Dossier d’œuvre architecture IA44007177 | Réalisé par
Huon Julien (Contributeur)
Huon Julien

Chercheur, Service patrimoine, Région Pays de la Loire.

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  • inventaire topographique, rives de Loire
Port du Pellerin
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Rives de Loire
  • Hydrographies Loire (la)
  • Commune Le Pellerin
  • Adresse quai du Docteur-André-Provost , quai des Coteaux
  • Cadastre 2000 AM 0431  ; 2000 AA 0010  ; 2000 AA 0600
  • Dénominations
    port

Cité dans les sources dès le Moyen Âge comme "passage" en Loire, la mention du port du Pellerin en tant que tel est relativement récente. Elle remonte au XVIIIe siècle, lorsque la rade du Pellerin formait un mouillage largement apprécié des navires fréquentant l'estuaire. Comme de nombreux ports secondaires du réseau portuaire nantais, le port du Pellerin ne connaît pas d'aménagements en "dur" avant le milieu du XIXe siècle. La réalisation des premiers ouvrages en maçonnerie vise à soulager une hausse du trafic sur ce site portuaire notamment lié à l'encombrement saisonnier des espaces rivulaires par le foin récolté sur les îles de Loire.

Du passage de Loire médiéval à l'avant-port du XVIIIe siècle

La fonction de passage du port du Pellerin est attestée dès le XVe siècle. Un aveu mentionne l’existence d'une redevance à payer par les utilisateurs du passage entre Port Launay et Le Pellerin au seigneur "détenant le passage du Pellerin à travers la Loire". Plus tard, dans un dossier de la Chambre de Commerce de Nantes datant de 1735 et relatif à la construction d'un bassin à flot à Paimbœuf, le port du Pellerin est décrit comme une rade de mouillage pour les navires qui "ne naviguent pas et qu'on n'a pas l'occasion de faire naviguer" et où le port se double d'une fonction de radoub. Un arrêt du Conseil d’État en date du 28 mars 1739 confirme cette observation en précisant qu’aucun vaisseau français ou étranger ne pouvait mouiller ailleurs que dans les rades de Paimbœuf, Couëron, Le Pellerin ou Nantes. En 1763, dans un autre mémoire de la Chambre de Commerce de Nantes, le port du Pellerin apparaît aussi comme un lieu de transbordement dont la surveillance du compte et du poids des marchandises nécessita l’installation d’un bureau des fermes : "Les négociants ayant depuis représenté aux fermiers généraux que les frais de gabarres depuis Nantes jusqu’à Paimbœuf, ou depuis Paimbœuf jusqu’à Nantes, étaient très considérables. Que des navires d’une certaine contenance pouvaient monter jusqu’au Pellerin et qu’il était possible de leur épargner une partie des frais de gabarres en établissant un bureau au Pellerin. La Ferme, sans être arrêtée par l’augmentation de dépense que cet établissement lui occasionnerait, s’y est prêtée".

Pourtant, au regard des rapports de l’Amirauté de Nantes, la fonction d’avant-port de Nantes semble s’essouffler durant la seconde moitié du XVIIIe siècle. Les mauvaises conditions de navigation aux abords de la rade du Pellerin et de Port Launay favorisent progressivement l’essor du port de Paimbœuf. De même, le bureau des Fermes fut transféré à Couëron pour contrôler le chargement et le déchargement des navires entre Nantes et Paimbœuf. La Carte figurée de la rivière de Loire datant de 1764 indique le port du Migron sur la commune de Frossay plus en aval comme le lieu "où l’on radoube les navires depuis deux ans que l’on ne va que difficilement au Pellerin".

Les aménagements de la première moitié du XIXe siècle : la constitution d'un port maçonné

Au commencement du XIXe siècle, dans des informations statistiques transmises au Préfet de Loire-Inférieure en octobre 1809, le port du Pellerin est cité comme "un havre assez commode pour les radoubs des gros bâtiments qui remontent avec difficulté jusqu’à Nantes", mais qu’il n’y ait fait aucun commerce direct. Toutefois, face aux effets de l’ensablement généralisé de l’estuaire de la Loire, le chenal de grande navigation de la rive droite vis-à-vis du port de Couëron tend à se combler. Le trafic portuaire se déporte alors vers le port du Pellerin en rive sud, ce dernier ayant conservé une hauteur de mouillage suffisante. En quelques années, le port du Pellerin connaît un mouvement de navires important au sein du réseau portuaire nantais. En 1841, le maître de port déclare 213 navires ayant pris charge au Pellerin, 39 déchargés et 2 825 ayant stationné dans la rade. Ainsi, au cours de la première moitié du XIXe siècle, le port du Pellerin hérite de la prospérité du port de Couëron liée au transbordement des marchandises.

En 1838, l’État prend en charge la construction d’un môle de 40 mètres de long avec deux cales contiguës destinées au chargement et déchargement des navires. Au sommet et en retour des cales, des murs de quais sont également construits.

En 1841, le règlement du police du port du Pellerin précise que les marchandises ne pourront être déposées sur les cales et les quais plus de vingt-quatre heures afin d’éviter un trop grand encombrement. La même année, un débat a lieu entre les ingénieurs des Ponts et Chaussées, la commune et la préfecture, autour d’un projet d’alignement des quais du Pellerin, et notamment au sujet de leur largeur. Le Conseil municipal demande un élargissement à 12 mètres alors qu’ils ont été pensés sur une largeur de 8 mètres, "grandement suffisante pour le dépôt et le mouvement momentané des marchandises qu’exige l’éloignement des magasins de la rivière" d’après l’ingénieur en chef Jules de La Gournerie. Ce dernier ajoute dans son rapport : "qu’il ne pourrait être utile de donner douze mètres de largeur au quai du Pellerin, d’autant qu’on voudrait le faire servir de promenade publique, et si l’on doit faire une promenade, nous pensons qu’il serait utile au commerce, qu’on la rejetât derrière la ville, plutôt que de la placer entre les magasins et les navires".

Le plan d’alignement des quais du port du Pellerin remanié en 1844, puis approuvé par ordonnance royale du 29 mai 1846, repose largement sur l’utilisation des déblais considérables issus des dragages de la Basse-Loire, notamment ceux réalisés au niveau de la passe de Couëron. L’ingénieur en chef Lemierre prévoit de déposer sur la plage qui s’étend au pied du coteau, devant le bourg du Pellerin, les produits des dragages afin d’élever des terre-pleins au-dessus des marées de vives eaux. Jusqu’en 1852, on utilisa ces déblais sous forme de remblais, protégés du côté du fleuve par un enrochement et des perrés. Une partie de ces terrains fraichement remblayés est concédée aux riverains pour y élever de nouvelles constructions.

La question de l'encombrement des quais

Au début des années 1860, la traversée entre Port Launay et le Pellerin pose de grandes difficultés, notamment liées au phénomène d’envasement de la rive nord par suite des travaux d’endiguement du chenal de grande navigation. Mais la grande préoccupation à cette époque pour le pouvoir municipal concerne l’encombrement par les récoltes de foins et de roseaux des quais du port du Pellerin construits précisément à cet effet quelques années auparavant. Bien que saisonnier (de juin à octobre), la réputation et les conséquences fâcheuses de cet encombrement impose la rédaction, en 1869, d’un arrêté municipal concernant la police des quais en lien avec les récoltes des îles de Loire déposés sur les espaces de transbordement des marchandises.

Au tournant des années 1860 et 1870, plusieurs demandes de la part du Conseil municipal auprès de l’administration des Ponts et Chaussées tendent à établir des quais et des cales aux ports de la Télindière et de la Martinière pour soulager le port du Pellerin. En réponse à ces nombreuses et répétées sollicitations relatives à l’agrandissement du port du Pellerin, Henry Joly de Boissel, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, propose en 1872 un projet d’agrandissement des quais entre le môle et la cale Beaulieu. Il consiste à établir sur cette section une cale en avant du quai existant, de 170 mètres de longueur et d'une largeur de 12 mètres pour la somme de 8 200 francs. Pourtant ce projet ne trouve aucune suite favorable en raison de l’absence de ressources disponibles des deux côtés. L’année suivante, le Conseil municipal relance avec insistance l’Administration en exposant que la quantité de foins et de roseaux débarquée au port du Pellerin augmente chaque année et que les quais existants demeurent complètement insuffisants pour desservir un tel mouvement estimé à près de 3 000 tonnes pendant les trois mois d’été. La circulation sur les quais devient alors quasiment impossible, sans compter les risques d’incendie très importants. En 1874, l’ingénieur Joly de Boissel émet une nouvelle proposition différente de celle de 1872. Ce dernier projette de remblayer une prairie bordant l’entrée du bras de Saint-Jean-de-Boiseau où se trouve des profondeurs d’eau suffisantes pour permettre aux bateaux employés pour le transport des foins de s’approcher de la rive. La prairie en question s’étend quasiment immédiatement en amont des quais existants. Cependant, le Conseil municipal s’y montre hostile car le terrain ne fait pas partie du territoire communal et dépend de la commune voisine de Saint-Jean-de-Boiseau. Le Service des Ponts et Chaussées est alors invité à fournir une nouvelle étude de cale dans le bourg même.

En 1875, des travaux sont entrepris afin d’élargir les cales disposées de chaque côté du môle et devant livrer passage aux voitures qui traversent le fleuve. Ces dernières sont élargies de 3 mètres et limitées par des perrés maçonnés pour que l’embarquement du bac soit moins difficile et dangereux. Le pavage est quant à lui réalisé avec des vieux pavés provenant du quai de la Fosse à Nantes. L’année suivante, le passage entre le Pellerin et Port Launay est désormais desservi par un bateau à vapeur et un bac charretier pouvant transporter les voitures et les bestiaux. En rive sud, le bac à vapeur approche toujours le long des cales accolées au môle du port du Pellerin, et malgré les travaux d’élargissement, les difficultés d’accostage demeurent.

L’ingénieur Joly présente en 1877 un nouveau projet d’élargissement des quais du Pellerin. Il envisage de construire deux tronçons de quais en amont et en aval du môle. Le projet est approuvé par décision ministérielle du 26 mars 1878 qui précise que les travaux ne seraient entrepris qu’après le versement par la commune d’une subvention égale au quart de la dépense prévue. Une nouvelle fois, le Conseil municipal répond négativement à la proposition de l’Administration, argumentant que le travail proposé ne donnerait nullement satisfaction aux besoins de la commune et qu’il aurait fallu prolonger les quais à l’aval du bourg jusqu’à la digue Roque dans le but d’augmenter significativement la surface affectée aux déchargements et aux dépôts des foins sur les quais du Pellerin. En 1880, le Service des Ponts et Chaussées concède d’exonérer la commune de la part contributive lui étant réclamée. Les travaux d’élargissement des quais du port du Pellerin sont réceptionnés en février 1882. Contrairement au projet présenté en 1877, seule la partie comprise entre le môle et la cale Beaulieu est agrandie sur une longueur de 174 mètres.

Le prolongement des quais vers l'aval

À la suite d’une demande de plusieurs habitants du Pellerin de pouvoir, à toute heure de marée, accéder à la Loire pour abreuver les animaux, laver le linge et y décharger les embarcations, des travaux de prolongement des quais comportant une petite cale inclinée sont exécutés en 1889, en aval de l’actuelle place du Commandant -l’Herminier. Ces travaux de prolongement font suite à un projet avorté en 1887 en raison de l’absence d’entente entre la commune et un des propriétaires riverains, ainsi que par l’absence de délimitation du domaine public fluvial à cet endroit. Le projet consiste en un prolongement de 210 mètres des quais existants vers l’aval. Comme ces derniers, dont ils conservent le profil transversal, les quais projetés comprennent une partie pavée, de 10 mètres de largeur, limitée du côté de la Loire par un talus perreyé à 45° établi sur un massif d’enrochements, et se raccordant de l’autre côté par un terre-plein empierré avec le terrain naturel. Les perrés et le pavage reposent sur un lit de débris de carrières. 7 escaliers, espacés de 30 mètres, sont ménagés dans le nouveau quai. Le remblai provient des produits des sables dragués dans les parties voisines du port du Pellerin. Selon les Ponts et Chaussées, ce projet de prolongement est motivé une nouvelle fois par l’importance des dépôts de foins sur les quais du Pellerin lors des années précédentes, notamment en 1888 avec 1 843 tonnes. De plus, la participation de l’État apparait justifiée par le caractère d’intérêt local de ces travaux. Les foins dont il s’agit appartiennent pour la plupart, non aux habitants du Pellerin, mais aux herbagers des communes voisines qui exploitent les prairies des rives et des îles de la Basse-Loire.

Les aménagements du XXe siècle concernent avant tout les lieux d’accostage pour le passage de bac. Remplaçant les bateaux à vapeur, un bac à chaînes nommé le « Saint-Julien » est inauguré en février 1914. Il assure la traversée en Loire par des chaînes installées en travers du fleuve et de nouvelles cales sont construites à cet effet. Chaque traversée permet de transporter une centaine de passagers d’une rive à l’autre. Plusieurs pontons permettent également aux bateaux à vapeur de faire escale sur leur trajet entre Nantes et Saint-Nazaire. Des photographies et cartes postales de la première moitié du XXe siècle montrent les longs quais du port du Pellerin comme un espace de déambulation pour une foule de promeneurs. Plusieurs hôtels, cafés et buvettes font du port un lieu de détente apprécié par de nombreux nantais, notamment lors des régates en Loire organisées en fin de semaine. La fonction de passage du port du Pellerin est confirmée en 1955 avec l’arrivée du bac amphidrome nécessitant la construction d’une double cale, encore utilisée aujourd’hui par le passage d'eau du bac départemental, vis-à-vis de la place du Commandant-l'Herminier.

Au nord du bourg, le port du Pellerin borde la Loire sur sa rive gauche. Il s’étire sur plus d’un kilomètre, depuis le feu du site de Bikini en amont, jusqu’au front d’accostage des Ateliers des Côteaux vers l’aval. Le port dispose de trois espaces d’accostage distincts : le ponton du site Bikini pour l’amarrage des bateaux de pêche et de plaisance, la cale double place du Commandant-l’Herminier pour l’embarquement et de débarquement des voyageurs du bac départemental, et les postes d’accostage réservés pour les besoins en matière de réparation navale ou de maintenance d’outillages de manutention du Port de Nantes–Saint-Nazaire. Au droit du quai du Docteur-André-Provost, les abords de l’ancien môle sont envasés, empêchant l’accès des embarcations aux cales accolées.

  • Murs
    • pierre moellon
    • pierre de taille
    • béton
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
    propriété du département
    propriété d'un établissement public

Documents d'archives

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; B 636. Livre des audiences de la Chambre des comptes de Bretagne, 1638.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; B 1882. Aveux et dénombrements de terres, de rentes, de maisons, de métairies, de fiefs, de droits réels et honorifiques tenus noblement du duc de Bretagne et du Roi, dans le ressort de la sénéchaussée de Nantes, 1389-1766.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; C 676 : Port de Paimbœuf. Création d'un môle. Projet de bassin, 1732-1790.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; C 882. Mémoires sur les questions concernant la faculté de décharger les navires à Indre et dans les autres petits ports de la Basse-Loire, 1763-1768.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 3 S 981. Prolongement, relèvement et agrandissement des quais du port du Pellerin : rapports, devis descriptifs et estimatifs, plans, correspondance, 1871-1897.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 509 S 58. Ports : travaux neufs et d'entretien, travaux de défense. Le Pellerin, 1826-1868.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 509 S 59. Ports : travaux neufs et d'entretien, travaux de défense. Le Pellerin, 1870-1923.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 510 S 4. Travaux d'endiguement et de dragage de la Loire-Maritime. Amélioration des accès du port de Nantes, 1850-1869.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 536 S 1. Alignements généraux (Indre, Nantes, Paimboeuf, etc.). État lais et relais de mer, 1822-1915.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 536 S 20. Alignements, délimitations du rivage, lais et relais de mer. Le Pellerin, 1819-1920.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 564 S 1. Police des ports. Règlements particuliers, 1826-1929.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 569 S 12. Passages d'eau. Bacs : Indret au Pellerin, an XI-1879.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 569 S 30. Passages d'eau. Bacs : Port-Launay au Pellerin, 1805-1910.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 625 S 11. Occupations temporaires : bateaux-lavoirs et autres bâtiments flottants du port de Nantes (Loire fluviale et maritime). Arrêtés d'autorisation : Chantenay, Couëron, Indre, Mauves-sur-Loire (étier de), Pellerin, le, Saint-Sébastien-sur-Loire, Trentemoult, 1842-1936.

  • Archives départementales de Loire-Atlantique ; 1902 S 132. Travaux publics (fonds de la Préfecture). Le Pellerin : enlèvement d'une borne et réfection du quai, 1931-1934.

Date(s) d'enquête : 2018; Date(s) de rédaction : 2019
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Huon Julien
Huon Julien

Chercheur, Service patrimoine, Région Pays de la Loire.

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