L'histoire de ces trois maisons est plus complexe qu'il n'y parait. Il semble ne rien subsister des bâtiments dessinés à cet emplacement sur le plan cadastral napoléonien de 1834, et propriété d'un certain Touallié, marchand de bois et aubergiste. Les matrices cadastrales font état de nombreuses modifications par divers propriétaires qu'il est difficile de resituer avec précision : une démolition et une nouvelle construction enregistrée en 1851, une nouvelle construction en 1876 (enregistrée en 1879), des diminutions et augmentations de construction en 1876, 1878, 1882 (enregistrées respectivement en 1879, 1881 et 1885). Néanmoins, l'agrandissement successif des bâtiments est perceptible à travers les pilastres de brique, les différences d'ouvertures et de corniches. Ainsi, d'une partie centrale peut-être réédifiée dès le milieu du XIXe siècle, on aurait ajouté le passage couvert à droite et reconstruit les bâtiments sur la gauche, pendant le 4e quart du XIXe siècle.

Au cours des années 1880, l'ensemble devient la propriété, semble-t-il à coups de rachats successifs, de Léon Chartrain, ancien verrier à la Pierre puis directeur d'une confection de lingerie. On sait peu de chose de cette usine, si ce n'est qu'elle fut créée peu avant 1875, date à laquelle elle employait une centaine d'ouvrières, selon une délibération du conseil municipal, puis seulement une trentaine quelques années plus tard. En 1875 et 1881, l'entreprise déclare à l'administration des machines à vapeur faisant fonctionner des cylindres pour la fabrication de lingerie et des machines à repasser les étoffes. Installant vraisemblablement son activité dans ces bâtiments, Léon Chartrain en fait démolir une partie pour édifier en 1882 une grande maison patronale à cinq travées (actuellement n°35), comme le confirment les matrices cadastrales (enregistrement en 1885). Un plan d'alignement de 1888 confirme qu'il est alors propriétaire de l'ensemble des bâtiments. Cet établissement industriel, le plus important de la commune après la verrerie, disparait dans les années 1890 ou 1900. Si les époux Chartrain continuent à demeurer en leur maison, les autres bâtiments sont revendus.

Ainsi, l'actuel n°33, stratégiquement posté au carrefour central du bourg et dans l'axe de la gare, devient le café de la Gare encore attesté par les enseignes peintes en façade. La plus ancienne, la rouge, est celle de l'aubergiste et cafetier Léopold Buisard, mentionné dès 1906 dans les recensements de population. La seconde, la noire, est celle du cafetier Eugène Clément, attesté à partir de 1921. Les inscriptions de l'étage "RESTAURANT" et "BILLARD" sont plus tardives et sans doute du milieu du XXe siècle. D'autres boutiques sont attestées dans la partie gauche par les cartes postales du début du XXe siècle : une savonnerie Papillon, ainsi qu'un cordonnier Pichard. Aujourd'hui, les bâtiments n'ont plus de vocation commerciale ou industrielle et abritent trois maisons. Les rez-de-chaussée ont été partiellement remaniés dans le 4e quart du XXe siècle : percement d'une porte de garage au n°35, transformation d'une porte en fenêtre au n°33, réfection du perron au n°31.