Dossier d’œuvre architecture IA85002259 | Réalisé par
Suire Yannis (Contributeur)
Suire Yannis

Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée à partir de 2017.

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  • inventaire topographique, Vallée de la Sèvre Niortaise, Marais poitevin
Demeure, atelier d'artisan puis garage automobile, 58 et 60 rue Georges-Clemenceau
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
  • (c) Conseil départemental de la Vendée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Vallée de la Sèvre Niortaise, Marais poitevin
  • Commune Vix
  • Lieu-dit Bourg
  • Adresse 58 et 60 rue Georges-Clemenceau
  • Cadastre 1836 C 979, 981, 982, 983  ; 2019 AK 241, 425, 426, 474
  • Dénominations
    maison, atelier
  • Parties constituantes non étudiées
    cour, jardin, mur de clôture

La demeure de Pierre Garos, procureur et fermier seigneurial de Vix

La création de cette propriété est liée à l'ascension, à la fin du 17e siècle, d'un personnage qui a fait fortune par l'exercice de fonctions administratives et économiques à Vix pour le compte de l'abbesse de Saintes. Originaire, semble-t-il, du Gers, et ayant auparavant servi l'abbesse à Saintes, Pierre Garos (1637-1708), marié à Hipolite Chasteau puis à Françoise Regnaud, arrive à Vix dès les années 1670 (une de ses filles y voit le jour en 1674), sans doute en lien avec le curé d'alors, Labeyrie, auquel il est apparenté. Procureur fiscal, syndic et fermier de la seigneurie de Vix en 1683, Pierre Garos demeure d'abord au presbytère puis à la maison seigneuriale. En 1685, il achète la demeure de la Prévôté, à l'angle de la place de l'église. Deux ans plus tard, en 1687 (la date est inscrite au-dessus de la porte), il se fait construire sa propre demeure au coeur du bourg, à proximité du centre économique, religieux et administratif du village. Le 23 décembre 1687 toutefois, il habite toujours au logis seigneurial. La ferme seigneurial de Vix lui échappe toutefois à partir de 1697, et il meurt à Vix, sans doute dans sa demeure, le 6 avril 1708. Une semaine auparavant, le 20 mars, ses fils François-Luc et Pierre-Fort ont renouvelé à leur profit auprès de l'abbesse de Saintes le bail de la ferme seigneurial de Vix.

Avant de mourir, le 6 mai 1707, "en la chambre basse où je suis détenu au lit, malade", Pierre Garos a partagé ses biens par testament, divisant notamment sa demeure en deux parties (une partition que l'on retrouve aujourd'hui). La moitié orientale du logis ("depuis la moitié du degré pour monter dans les chambres et greniers, et moitié du courouer pour entrer dans le jardin") (soit les parcelles 977, 979 et 981 du plan cadastral de 1836), la moitié de la cour et la moitié du jardin (divisé en deux par une grande allée) qui lui correspondent, ainsi que la moitié d'une grange qui longe la grande rue (parcelle 968), sont attribuées à son fils aîné, François-Luc Garos, sieur de la Commerie, procureur fiscal de la seigneurie de Vix, époux de Hélène Chevallereau. Sans que le testament ne le précise, la moitié occidentale du logis (parcelles 981 et 982), l'aile de communs en retour d'équerre le long de la rue de la Guilletrie (parcelle 983), la moitié de la cour et la moitié du jardin qui lui correspondent, et la moitié ouest de la grange le long de la grande rue (parcelle 969) échoient quelques années plus tard à la fille cadette de Pierre Garos, Charlotte (1693-1743), mariée en 1713 avec Henri-Charles Nicolle, bourgeois de Doix.

Evolution de la moitié occidentale (58 rue Georges Clemenceau) jusqu'au milieu du 19e siècle

On retrouve la moitié occidentale de la propriété en 1734 lorsque Charlotte Garos veuve Nicolle la vend à son neveu, René Denfer, sieur de Haute-Roche, fermier seigneurial de Vix (il a épousé Françoise Garos, fille de Pierre-Fort Garos). L'acte de vente décrit "un appartement de maison situé audit lieu de Vix, consistant en deux chambres basses, une chambre haute, deux greniers au-dessus, trois autres chambres basses au bout de l'écurie et joignant le corps de logis, avec ladite écurie et greniers au-dessus". Le portail d'entrée de la propriété, le couloir central du logis, l'escalier ainsi que le puits qui se trouve dans le jardin sont communs avec le sieur Garos de la Commerie qui possède la partie orientale.

Cet ensemble est complété en 1735 lorsque l'abbesse de Saintes, dérogeant à son monopole seigneurial, autorise René Denfer de Haute-Roche et son voisin et cousin, François Garos de la Commerie (qui possède la partie orientale d la propriété) à faire construire "un four à cuire le pain dans la maison qui leur appartient, appelée la Prévôté autrement le Portal (...) pour y boulanger et faire le pain nécessaire à leur famille et leurs domestiques". Ils sont aussi autorisés à faire construire "un pigeonnier sur quatre piliers ou d'y faire un toit par-dessus (...) et d'y tenir des pigeons". Le pigeonnier et le four doivent constituer le petit bâtiment que le plan cadastral de 1836 situe à l'extrémité sud du jardin (parcelle 954, à l'emplacement de l'actuel.

Après René Denfer de Haute-Roche, la partie occidentale de la propriété passe à sa fille, Catherine Denfer de la Proillère et à son mari, André Piet de Roquépine (1743-1811), négociant et ancien consul des marchands de Niort. Acquéreur de biens nationaux (dont le presbytère et l'église), maire de Vix de 1802 à 1808, il revend avec son épouse, dès le 29 janvier 1801, la moitié occidentale de l'ancienne demeure Garos dont ils ont hérité. L'acquéreur est un autre notable de Vix sous la Révolution et l'Empire, à la tête d'une famille qui va dominer la vie communale pendant tout le 19e siècle. Ancien notaire royal, Pierre Guérin, époux de Marie Gaudineau, est maire de Vix en 1801-1802. Quelques semaines plus tard, le 8 mars 1801, il revend à Louis Mion et à André Simonneau les dépendances qui longent la grande rue (parcelle 969). Ces dépendances feront place en 1865 à une nouvelle maison qui abritera dans la seconde moitié du 20e siècle la boutique et atelier du peintre André Deffe puis une maison de la presse et enfin la boucherie actuelle.

Pierre Guérin-Gaudineau meurt dès 1804 et la partie occidentale de la propriété passe à son fils, Pierre Guérin (1776-1827), receveur des contributions directes, époux de Marie-Anne Mingueneau. Lui-même s'éteint dans sa demeure le 12 février 1827. Un inventaire après décès de ses biens est établi le 15 mars. Il décrit le mobilier présent dans la partie ouest de la maison, constituée d'une cuisine et un salon au rez-de-chaussée, deux chambres à l'étage, ainsi que dans l'aile de communs en retour d'équerre à l'ouest, laquelle comprend une écurie avec grenier, une chambre servant de chai et un cellier. En 1830, Marie-Anne Mingueneau se remarie avec André Augereau. Or, le testament de son premier mari, Pierre Guérin, en 1828, lui laissait l'usufruit de ses biens (dont sa demeure) à condition qu'elle ne se remarie pas. Un accord est trouvé entre Marie-Anne Mingueneau et son fils, Théodore Guérin (1812-1892). Elle reste alors dans la demeure de son défunt mari, jusqu'à ce que son fils se marie, en 1833, avec Marie-Véronique Alligné. Marie-Anne Mingueneau et son second époux, André Augereau, vont alors vivre dans une autre demeure détenue par la famille (12 rue de la Fontaine). Théodore Guérin et son épouse restent les seuls occupants de la demeure familiale. Maire de Vix en 1848 puis de 1852 à 1870 et de 1872 à 1877, Théodore Guérin est un des principaux notables et propriétaires fonciers de la commune pendant la seconde moitié du 19e siècle.

Evolution de la partie orientale (60 rue Georges Clemenceau) jusqu'au milieu du 19e siècle

En 1707-1708, la partie orientale de la demeure de Pierre Garos a été attribuée par celui-ci à son fils aîné, François-Luc Garos de la Commerie qui y habite. Elle passe ensuite à son propre fils, François Garos, sieur de la Commerie, marchand et bourgeois de Vix en 1733, époux de Marie-Suzanne Grignon. C'est à lui qu'elle appartient en 1735 lorsque l'abbesse de Saintes autorise la construction d'un four et d'un pigeonnier dans le jardin (voir ci-dessus). La partie orientale de la propriété passe ensuite à ses fils, Benjamin et Louis-Etienne Garos, négociants à Marans. Les 20 octobre et 17 novembre 1798, leurs héritiers se partagent leurs biens. La partie orientale de la propriété est attribuée à l'un des enfants de Benjamin, Catherine-Françoise Garos, épouse de François Arrivé, négociant à Marans. Dans les années qui suivent, il se défait des dépendances le long de la grande rue. Une partie sera démolie en 1909 pour dégager l'entrée du chemin qui mène à l'arrière des bâtiments ; une autre fera place à une maison (66 rue Georges Clemenceau).

C'est aussi vers 1800 que la partie orientale de la demeure est vendue par les héritiers Garos à André Simonneau (1769-1855), cultivateur, époux de Françoise Guillon, celui-là même qui, à la même époque, achète à Pierre Guérin-Gaudineau une partie des dépendances le long de la grande rue (voir ci-dessus). André Simonneau procède au partage de biens dès 1836, après le décès de son épouse, entre leurs filles et gendres. La partie orientale de la demeure est alors subdivisée en deux. La portion la plus à l'est (parcelle 977) échoit à Jean Duverdier, époux de Rose Simonneau (elle forme l'actuel 64 rue Georges Clemenceau). La portion la plus à l'ouest (parcelle 979), qui partage l'escalier central de la demeure avec la partie occidentale détenue par Théodore Guérin, échoit à Augustin Mion époux de Véronique Simonneau. Augustin Mion la revend en 1849 à Théodore Guérin : les deux parties du logis, séparées depuis 1707, sont ainsi de nouveau réunies.

La demeure de la famille Guérin-Sensenbrenner, puis un atelier et un garage automobile

Réunifiée, l'ancienne demeure de Pierre Garos sert désormais de logis à Théodore Guérin et à son épouse, Marie-Véronique Alligné. Celle-ci décède en 1885, suivie de son mari en 1892, tous deux sans enfants. Une grande partie des nombreux biens de Théodore Guérin, dont sa demeure, échoit alors à sa demi-soeur, Marie-Thérèse Augereau. Née en 1830, elle est la fille de Marie-Anne Mingueneau, veuve de Pierre Guérin, remariée un mois après la naissance de sa fille avec André Augereau, de 13 ans son cadet, ancien tailleur d'habits devenu par cette union propriétaire rentier. En 1848, Marie-Thérèse Augereau a épousé Frédéric-Etienne Sensenbrenner (1803-1885), de 27 ans son aîné, originaire de Prusse, percepteur des contributions directes à Montaigu. Après la mort de son seul fils en 1876, le mariage de ses quatre filles, puis le décès de son mari en 1885, Mme Sensenbrenner se retire dans sa demeure à Vix, qu'elle partage d'abord avec son demi-frère Théodore Guérin jusqu'à la mort de celui-ci en 1892. Elle vit ensuite en la seule compagnie de sa domestique et cuisinière, Olympe Guillon, jusqu'à sa mort survenue le 2 mai 1921. Ses biens sont alors dispersés aux enchères.

En 1924, la demeure est achetée par Gabriel Pouzin (1882-1964), époux de Marie Renou, commerçant, marchand d'oeufs. Une partie est occupée dans les années 1930 par son gendre, Georges Renoux, boucher, époux de Sarah Pouzin. Dans la seconde moitié du 20e siècle, la demeure est à nouveau divisée en deux. André Deffe, peintre, acquiert la moitié orientale du logis en 1952.

Entre temps, dès les années 1930, l'ancienne aile de communs à l'ouest de la cour est transformée en un atelier d'artisan. Jules Fernand, menuisier ébéniste, y tient son activité. Une porte de style Art Nouveau est percée dans le mur pignon nord, ouvrant sur la grande rue et la place. Dans les années 1980, un garage automobile remplace cet atelier (il quittera les lieux en 2018). Il vient masquer la partie occidentale du logis. Le portail à piliers maçonnés qui marquait l'entrée de la cour sur la grande rue, disparaît aussi à cette occasion.

  • Période(s)
    • Principale : 4e quart 17e siècle
    • Secondaire : 2e moitié 20e siècle
  • Dates
    • 1687, porte la date

Cette ancienne demeure, située au coeur du bourg, est aujourd'hui à la fois divisée en plusieurs propriétés et en partie masquée par des bâtiments plus récents, notamment un ancien atelier de menuiserie puis garage automobile. A l'origine, la propriété était délimitée sur la rue, au nord, par un muret avec portail et grille, et des communs s'étiraient sur le côté ouest de la cour. De ces communs, il ne reste qu'une petite partie accolée au logis. Elle présente des traces d'ouvertures murées. Un jardin, également clos de murs, se trouvait à l'arrière du logis, au sud.

Le logis est, depuis le 19e siècle, partagé en deux parties, auxquelles s'ajoutaient la maison voisine (64 rue Georges Clemenceau). L'ensemble est couvert d'un toit à croupes, souligné par une mince corniche pour la partie est, à débordement pour la partie ouest. La façade du logis dans son entier présente au total quatre travées d'ouvertures. La porte seule observée sur la partie est est peut-être le dernier témoin d'une cinquième travée. La travée qui comprend la porte principale, à sa droite, aurait alors constitué l'axe de symétrie de la façade, ouvrant sur une cage d'escalier centrale. Celle-ci comprenait encore vers 1970 un escalier en bois, rampe sur rampe et sans jour central, avec balustres moulurées.

Sur la façade, chaque travée d'ouvertures est constituée d'une baie au rez-de-chaussée, d'une autre, tout aussi large, à l'étage, avec appui mouluré à denticules, et d'une petite baie horizontale au niveau du comble, là encore avec appui mouluré à denticules. La travée qui comprend la porte principale est couronnée par le fronton de la fenêtre passante. Ce fronton, en arc segmentaire, est orné de trois amortissements. Quant à la porte principale, elle est surmontée d'une corniche et d'un autre fronton, triangulaire cette fois. Le décor de la corniche et du fronton, mouluré et à denticules, rappelle celui des autres baies de la façade. Au centre du fronton, un oculus, aveugle (ouvert à l'origine ?), est surmonté d'une date inscrite, 1687. Celle-ci semble entourer un motif sculpté, désormais illisible.

  • Murs
    • calcaire moellon enduit
  • Toits
    tuile creuse
  • Couvrements
  • Couvertures
    • toit à longs pans
  • Typologies
    Maison indépendante ; Maison de maître ; 4/5
  • Statut de la propriété
    propriété privée

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Charente-Maritime, 3 E 26/112, fol. 1. 1687, 23 décembre : procuration passée par Pierre Garos au profit de Fortin de Labeyrie, curé de Vix, pour passer bail à ferme de la seigneurie de Vix avec l'abbesse de Saintes.

  • Archives départementales de la Charente-Maritime, 3 E 26/132, fol. 33. 1708, 20 mars : bail à ferme de la seigneurie de Vix par l'abbesse de Saintes à François-Luc et Pierre-Fort Garos.

  • Archives départementales de la Charente-Maritime, 3 E 26/440. 1735, 27 avril : autorisation donnée par l'abbesse de Saintes à René Denfer de Haute-Roche et François Garos son épouse, de construire un four et un pigeonnier sur leur propriété, à Vix.

  • Archives départementales de la Charente-Maritime, 3 E 66/523. 1798, 20 octobre (29 vendémiaire an 7) : partage de biens entre les héritiers de Benjamin et Louis-Etienne Garos ; 1798, 17 novembre (27 brumaire an 7) : partage de biens entre les héritiers de Benjamin Garos.

  • Archives départementales de la Vendée, 3 E 36/151. 1734, 9 juin : vente de la moitié d'une propriété à Vix par Charlotte Garos veuve Nicolle à René Denfer de Haute-Roche, devant Masson, notaire à Fontenay-le-Comte.

  • Archives départementales de la Vendée, 3 E 37/F. 1707, 6 mai : testament de Pierre Garos, à Vix, devant Me David Ballard, notaire à Fontenay-le-Comte.

  • Archives départementales de la Vendée, 3 E 52/46. 1801, 29 janvier (7 pluviôse an 9) : vente d'une propriété à Vix par André PIet-Roquépine et Catherine Denfer à Pierre Guérin ; 1801, 8 mars (15 ventôse an 9) : vente de dépendances à Vix par Pierre Guérin à Louis Mion et à André Simonneau.

  • Archives départementales de la Vendée, 3 E 63/85. 1827, 15 mars : inventaire après décès des biens de Pierre Guérin époux Mingueneau, à Vix.

  • Archives départementales de la Vendée, 3 E 63/88. 1830, 22 octobre : accord entre Marie-Anne Mingueneau veuve Guérin et THéodore Guérin au sujet de la jouissance d'une demeure à Vix.

  • Archives départementales de la Vendée, 3 E 63/90. 1833, 20 octobre : accord entre Marie-Anne Mingueneau épouse Augereau et Théodore Guérin au sujet de la jouissance d'une demeure à Vix, modifiant l'accord du 22 octobre 1830.

  • Archives départementales de la Vendée ; 3 P 3392 à 3401, 3725 (complétés par les registres conservés en mairie). 1837-1971 : état de section et matrices des propriétés du cadastre de Vix.

Documents figurés

  • Plan cadastral de Vix, 1836. (Archives départementales de la Vendée ; 3 P 303).

Date(s) d'enquête : 2019; Date(s) de rédaction : 2019
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
(c) Conseil départemental de la Vendée
Suire Yannis
Suire Yannis

Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée à partir de 2017.

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