Dossier d’œuvre architecture IA85003244 | Réalisé par
Suire Yannis (Contributeur)
Suire Yannis

Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée à partir de 2017.

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
  • inventaire topographique, Vallée de la Sèvre Niortaise, Marais poitevin
Marais communal du Mazeau
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
  • (c) Conseil départemental de la Vendée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Vallée de la Sèvre Niortaise, Marais poitevin
  • Commune Le Mazeau
  • Lieu-dit le Communal
  • Cadastre 1835 D 383, 523  ; 2023 D 2, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 751, 754
  • Dénominations
    ensemble non identifié
  • Parties constituantes non étudiées
    canal, chemin, pont

Un droit d'usage et de pacage qui remonte au Moyen Age

Au Mazeau comme dans les villages voisins de Benet, Sainte-Christine et Coulon, l’exploitation des marais par les habitants passe dès le Moyen Age par le bénéfice des marais communaux octroyés par le seigneur de Benet. En 1235, Raoul II de Lusignan, seigneur de Benet, concède à l’abbaye de Maillezais le tiers du droit de pacage qu’il possède à Benet, Sainte-Christine et dans les marais de Nauvert. Le 3 mars 1471, Hardouin IX de Maillé, seigneur de Benet, passe transaction avec les habitants de Benet leur accordant l’usage et le pacage des marais communs. Confirmée le 15 juillet 1517 par Jean V de Hautmont, seigneur de Benet, cette transaction concerne des marais entre Magné, Coulon, Benet, Sainte-Christine, Le Mazeau et Damvix (marais du Cerf-Volant, des Jumeaux, des Vaches, des Petits Avis, de Mouron, des Nattes). Le marais communal de Benet s’étend dès lors en partie sur l’est des marais de la commune actuelle du Mazeau, à l’est du fossé du Pavillon, et sur le Grand Marais de Benet ou marais de la Grande Mothe. Le seigneur se conserve l’usage de 100 quartiers ou journaux de marais, situés notamment dans les marais de l’Orgesse. En échange du droit communal, les habitants devront verser au seigneur une redevance de 4 sols de cens par feu pour les hommes et 2 pour les femmes, et fournir le bois nécessaire au fonctionnement des fours banaux de Benet. A cette transaction avec les habitants de Benet, s’en ajoute une autre, passée oralement en 1476 entre Hardouin de Maillé et les habitants du Mazeau. Confirmée par écrit le 11 juillet 1488, elle leur accorde le droit d’usage et de pacage des marais situés "entre Coulon et l’Esgagerie".

Ce droit est essentiel pour les habitants qui en rendent par exemple déclaration au roi le 1er août 1634. Il est pourtant régulièrement l’objet de litiges, ses contours et ceux du territoire concerné restant relativement flous. Au XVIIIe siècle, un contentieux s’élève avec le seigneur de Benet, qui est alors Philippe de Lezay de Lusignan, au sujet de la clause de la transaction de 1471 qui oblige les habitants à fournir le bois aux fours banaux, obligation mal observée. Les habitants sont d’abord déboutés en 1754, un accord intervient en 1770, confirmant l’autorité seigneuriale, mais un nouveau litige se fait jour lorsque les habitants prétendent ne fournir que du bois de roseau. Lusignan proteste et fait estimer le préjudice qui se monte en 1787 à 85000 livres.

Heureusement pour les habitants, la Révolution vient suspendre le conflit. Le hameau du Mazeau est rattaché à la commune de Saint-Sigismond, en formant une des deux sections. Le seigneur de Benet, Philippe de Lusignan émigre (il meurt à Liège, en Belgique, en 1802), de même que son fils et héritier, Hugues Thibaud Henri Jacques de Lezay de Lusignan, dernier du nom, ancien colonel du régiment de Flandre, député de la noblesse de Paris en 1789. De retour en 1800, il meurt en 1814 après avoir légué ses biens par testament, établi en 1804, à ses proches parents, les familles Lafayette et Turpin de Crissé.

Le procès avec les Lusignan et la princesse de Beauvau-Craon

En ce début du XIXe siècle, la propriété et le bénéfice des marais communaux de Benet et du Mazeau sont à nouveau au cœur de plusieurs contentieux. Octroyés trois siècles plus tôt par les seigneurs de Benet, ces marais se retrouvent maintenant à cheval sur les communes de Saint-Sigismond, Benet et Coulon, entre deux départements. Côté Coulon, de nouveaux habitants, de plus en plus nombreux, s’établissent le long de la Sèvre et entendent bénéficier des marais entre Coulon et Le Mazeau. Par ailleurs, les héritiers Lusignan revendiquent 1134 hectares dans les marais en question, rappelant que les biens de leur légataire n’ont jamais été confisqués à la Révolution. En 1845, ils assignent les communes de Benet, Lesson et Le Mazeau pour recouvrer la propriété de leurs terres. Après avoir obtenu gain de cause devant le tribunal de Niort en 1848, les communes sont en partie déboutées en appel à Poitiers le 25 février 1850. Condamnées à payer les frais de procédure, ce qui va considérablement entamer leurs finances, elles obtiennent pourtant le tiers des marais en valeur (et non en superficie). Est ainsi notamment constitué le marais communal du Mazeau, compris entre le Vieux bief et le fossé de séparation d'avec le communal de Benet (actuel fossé du Pavillon). Les héritiers Lusignan récupèrent 500 hectares, en particulier le marais de Benet (à l’est du fossé du Pavillon) et le marais de la Motte d’Auvergne.

L’affaire n’est pourtant pas terminée puisqu’une partie de l’héritage Lusignan est revendiqué par Ugoline du Cayla, princesse de Beauvau-Craon. Elle remporte en 1855 et 1857 le procès mené contre les autres héritiers, et obtient ainsi d’importantes superficies dans le marais de Benet, à l’est du Mazeau, notamment. C’est là, à l’angle est formé par le fossé du Pavillon et le chemin de halage de la rigole de la Rive droite, qu’elle se fait construire en 1871 une petite résidence secondaire, au milieu d’un parc aménagé, résidence appelée le Pavillon (le canal qu'elle jouxte prend alors ce nom). Après sa mort survenue en 1885, ses biens sont vendus aux enchères en 1895. Entre temps, les autres héritiers Lusignan ont aussi vendu leurs marais (marais de Benet et de la Motte d’Auvergne notamment), ainsi dispersés en une foule de propriétaires. Leur mise en valeur, notamment pour l’élevage et l’exploitation de peupliers, engendre la mise en place d’un nouveau paysage fait de grandes parcelles quadrangulaires, losangiques, des prairies délimitées par des alignements d’arbres.

Une mode d'exploitation original

Ainsi délimité, le marais communal du Mazeau, d’une superficie de 52 hectares, est géré par la commune de Saint-Sigismond puis celle du Mazeau à partir de la seconde moitié du XIXe siècle. Les personnes domiciliées au Mazeau peuvent bénéficier de parcelles du marais ou « tâches », attribuées régulièrement selon un mode original d’exploitation. Chaque année, le premier dimanche après le 25 mars, une petite partie, soit 19 parcelles en jardins, appelées « tâches jardinières », est mise aux enchères (elle s’étend au plus près du bourg, sur l’actuel terrain de camping). Le reste, soit la majeure partie du communal, est divisée en quatre sections, elles-mêmes partagées en petites tâches rectangulaires, en lanières, d’environ 15 ares chacune, délimitées par des piquets-repères. Ces tâches sont attribuées au cours d’un tirage au sort organisé tous les six ans, le premier dimanche après le 25 mars. On tire d’abord au sort la lettre initiale qui désigne le premier attributaire, lequel tire ensuite le numéro de tâche. Libre d’exploiter la parcelle comme il l’entend (généralement en maraîchage ou en coupe de l’herbe pour le fourrage), le bénéficiaire doit verser une redevance de 1000 francs pour trois des quatre sections du marais, 500 pour la quatrième dont le sol est de moins bonne qualité. Certaines parcelles sont réservées aux employés communaux et aux fonctionnaires : la parcelle 1 est assignée à l’école, la 2 à la poste, la 56 au garde-champêtre, la 57 à l’école du Village de la Sèvre.

En 1962, 200 chefs de famille du Mazeau participent au tirage au sort du communal dont les tâches, jugées trop petites, trouvent cependant déjà de plus en plus difficilement preneur. En 1965, 88 tâches sont regroupées en 11 lots, loués aux enchères dans un premier temps, puis à prix fixe. On espère ainsi les rendre plus attractives. Le communal et son mode d’exploitation correspondent pourtant de moins en moins aux exigences de l’agriculture moderne intensive, dans laquelle l’élevage et le bois ont de moins en moins de place. La fermeture de la laiterie en 1976 est le signe de ce basculement économique, donc foncier et paysager. En 1980-1981, la municipalité ouvre un camping et une pêcherie sur les anciennes tâches jardinières, et entreprend dès les années 1970 de planter le communal en peupliers pour mieux tirer parti de la ressource forestière. Ce projet est mis à mal par la tempête de décembre 1999 qui anéantit le couvert forestier des marais du Mazeau. Dans les années 2000, une opération de réhabilitation du communal en prairies est menée de concert avec le Parc interrégional du Marais poitevin. Le communal retrouve alors un paysage plus ouvert.

  • Période(s)
    • Principale : Moyen Age

Le marais communal se trouve au cœur des marais mouillés du Mazeau, entre le bourg et la rigole de la Rive droite au nord et les abords du Village de la Sèvre au sud. Il est délimité à l'ouest par le canal du Vieux Bief et la route qui le longe, et à l'est par le fossé du Pavillon. Le canal du Nouveau Bief le traverse du nord au sud. Franchi par deux ponts et des chemins d'exploitation, il est connecté à un réseau de canaux secondaires et de fossés. Le paysage, ouvert, est formé de prairies avec des alignements d'arbres (peupliers, frênes) en arrière-plan. Une petite partie du communal, au nord-ouest, est occupée depuis le début des années 1980 par un terrain de camping et une pêcherie.

  • Couvrements
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Vendée ; 3 P 1540 à 1545 (voir aussi l'exemplaire en mairie). 1889-1935 : état de section et matrices des propriétés du cadastre du Mazeau.

  • Archives départementales de la Vendée ; 3 P 3024 à 3032, 3696 et 3697. 1835-1889 : état de section et matrices des propriétés du cadastre de Saint-Sigismond.

Bibliographie

  • AILLERY, E., abbé. Chroniques paroissiales, 1903-1904.

    tome 5, p. 624-643 (Saint-Sigismond)
  • BOUHIER, Abel. Les communaux de la partie orientale du Marais poitevin, Norois, n° 49, 13e année, janvier-mars 1966.

    p. 14-16
  • CLOUZOT, Etienne. Les marais de la Sèvre Niortaise et du Lay du Xe à la fin du XVIe siècle. Paris : H. Champion éditeur ; Niort : L. Clouzot éditeur, 1904, 282 p.

    p. 152

Documents figurés

  • Plan cadastral de Saint-Sigismond (comprenant Le Mazeau), 1835. (Archives départementales de la Vendée ; 3 P 269).

  • Plan cadastral rénové du Mazeau, 1936. (Archives départementales de la Vendée ; 1741 W 139).

Date(s) d'enquête : 2023; Date(s) de rédaction : 2023
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
(c) Conseil départemental de la Vendée
Suire Yannis
Suire Yannis

Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée à partir de 2017.

Cliquez pour effectuer une recherche sur cette personne.
Articulation des dossiers