annuelle de chaux varie de 8 à 18 000 tonnes et est surtout destinée à l'agriculture. Au plus fort de l'activité, 35 à 40 ouvriers travaillent sur le site. Une cantine leur permet de se restaurer et également de se laver. De 1950 à 1980, la site est dirigé par Emile Vergnaud.

Après la fermeture des mines de Faymoreau en 1958, les fours à chaux de Benet continuent de fonctionner à l'aide de charbon d'importation (du Nord de l'Europe et d'URSS). Le système de fonctionnement des fours est cependant modifié : désormais, le charbon est déversé dans les fours par le toit (alors qu'il l'était par l'étage auparavant). On abandonne donc les chambres de chargement à l'étage. L'activité cesse finalement en 1980-1981.

Porté par son propriétaire et une équipe de bénévoles désireux de la pérennité du site, celui-ci est inscrit au titre des Monuments historiques en 1994. En 2018, la candidature des anciens fours à chaux de Benet a été retenue au titre du département de la Vendée pour participer à l'édition du Loto du patrimoine de la Mission Stéphane-Bern.

Le site a conservé l'ensemble de ses bâtiments et le profil des deux sites d’extraction successifs. La carrière la plus ancienne, de plan triangulaire, est bordée à l'est par les fours à chaux, au nord par la bluterie, avec un transformateur électrique à proximité, à l'est par une cantine et douches, et au sud par les logements du directeur et des ouvriers et par les bureaux administratifs. La carrière la plus récente, au nord-est de l'ensemble, se distingue par la superficie de l'excavation, la hauteur et la longueur de ses fronts de taille en calcaire. Elle était reliée à l'ancienne carrière par un tunnel voûté en berceau, et au pied des fours à chaux par un autre tunnel voûté, à la maçonnerie particulièrement soignée.

Les trois fours sont contenus dans un imposant bâtiment en moellons équarris, à assises régulières. Il est composé de deux niveaux, sous un toit en terrasse que souligne une corniche à modillons. Le niveau supérieur est percé de baies en arc en plein cintre et à claveaux réguliers. La pierre extraite de la seconde carrière était acheminée jusqu'à ces fours, depuis le nord-est, par une rampe fortement inclinée (dénivelé de 35 mètres), munie de rails. Les wagonnets, de type Decauville, étaient tractés à l'aide d'un treuil mécanique puis électrique. La pierre était alors déversée dans chacun des trois fours par le sommet, par-dessus le bois et le charbon qui permettaient de la chauffer et qu'on avait préalablement chargés dans la partie supérieure, cylindrique, du four. Après 1958, cette partie supérieure a été abandonnée, et même démolie pour deux fours sur trois. Le chargement de la pierre, du charbon et du bois ne s'est plus effectué que dans la partie inférieure du four, par son orifice supérieur ou "gueulard". Dans tous les cas, ainsi était produite la chaux vive qui remplissait la partie inférieure, ovoïde, du four, à la base de laquelle elle était collectée sous forme de roches par une trappe de défournement et chargée dans des wagonnets.

Par une autre rampe montant en direction du nord-ouest (qui franchissait un autre tunnel voûté reliant les deux carrières), ces wagonnets acheminaient la chaux vive jusqu'à la bluterie où elle était refroidie puis mise en sacs. Prolongeant la bluterie à l'est, un entrepôt avec quai de chargement permettait l'expédition des sacs, de nouveau par rails ou par camions.

Au sud de l'ensemble prennent place les anciens locaux administratifs et de logement, tous transformés en habitations : cantine du personnel, bureaux administratifs à cinq travées sur deux niveaux, logement patronal reconnaissable à ses murs pignons traités en fronton et à son décor alliant brique rouge et pierre de taille.

  • Murs
    • calcaire pierre de taille
    • brique
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Protections
    inscrit MH, 1994

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Vendée ; 5 M 97. 1873-1937 : installations classées sur la commune de Benet, autorisations.

  • Archives départementales de la Vendée ; 6 M 55 et 56. 1841-1936 : recensements de la population de Benet.

  • Archives départementales de la Vendée ; 3 P 211 à 222 et 3477 (voir aussi l'exemplaire en mairie). 1835-1962 : état de section et matrices des propriétés du cadastre de Benet.

Bibliographie

  • Benet, Lesson, Sainte-Christine, Groupe SCRHIBEs, Savoirs, créations, recherches historiques et informations sur Benet et ses environs, 2013, Fontenay-le-Comte : Lussaud, 2013, 308 p.

    p. 153-157
  • Les Fours à chaux de Benet, l'histoire de 1873 à 1980. Association de Sauvegarde du Patrimoine Industriel, s. d.

Documents figurés

  • Les fours à chaux de Benet, carte postale vers 1910. (Archives départementales de la Vendée ; 6 Fi 1157).

Date(s) d'enquête : 2011; Date(s) de rédaction : 2015, 2023
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Suire Yannis
Suire Yannis

Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée à partir de 2017.

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