Dossier d’œuvre architecture IA49010762 | Réalisé par
  • inventaire topographique, Fontevraud-l'Abbaye - Montsoreau
Ferme modèle des Trois-Chênes, Maison Jouanne, (détruite), Fontevraud-l'Abbaye
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
  • (c) Conseil départemental de Maine-et-Loire - Conservation départementale du patrimoine

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Fontevraud-l'Abbaye - Montsoreau - Saumur-Sud
  • Commune Fontevraud-l'Abbaye
  • Lieu-dit Maison Jouanne
  • Cadastre 2013 A 1297
  • Dénominations
    ferme
  • Précision dénomination
    ferme-modèle
  • Appellations
    ferme des Trois-Chênes, Maison Jouanne, Maison Fouquet ou La Folie
  • Parties constituantes non étudiées
    communs, puits

Cette ferme modèle, détruite, était un élément majeur de l'architecture rurale de la première moitié du XIXe siècle, d'intérêt régional.

Par son histoire, elle témoignait tout d'abord du démembrement de la forêt de Fontevraud, domaine forestier qui connut à cette époque une importante reconquête sous la forme de défrichement et de mise en culture volontariste souvent impulsés par des investisseurs extérieurs à la paysannerie locale.

Par ses caractéristiques et son style néoclassique, elle était l'un des très beaux et très précoces représentants de fermes modèles, bâtiments ruraux exemplaires en termes de qualité architecturale et de rationalité agricole.

1. Les fermes de la forêt

L'immense forêt de Fontevraud, qui relevait de l'abbaye, fut saisie au titre des biens nationaux lors de la Révolution française puis gérée par l'État jusqu'au début des années 1830. Le Ministère des Finances, autorisé par la loi du 25 mars 1831 à aliéner des bois de l'État, mit alors en vente ce domaine forestier en 14 lots qui, par acte du 5 septembre 1832, furent acquis pour la somme de 701 000 francs par la Société de la forêt de Fontevrault, société civile sous seing privé formée entre cinq associés. Il s'agissait d'un investissement spéculatif et les cinq associés étaient des notables d'Angers et ses environs : Auguste Brichet, notaire, Sulpice Caillault, rentier, René-Pierre Deschères, banquier, René Orfray, expert, et Rigobert Pachaud, notaire. Les terrains cédés, près de 1 400 hectares, étaient situés sur la commune de Fontevraud, mais aussi sur les communes voisines (Turquant, Couziers, Roiffé et Saix) ; certains des lots étaient assortis d'un droit de défrichement limité, mais dans l'ensemble près des deux tiers des surfaces boisées pouvaient être défrichés. La Société de la forêt de Fontevrault procède dès lors à la revente au détail de ces domaines, processus qui s'étira sur un quart de siècle, et plusieurs des acquéreurs y installèrent des bâtiments d'exploitation. Sur le territoire de Fontevraud, ces investissements se traduisirent par la construction de plusieurs fermes, dites "fermes de la forêt".

2. La Maison Jouanne

La Maison Jouanne était l'une de ces fermes.

Cette ferme-modèle est construite en 1838 par Denis Jouanne, notaire à Saumur, sur un domaine d'une cinquantaine d'hectares d'un seul tenant progressivement constitué par l'acquisition (en 1834, 1835, 1836 et 1837) de quatre parcelles issues des lots vendus à la découpe par la Société de la forêt de Fontevrault. Les bâtiments furent rapidement érigés, sur les plans d'un architecte probablement actif en Saumurois, mais dont l'identité reste inconnue.

L'exploitation est principalement orientée vers l'élevage bovin, la sylviculture et les labours.

Rapidement, l'administration carcérale de la Maison centrale de détention de Fontevraud envisage d'y installer sa colonie pénitentiaire, mais y renonce pour choisir finalement le domaine de Mestré en 1842. Exploité par des fermiers, l'ensemble change dès lors plusieurs fois de mains : en 1843, Denis Jouanne le cède à sa soeur (domiciliée à Paris, puis à Saumur), laquelle le vend en 1848 à Daniel Fouquet, notaire à Tigné (Maine-et-Loire).

Dénommé dans un premier temps "ferme des Trois-Chênes", le domaine fut parfois appelé "Maison Fouquet" et sur la carte d'état-major de 1841, elle est même désignée comme "La Folie", mais le nom de "Maison Jouanne" resta le plus usuel. D'autres propriétaires, tous, semble-t-il, extérieurs à la commune, se succédèrent ; dans les années 1950, elle appartint à un ingénieur agronome. La ferme fut habitée et exploitée par une famille de fermiers jusque dans les années 1970.

Parallèlement, de nombreux espaces de forêts et de landes au voisinage de la Maison Jouanne passèrent sous administration militaire dès la fin du XIXe siècle, pour constituer un terrain d'entrainement, puis une base, qui s'agrandit au fil du temps. En 1972, un décret eut pour conséquence de permettre de nouvelles expropriations afin d'élargir encore cette base militaire. La Maison Jouanne et ses terres sont ainsi acquises par le ministère de la Défense et les superbes bâtiments de la ferme sont rasés, vers 1980.

Il est à noter qu'elle figure encore comme bâtiment en élévation sur le cadastre actuel, non corrigé (parcelle A-1297).

Cette ferme s'élevait sur les terres défrichées des franges septentrionales de la forêt de Fontevraud. Elle fut construite près d'une intersection, au bord de la route de l'Arrée, longue allée rectiligne de près de 4,5 kilomètres qui était l'un des principaux chemins d'exploitation du massif forestier, tracé par l'administration d'État dans les années qui suivirent la Révolution française, lorsque la forêt de l'abbaye fut saisie comme bien national et qu'elle fut organisée en coupes rationalisées.

La ferme fut construite selon des partis géométriques et topographiques très affirmés. Au sein d'un domaine de près de 50 hectares, le corps principal était édifié dans l'angle le plus aigu d'un quadrilatère de labours de 25 hectares qu'il englobait ainsi totalement dans son champ de vision. Ce bâtiment était strictement aligné sur un axe est-ouest, présentant sa façade principale au nord, sur cour, vers le carrefour des voies, et sa façade postérieure au sud, face aux terres qu'il commandait.

L'édifice que Denis Jouanne fit construire, dans un style néoclassique, était élégamment ordonnancé et formé d'un corps central encadré de deux ailes flanquées d'un pavillon à leur extrémité. Ces éléments étaient de hauteurs différentes, mais comprenaient un rez-de-chaussée, un étage-carré et un comble à surcroît. Une grande cave formait le sous-sol du bâtiment. Les toits, d'ardoises, étaient à longs pans et les pavillons se distinguaient par l'emploi de croupes. L'ensemble était en moyen appareil de tuffeau. Le bâtiment mesurait 44 mètres de long par 11 mètres de large (13 mètres pour le corps central).

Dans cette composition, l'élément central se distinguait par son volume ample et saillant en façades antérieure et postérieure. Couronnés d'un fronton triangulaire à base interrompue, ses pignons étaient de part et d'autre dotés d'une monumentale porte couverte en plein-cintre, surmontée d'un oculus.

La grande sobriété du moyen appareil de tuffeau était animée par le jeu des volumes du bâtiments, par le dessin des corniches, des bandeaux d'appui et de niveau ou encore par les élégantes petites baies semi-circulaires à chambranle à fasces qui ajouraient l'étage d'attique des ailes, éléments de décor chers à l'architecture néo-classique alors en vogue. Les façades latérales des pavillons, aveugles (à l'exception d'une fenêtre à l'étage-carré du pavillon ouest), étaient là encore animées par les bandeaux de niveau et par les renfoncements qui correspondaient à de fausses fenêtres.

L'unité de l'ensemble était souligné par un bandeau qui régnait sur toute l'élévation, formant bandeau d'appui des baies de l'étage-carré des ailes et pavillons et rompant la muralité du corps central qu'il parcourait au niveau des sommiers de l'arc couvrant la grande porte ; cette ligne se poursuivait d'ailleurs sur les huisseries de celle-ci, pour séparer les vantaux du tympan.

Dans l'organisation générale de ce bâtiment, la composition d'ensemble ne correspondait en rien à la hiérarchie des espaces, où le fonctionnel l'emportait. En effet, le corps central abritait la grange avec une fosse à effluents et un passage couvert, alors que l'habitat était relégué dans l'aile occidentale, l'aile orientale abritant des étables et des espaces de stockages agricoles.

L'aile habité, à l'ouest donc, était accessible par une seule porte en façade antérieure, mais par trois portes en façade postérieure, ouvertes en direction des parcelles cultivées. Au rez-de-chaussée, le vestibule donnait sur plusieurs pièces qui elles-mêmes en commandaient d'autres ; il accueillait par ailleurs un escalier tournant à jour qui donnait accès à l'étage carré, puis au comble. À l'étage, par contre, un couloir central permettait d'accéder indépendamment à chaque pièce ; une porte divisait ce couloir à l'articulation entre l'aile et le pavillon. Cette distribution permettait visiblement de différencier certains espaces : il semble que le pavillon ouest ait abrité les espaces les plus nobles (davantage de salles à cheminée, larges fenêtres, plus grande hauteur de plafond à l'étage), sans doute destinés au propriétaire. L'habitat du fermier, voire de ses employés de ferme, pourrait avoir pris place dans certaines des salles du rez-de-chaussée et peut-être aussi à l'étage d'attique dans les petites pièces de l'aile à fenêtres semi-circulaires.

Cette ferme était ainsi conçue comme un bâtiment de grande qualité architecturale et rationnalisé qui accueillait l'ensemble des espaces, habitat, abri du bétail et lieux de stockage.

Au nord, au-devant de la ferme, se trouvait un petit édifice sur cour en rez-de-chaussée de plan allongé, à toit d'ardoises à longs pans, qui comprenait à l'ouest un fournil (la « boulangerie » mentionnée en 1848) et à l'est quatre petits espaces destinés à abriter des animaux (chevaux, porcs ou autres ?) ; en 1979, ce bâtiment servait de bergerie.

À l'est de la cour, une petite maison en rez-de-chaussée de plan massé, à toit d'ardoises à longs pans, comptait deux pièces dont une à cheminée avec four et disposait d'une petite étable en partie postérieure ; elle semble avoir été édifiée pour accueillir un ménage supplémentaire de fermiers ou de manouvriers agricoles.

Ces deux petits bâtiments, vraisemblablement absents de la construction d'origine, furent tôt édifiés, puisqu'ils étaient déjà attestés en 1848.

Au sud-est de la cour se trouvait également un puits.

  • Murs
    • moyen appareil
  • Toits
    ardoise
  • Étages
    sous-sol, rez-de-chaussée, 1 étage carré, comble à surcroît
  • Élévations extérieures
    élévation ordonnancée
  • Couvertures
    • toit à longs pans
    • croupe
  • Escaliers
    • escalier dans-œuvre : escalier tournant
  • État de conservation
    détruit
  • Statut de la propriété
    propriété de l'Etat

Documents d'archives

  • AD Maine-et-Loire. 3 P 5 / 146 / 3. Cadastre. Matrices cadastrales (page 553).

    page 553
  • AD Maine-et-Loire. 4 Q 13805. Domaines, enregistrement, hypothèques. Registre de conservation des hypothèques : f°87, vente Jouanne-Fouquet (1848).

  • AD Maine-et-Loire. 1 Y 164. Administration pénitentiaire. Préfecture. Maison centrale de détention de Fontevraud, colonies agricoles annexées à la maison centrale : Mestré (1842-1856).

Annexes

  • Annexe n°1
Date(s) d'enquête : 2010; Date(s) de rédaction : 2010
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
(c) Conseil départemental de Maine-et-Loire - Conservation départementale du patrimoine
Articulation des dossiers