Dossier d’œuvre architecture IA53004469 | Réalisé par
Barreau Pierrick (Contributeur)
Barreau Pierrick

Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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  • enquête thématique départementale, rivière Mayenne
Demeure de villégiature dite cottage ou château
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Mayenne - L'Huisserie
  • Commune L'Huisserie
  • Lieu-dit le Pâtis
  • Cadastre 1810 A2 16  ; 2022 AC 7, 9-10, 18
  • Dénominations
    demeure
  • Parties constituantes non étudiées
    portail, allée, ferme, parc, écurie, grange, remise, hangar agricole, étable, cour, portail, mur de clôture

L'ancienne maison de maître

La carte de Jaillot de 1706 ne figure pas le Pâtis tandis que celle de Cassini identifie le "Paty" comme siège d'une seigneurie. L'information parait douteuse car l'existence d'un fief n'est attestée par aucune autre source. Les plus anciens documents retrouvés ne datent que du XVIIIe siècle, époque à laquelle le Pâtis est scindé en deux exploitations, une métairie et une closerie. En 1738, d'après l'abbé Angot, la closerie était laissée par Jean Duchemin "sieur du Pâtis" à Marie Martin veuve de Louis Duchemin de la Frogerie. La métairie, assortie d'une portion du bois de L'Huisserie, était quant à elle vendue par Annibal de Farcy de Mué à J.-G. Lévesque des Valettes en 1747. En 1769, la vente de la métairie par Marie-Catherine Lévesque des Valettes, femme de Jérôme-Pierre Le Clerc des Gaudêches, à René Richard, négociant lavallois et sieur de la Fournière, atteste de l'existence d'une maison de maître. Au décès de René Richard, le Pâtis reste en indivision entre ses enfants, mais sert probablement de résidence intermittente à Jean Richard (qui prend le nom "du Pâtis"), lequel demeure pour ses affaires à Saint-Domingue en Amérique.

En 1803, les enfants et beaux-enfants Richard vendent le domaine du Pâtis à Pierre Livet de la Chéronnière, conseiller général de la Mayenne résidant à Evron. L'acte précise : "le lieu et métairie du Pâtis et le lieu et closerie du même nom situés commune de L'Huisserie, et les bois taillis dépendant de la métairie, les dites choses consistant en la maison, cour, jardin de maître dépendant de la dite métairie, maisons des colons, bâtiments nécessaires à l'exploitation des dites métairie et closerie, etrages, jardins, vergers, closeaux, prés, terres labourables et non labourables, haies, bois, fossés, barrières et echalliers". En 1810, la veuve de la Chéronnière habite la maison de maître. Les bâtiments qui figurent sur le plan cadastral dressé cette année-là sont situés à l'emplacement de la ferme jouxtant la demeure actuelle : deux corps parallèles avec deux petites ailes en retour sont disposés sur les trois côtés d'une cour rectangulaire, toujours visible. La maison de maître a disparu, mais le logement du fermier en rez-de-chaussée est toujours visible, adossé à un bâtiment a étage donnant sur la cour.

En 1816, le Pâtis est racheté par Pierre-François-Joseph Sédillier, marchand teinturier résidant à Laval rue de Bootz, qui agrandit le domaine par l'acquisition de trois parcelles. Le testament de M. Sédiller, décédé en 1868, prévoit le legs de la "propriété du Pâtis, avec sa maison de maître, ses bois et toutes autres dépendances" à un certain Alphonse Héteau qui réside avec lui et dont il semble être le père adoptif. En 1878, le Pâtis est mise en vente et de nombreux articles de presse en vantent les charmes : "cette propriété, qui a un magnifique point de vue sur la Mayenne, se trouve traversée par une route de construction récente ; elle a accès sur l'ancienne route de L'Huisserie à Laval et comprend maison de maître, jardin, bois-taillis et dépendances, métairie du Pâtis et closerie de la Lande : le tout contient environ 58 hectares". Les bâtiments du Pâtis sont remaniés et agrandis dans le courant du XIXe siècle, comme en témoignent l'ancien logement du fermier et l'ajout d'une écurie et d'un hangar (non mentionnés en 1810).

Le "cottage" campagnard de Victor Boissel

En 1878, la propriété est donc rachetée par un autre négociant et industriel du textile lavallois, Victor-Félix Boissel (1840-1919), et son épouse Eugénie Morice. Se réclamant de la gauche républicaine, l'homme poursuit également une brillante carrière politique : d'abord conseiller municipal et général, il devient maire de Laval en 1892, puis sénateur de 1897 à 1906, puis député de 1910 à 1914. Résidant principalement rue de Tours, quartier Saint-Nicolas à Laval, il cherche l'acquisition d'un domaine agricole en périphérie urbaine. L'acte d'achat du Pâtis précise : "1° une maison de maître avec cour, écurie, remise et jardin le tout clos de murs ; 2° bois taillis attenant au bois de L'Huisserie ; 3° une métairie nommée la métairie du Pâtis exploitée à colonie partiaire par le sieur Louis Houillau et consistant en bâtiments d'habitation et d'exploitation, cour, issues, chemins d'accès, jardins, vergers, terres labourables, prés, pâtures et pièces d'eau ; 4° et une closerie nommée la Lande-Prod'homme […]".

Il faut toutefois attendre les années 1900 pour voir la construction d'une demeure de villégiature inspirée de l'architecture balnéaire ou francilienne. Un emplacement vierge à proximité de la maison de maître, non loin de la route de Laval à L'Huisserie, est choisi pour son implantation. L'architecte demeure inconnu à ce jour. La nouvelle construction est déclarée imposable au registre des matrices cadastrales en 1909. Un grand parc à l'anglaise est aménagé autour de la nouvelle maison des Boissel, prenant pour toiles de fond le bois de L'Huisserie et la vallée de la Mayenne. Quelques cartes postales suivant de peu la construction donnent un aperçu des nombreuses plantations aux abords immédiats de la maison (sapins, palmiers, parterres fleuris...).

Victor Boissel décède à Laval en 1919. Le Pâtis est vendu en 1940 au vicomte Pierre d'Aubert, résidant au 75 rue Alphonse-de-Neuville à Paris, qui en fait une villégiature estivale. Vers 1950, il fait entièrement reprendre les bâtiments de la ferme ; la maison de maître alors en ruine est rasée et deux bâtiments à étage, qu'il aurait dessinés lui-même, sont construits face à face de part et d'autre de la cour. Afin d'agrandir les espaces à vivre de la maison, il fait aménager les pièces de service dans le soubassement de la demeure alors sans utilité ; les simples soupiraux sont transformés en fenêtres pour y donner davantage de lumière. Il fait également aménager une terrasse devant le petit salon. La propriété comprend alors de vastes vergers pour la production de pommes. La fille de Pierre d'Aubert, Solange, épouse de Pierre de La Rochefoucauld, apporte quelques modernisations à la maison du Pâtis, en réaménageant vers les années 1960-1970 les pièces de service, les nombreux cabinets de toilette et en faisant installer un ascenseur.

  • Période(s)
    • Principale : 19e siècle, 1er quart 20e siècle
    • Secondaire : milieu 20e siècle, 3e quart 20e siècle

Le Pâtis est implanté au sommet du coteau en rive droite de la Mayenne, en lisière sud du bois de L'Huisserie. La propriété est bordée par une succession de trois étangs aménagés sur un petit ruisseau affluent de la Mayenne. Une allée plantée d'arbres rejoint la route de Laval à L'Huisserie. Le domaine comprend une demeure au milieu d'un parc anglais, ainsi qu'un ensemble de bâtiments de ferme construits sur le bord de l'ancien chemin de Laval à L'Huisserie, aujourd'hui chemin privé.

L'architecture de l'imposante demeure est atypique sur les rives de la Mayenne et se réfère aux villas franciliennes ou balnéaires du tournant du XXe siècle : polychromie des matériaux, décrochements de volumes, larges et hautes toitures débordantes, cheminées de tailles et formes différentes, balcons et auvents en bois donnent à l'ensemble un caractère très pittoresque. Les maçonneries sont parementées de moellons de schiste apparents et le soubassement de blocs de grès à bossage rustique. La brique rouge est employée pour dessiner deux bandeaux, souligner les arcs segmentaires des baies et pour les conduits des cheminées. L'élévation compte un niveau de soubassement, un rez-de-chaussée surélevé, un étage carré et un étage de comble. Les hautes toitures d'ardoises à longs pans et croupes brisés sont percées de multiples lucarnes. Le bois occupe une place importante pour l'ornement de la maison : garde-corps des fenêtres, du porche et des balcons, supports des débordements des toits, auvents. Les menuiseries des garde-corps alternent les pièces horizontales, verticales, obliques et courbes. Le portail de la propriété, également en bois, en rappelle les motifs.

L'imbrication complexe de volumes rend en réalité lisible depuis l'extérieur l'organisation intérieure de la maison. Celle-ci présente un plan rayonnant autour d'un volume rectangulaire, correspondant au grand salon, pièce maîtresse autour de laquelle s'articule la maison. Ce vaste espace, orienté en direction de la vallée de la Mayenne, est le plus ouvert sur l'extérieur avec ses grandes baies est ses balcons. C'est également la pièce au décor le plus magistral, avec son plafond à la française et son imposante cheminée en tufeau néo-Renaissance, sculptée de pattes de lion, de volutes, de frises de fleurs, de chutes de fruits et de coquilles. Les autres pièces, plus intimes, présentent des plafonds à moulures et de petites cheminées en marbre. Sur ce volume central se greffent ainsi de manière asymétrique trois avant-corps à pans coupés de largeurs différentes, sur les faces sud, nord et ouest, ainsi que le vestibule précédé d'un porche d'entrée placé sur l'angle sud-ouest. L'avant-corps sud correspond au petit salon, l'avant-corps nord à la salle à manger et l'avant-corps ouest à la cage de l'escalier d'honneur éclairée par une haute baie. L'étage accueille chambres et cabinets de toilette ainsi qu'un dressing sur le palier. Un second escalier avec jour zénithal mène au comble où se trouvent une grande chambre à alcôve et les anciennes chambres du personnel.

Placés en retrait à l'est, les communs et la ferme occupent le site de l'ancienne maison de maître. Deux grands logis presque symétriques, couverts de toits à longs pans et à croupes et aux encadrements de baies harpés, se font face de part et d'autre d'une cour accessible par deux portails couverts. Le logis nord se prolonge par une ancienne étable-laiterie. Le logis sud est construit contre un logement plus ancien en rez-de-chaussée dont il occulte la façade postérieure. A proximité, un grand corps de bâtiment comprend une ancienne écurie, un vaste hangar sur poteaux en bois et des soues à cochons adossées. L'entrée de la propriété du côté de la ferme est marquée par la présence d'un calvaire.

  • Murs
    • pierre moellon parement
  • Toits
    ardoise
  • Étages
    étage de soubassement, rez-de-chaussée surélevé, 1 étage carré, étage de comble
  • Couvrements
    • charpente en bois apparente
  • Couvertures
    • toit à longs pans brisés croupe brisée
  • Escaliers
    • escalier de distribution extérieur : escalier droit en maçonnerie
  • Autres organes de circulation
    ascenseur
  • État de conservation
    bon état, remanié
  • Techniques
    • sculpture
  • Représentations
    • ornement végétal, fleur, fruit
    • ornement animal, coquille
    • ornement géométrique, volute
  • Précision représentations

    Cheminée du grand salon sculptée de pattes de lion, de volutes, de fleurs et de fruits.

  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne privée

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 E 8/519. Succession de Pierre-François-Joseph Sédillier, concernant le Pâtis à L'Huisserie, 16 octobre 1868.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 E 35/347. Vente du Pâtis à L'Huisserie par la famille Richard à Pierre Livet de la Chéronnière, 20 août 1803.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 226 Q 114. Achat du Pâtis à L'Huisserie par Pierre-François-Joseph Sédiller, 9 novembre 1816.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 226 Q 679. Acquisition de la maison de maître et de la métairie du Pâtis en L'Huisserie par Victor Boissiel, 27 septembre 1878.

Bibliographie

  • ANGOT, Alphonse (abbé). Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne. Laval : Goupil, 1902.

  • RIBAUT, Anne-Antide. L'avenir s'appuie sur le passé : L'Huisserie. Mairie de L'Huisserie, 1998.

    p. 10

Périodiques

  • L'Indépendant de l'Ouest. Petites annonces de la vente du Pâtis à L'Huisserie, 1878.

Documents figurés

  • Collection de cartes postales anciennes des communes de la Mayenne. (Archives départementales de la Mayenne ; 5 Fi).

  • Plans cadastraux napoléoniens de L'Huisserie, 1810. (Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 2714 et 2884).

Date(s) d'enquête : 2022; Date(s) de rédaction : 2022
(c) Conseil départemental de la Mayenne
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Barreau Pierrick
Barreau Pierrick

Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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