Les observations sur les immeubles et maisons des Sablons portent sur l'ensemble du quartier (sections cadastrales ER, ES, EK, EI, EH, OY). En 1990, l'INSEE recense 5 904 logements là où le cahier des charges en prévoyait la livraison de 7 122 entre 1965 et 1975. Ce différentiel s'explique par les restaurations qui ont été menées dans le quartier depuis quelques années. Dans le cadre de l'inventaire du patrimoine, 360 entités ont été repérées dont 305 maisons individuelles, 39 barres, 13 tours et 3 plots.
Les matériaux et les formes : quelle unité aux Sablons ?
Le monopole du béton : répondre à l'urgence
La totalité des tours, barres et plots est construite en béton précontraint selon le procédé TRACOBA qui avait déjà été expérimenté par Pierre Vago, architecte en chef des Sablons, au Ronceray et à Saint-Cloud. C'est la première fois en France que ce procédé, de type panneau sandwich, est employé à grande échelle notamment grâce à l'implantation sur le site de l'usine de préfabrication Heulin. Ce procédé permet un séchage rapide des panneaux conçus avec un dosage de ciment différent selon les étages pour permettre une isolation diversifiée malgré l'épaisseur constante des murs.
Bien qu'aujourd'hui la majorité des immeubles ait perdu son revêtement, les barres et les tours étaient recouvertes à l'origine de carreaux de céramique blanc et gris apportant une unité stylistique à des architectures de formes diverses. Les photographies anciennes rappellent cette importance de la couleur blanche. Aujourd'hui, il n'y a plus qu'une barre d'immeuble qui porte ce décor.
Les maisons sont en parpaings de béton jointés. Une part importante de ces maisons (78%) est décorée d'un placage par des panneaux de pierre reconstituée sur l'ensemble de la façade ou en rez-de-chaussée. C'est l'unique décor qui anime les façades pour les maisons individuelles. Le reste des maisons et les étages de celles parées de pierre en rez-de-chaussée sont uniquement recouverts d'un enduit taloché.Assemblage de béton et pierre reconstituée sur la façade d'une maison.
Formes et modules
Les modules pensés et imposés par l'architecte en chef à ses architectes d'opération restent identifiables, notamment le module de la loggia considérée dans les années 1960 comme indispensables dans les logements modernes, permettant l'accès au luxe et à la modernité. Cet élément de confort est indissociable de l’œuvre de Pierre Vago et découle certainement de ces premières réalisations à grande échelle dans le sud de la France. Loggia sur la façade sud d'une des tours du bord de l'Huisne. Ces loggias (en saillie, symétriques, cadencées) se retrouvent sur la quasi totalité des logements conduits par Vago. Cette répétition systémique signe l’œuvre de l'architecte en chef et fait l'originalité des Sablons. De même, l'utilisation du panneau façade plein ou évidé ainsi que le vocabulaire formel et dépouillé des immeubles des Sablons entrent en cohérence avec la terminologie de Pierre Vago.
Malgré cette recherche du minimum décoratif au profit du fonctionnel qui caractérise les bâtiments des Sablons, on retrouve quelques moulurations ou jeu formel du béton sur plusieurs immeubles de la ZUP. Ainsi en rez-de-chaussée de certaines barres, des jeux de reliefs et de percées ornent l'édifice. Moluration béton en rez-de-chaussée d'une barre.
Cette mise en perspective des pleins et des vides est visible sous d'autres formes au rez-de-chaussée de plusieurs tours et barres de logements. Par un percement, passage piéton et pour véhicule couvert se matérialise dans une des barres de la partie est du quartier. Dans cette même zone, sur des immeubles légèrement plus tardifs (1972), des piles de béton, toujours en rez-de-chaussée créent une multi perspective et un rebond visuel entre les immeubles. Effet de grille béton en rez-de-chaussée de tours.
Bien que les maisons individuelles ne portent pas des formes qui se recoupent, conférant une certaine unité, elles sont tout de même positionnées sur la parcelle de manière équivalente : mitoyennes en ligne façade principale côté rue et façade secondaire côté cour centrale commune ou arrière-rue. Cette organisation urbaine permet de concevoir les lotissements comme des entités à part entière au sein du grand ensemble des Sablons.