On sait assez peu de choses de l'ancien manoir de Fuseaux, lequel dépendait dans la hiérarchie féodale du fief volant et châtellenie du Franc-Alleu qui s'étendait sur Villiers-Charlemagne et les paroisses voisines. La documentation la plus ancienne ne remonte qu'au XVIe siècle et consiste en un cahier de remembrances, seul vestige rescapé des archives de la seigneurie, qui ne livre pas d'informations sur le manoir lui-même. Dans les années 1560, Fuseaux appartenait à Mathurin puis Jean Leroyer. Anne Leroyer et son époux Jean Lefebvre de la Cotellerie en sont seigneurs en 1599, puis René Leroyer en 1608. C'est ensuite Jean puis Pierre Mondières, puis Christophe Fouin époux de Renée Mondières et son fils du même nom dans le courant du XVIIe siècle.

A la période moderne déjà, le manoir n'était apparemment plus résidence seigneuriale et était mis en location ; il apparait d'ailleurs comme simple ferme sur la carte de Cassini au milieu du XVIIIe siècle. Ainsi en 1673, Perrine Chevallier, veuve de Pierre Mondière, baille pour trois ans "la maison manable et domaine de Fuzeaux, une closerie située près ledit domaine aussy nommée Fuzeaux, une mestairie nommée la Filottière [Filoyère] et une closerie nommée l'Isle, le fief et droictz en despendant le tout sittué en la parroisse de Villiers", à charge d'entretenir le domaine, ses bâtiments, ses haies et fossés. Fuseaux était environné de vignes et de bois ; un moulin à eau, disparu aujourd'hui, était établi sur la rive droite de la Mayenne. Un poste de gabelle est également attesté à cet emplacement. D'après l'abbé Angot, les seigneurs de Fuseaux disposaient d'une chapelle sous le clocher de l'église de Villiers-Charlemagne.

A la fin du XVIIIe siècle, le domaine de Fuseaux appartient à Jean-René de Buhigné, avocat en parlement et greffier en l'élection de Château-Gontier. Son fils Jean-Joseph se trouvant inscrit sur la liste des émigrés, sa veuve Marie-Suzanne Niot des Loges est contrainte de conclure avec l'administration un partage de pré-succession en vertu de la loi du 9 floréal an III, au détriment de ses enfants. La métairie de Fuseaux est énoncée parmi les biens de la famille, "composée d'une ancienne maison de réserve, la maison pour le colon, étables, estrage, jardins, terres labourables". Elle échappe néanmoins à l'aliénation et passe, par le mariage de Marie-Suzanne-Jeanne de Buhigné et Claude-Jean-René Foucault des Bigottières, à cette famille de la magistrats lavallois et castrogontériens. En revanche, le bois de Fuseaux est nationalisé en 1794 du fait de la condamnation à mort de son propriétaire, Jean-Guillaume de la Planche de Ruillé, maire d'Angers guillotiné pour avoir remis les clés de la ville à l'armée vendéenne. Il est adjugé à un tuilier de Villiers-Charlemagne, René Sescneau, probablement pour fournir du combustible à sa tuilerie.

A la levée du plan cadastral napoléonien en 1829, le domaine de Fuseaux et ses métairies de Fuseaux, de la Filoyère et de la Troussière appartiennent à Jean-Marie-Théodore Foucault des Bigottières, avocat à Château-Gontier et maire de Houssay. On accède à la maison principale par une large "avenue" plantée d'arbres doublée par un chemin desservant la métairie et une closerie nommée l'Aire. Plusieurs jardins, dont un avec un bassin rectangulaire, entourent la propriété. On note également la présence d'une parcelle en rive de Mayenne nommée "le Port". En 1841, Henri-Marie Foucault des Bigottières héritie de la propriété, dont le mobilier est aussitôt mis en vente. En 1849, il revend à Marie-Charles Sourdille de la Valette, propriétaire du château de la Valette et futur maire de Villiers-Charlemagne, "la maison de maître et le domaine de Fuseaux", la métairie de Fuseaux et celle de la Filoyère.

Les matrices cadastrales signalent, pour l'année 1863, la démolition partielle de l'ancien logis manorial et la conversion du reste en dépendance agricole puis, pour l'année 1878, la démolition de la métairie. En 1882, le prince Charles-Laurent de la Tour-d'Auvergne-Lauraguais rachète le château de la Valette et son domaine, incluant Fuseaux. Les matrices indiquent qu'il y fait construire une nouvelle habitation à l'emplacement de la métairie en 1887, laquelle devient imposable en 1890. En 1899, l'instituteur communal Bariller rédige quelques lignes pittoresques sur le "château" de Fuseaux : "La légende rapporte que pendant de longues années il fut hanté par les esprits. Il était devenu inhabitable et ses propriétaires furent obligés de l'abandonner et en firent construire un autre de construction tout à fait moderne à 10m seulement de l'ancien. Le vieux château sauf une tour avec clocheton a été rasé il y a une quinzaine d'années". La propriété est finalement totalement abandonnée dans le courant du XXe siècle pour finir à l'état de ruines progressivement dévorées par la végétation.