Dossier d’œuvre architecture IA53004424 | Réalisé par
Barreau Pierrick (Contributeur)
Barreau Pierrick

Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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  • enquête thématique départementale, rivière Mayenne
Demeure de villégiature dite château, la Chaussonnerie
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Mayenne - Saint-Berthevin
  • Commune Saint-Jean-sur-Mayenne
  • Lieu-dit la Chaussonnerie
  • Cadastre S. d. B2 56  ; 2021 B 897 à 899
  • Dénominations
    demeure
  • Précision dénomination
    demeure de villégiature
  • Parties constituantes non étudiées
    communs, écurie, sellerie, remise, cour, parc, bassin, mur de clôture, portail, chapelle

Une maison de maître disparue

Aucune seigneurie n'est signalée par les archives à la Chaussonnerie, où il existait une maison de maître et une ferme appartenant, au début du XIXe siècle, à Pierre-Dieudonné Manisse, notaire à Laval, mises en vente suite à son décès. On trouve ainsi dans l'Indépendant de l'Ouest, en 1851, l'annonce suivante : "A vendre aux enchères publiques la belle terre de la Chaussonnerie, située commune de Saint-Jean-sur-Mayenne [... comprenant] : "une maison de maître avec remises, écuries, cour, jardin anglais, jardin potager, douves, avenues de tilleuls et d'ormeaux [...], la métairie de la Chaussonnerie, bâtiments nouvellement construits, cour, jardin, d'une contenance de 28 hectares 82 ares de terre labourable et de 8 ha 30 ares de pré, la métairie de la Chabossière, bâtiments nouvellement construits [...], la métairie de la Réauté, bâtiments nouvellement construits [...], la closerie des Fosses, bâtiments d'habitation et d'exploitation, deux jardins". La constitution de cet important domaine n'est pas documentée. Toutefois, le renouvellement du bâti des métairies indique que Pierre Manisse s'était largement investi dans la modernisation de ses exploitations agricoles au cours du 2e quart du XIXe siècle.

La maison de maître est décrite plus précisément dans les documents de la succession du notaire Manisse : "elle forme deux corps de bâtiments, l'un se compose d'une salle à manger, d'un grand salon et d'une cage d'escalier au rez-de-chaussée, de trois chambres à feu et d'un cabinet reliés par un corridor au premier, de trois mansardes et d'un cabinet reliés également par un corridor au second ; l'autre est au bout et comprend au rez-de-chaussée un petit vestibule où est fixé l'escalier, une petite salle au bout communiquant par une porte à la salle à manger du premier bâtiment, cuisine à côté de ces deux objets, une laverie, un petit corridor ensuite, décharge de cuisine, cave et toit à porcs par derrière, au premier sur la salle une chambre sans cheminée, sur la cuisine une chambre à feu, sur la laverie une petite chambre froide, sur la décharge une antichambre, sur le caveau un cabinet ; grenier sur tous ces appartements". D'après le cadastre napoléonien du début du XIXe siècle (1811 ?), la maison de maître et la métairie, orientés au sud, occupaient l'emplacement de la ferme actuelle, mais il n'en reste aucun vestige.

La construction du château

Le premier à se porter acquéreur de la terre de la Chaussonnerie est le médecin lavallois Anselme Lévesque de la Bérangerie, qui constitue au même moment un important domaine autour d'Orange, sur la rive opposée de la Mayenne, où il se fait élever un château. L'adjudication est toutefois emportée par René Gombert de Pontenard. Le château actuel est édifié pour le gendre de ce dernier, Prosper-Victor Gaultier de Vaucenay (1819-1894), avocat à Laval, y résidant rue du Mans, puis député légitimiste de la Mayenne en 1871. La branche Gaultier de Vaucenay est issue de la dynastie Gaultier, famille de riches marchands tissiers lavallois au XVIIe siècle, anoblie par l'acquisition de la seigneurie de Vaucenay à Argentré. Au début du XVIIIe siècle, Mathurin Gaultier, conseiller du roi et avocat au siège royal et de la maréchaussée de Laval, possédait en cette ville l'hôtel de Vaucenay. Au milieu du XVIIIe siècle, François-Marie Gaultier, sieur de Vaucenay, portait les titres d'écuyer, conseiller du roi et contrôleur ordinaire des guerres.

Selon les matrices cadastrales, les travaux de la Chaussonnerie débutent par la chapelle, déclarée imposable en 1859. Le château, construit ex-nihilo à l'est de la ferme, est commencé en mars 1863 et achevé fin 1864, puis porté au registre des matrices en 1868. Les écuries et remises sont achevées en 1867. Les nouveaux bâtiments sont implantés à l'est des bâtiments existants, le château est positionné dans l'axe du vallon et orienté vers la vallée de la Mayenne, à l'est. L'ancienne métairie sera remplacée par de nouveaux bâtiments de ferme à une date inconnue.

Les comptes de M. Gaultier de Vaucenay indiquent l'intervention de l'architecte lavallois Eugène Boret (1805-1881), originaire de Saumur et père d'Edouard Boret, également architecte et inspecteur des édifices diocésains de 1868 à 1877. Sont également intervenus sur le chantier : l'entrepreneur en maçonnerie Boissière, Bigot père et fils charpentiers, Joubert serrurier, Huet ferblantier, Bastard menuisier, Bouhours marbrier, Joniaux pompier et fumiste, Deschamp sculpteur, Decret tapissier, Pilon horloger. L'aménagement du jardin est confié au terrassier Huard et au jardinier Laraze. La métairie est reconstruite à une date inconnue. En 1894, on inaugure une statue de la Vierge en fonte placée dans le parc. La même année, la chapelle est dotée d'un chemin de croix. L'environnement du château est remodelé, de nouveaux chemins sont créés pour desservir les fermes du domaine, comme la Chaussonnerie, la Réauté, les Fosses ou la Chabossière.

Le jumeau d'Orange

La référence architecturale au château voisin d'Orange, achevé en 1854 et attribué à l'architecte Pierre-Félix Delarue, est évidente. D'après l'oralité, la construction du château de la Chaussonnerie était initialement projetée sur la butte dite "camp des Français", faisant face à celle d'Orange, dite "camp des Anglais" (le fondement historique de ces appellations, en référence à la guerre de Cent Ans, est douteux). Les difficultés à obtenir de l'eau sur la butte auraient finalement conduit M. Gautier de Vaucenay à construire son château en retrait de la vallée. Seule une statue de Jeanne d'Arc fut placée en 1894 au "camp des Français" ; le site est aujourd'hui occupé par une carrière. Il est intéressant de noter que le commanditaire d'Orange, Anselme Lévesque de la Bérangerie, s'était en vain porté acquéreur pour la terre de la Chaussonnerie : une compétition territoriale, puis architecturale, fut-elle de mise entre les commanditaires des deux châteaux ? S'agissait-il au contraire de composer un paysage grandiose avec deux châteaux jumeaux en vis-à-vis de part et d'autre de la Mayenne ? Malgré de nombreuses similitudes, le château de la Chaussonnerie présente une façade plus grande de deux travées que celui d'Orange, mais possède également une silhouette plus massive et moins élégante.

Propriété du fils puis du petit-fils de Victor Gaultier de Vaucenay, Edmond et Georges, le château échoit ensuite au neveu et filleul de ce dernier, Roland Dulong de Rosnay, officier de la marine marchande, époux de Jeanne Gaultier de Vaucenay. Pendant la Seconde guerre mondiale, le château de la Chaussonnerie est tour à tour occupé par un PC britannique, puis par les officiers de la garnison allemande de Laval, puis par les troupes américaines.

Le château est niché au fond d'un amphithéâtre naturel orienté vers la vallée de la Mayenne. Placé au sommet du coteau, il bénéficie d'une vue dégagée aussi bien en direction de la vallée à l'ouest, que vers la campagne à l'est. Bien que la demeure ait sa façade principale orientée vers la Mayenne, elle en est trop éloignée pour apercevoir la rivière.

La demeure est construite en moellons enduits ; la pierre de taille calcaire est réservée aux angles, aux encadrements des baies et aux décors d'architecture. Le soubassement et les perrons sont en pierre de taille de granite. Le château présente un plan rectangulaire avec trois avant-corps en faible saillie, couverts en croupe, donnant l'illusion de pavillons : l'un au centre de la façade sur le parc, les deux autres aux extrémités de la façade sur cour. Chaque façade compte sept travées, les angles côté ouest sont cantonnés de deux tours d'angles coiffées de poivrières. Un bandeau et une corniche à modillons structurent horizontalement la composition, tandis que les angles sont traités en bossages. Les ouvertures, en arc segmentaire, possèdent des encadrements et appuis moulurés, des agrafes ou des larmiers. La porte côté cour est sommée des armoiries Gaultier de Vaucenay et Guyard (?). Des lucarnes en pierre et des œils-de-bœuf en zinc éclairent le comble. Les hautes souches de cheminées sont en brique et en pierre.

Edifiés au nord du château, les bâtiments des écuries et remises sont ordonnancés autour d'une cour carrée accessible par un passage couvert coiffé d'un pavillon. Le potager clos est attenant. A proximité se trouve la chapelle. La cour précédant le château est close d'un mur surmonté d'une grille, interrompu par un portail à piliers. Le parc comprend des espaces boisés au nord et au sud du château, ainsi qu'une prairie dans le vallon qui descend en pente douce devant la façade ouest. Dans la partie basse est aménagé un vaste bassin carré aux angles coupés. Ouvert sur la campagne environnante, le parc est ceinturé de simples clôtures et haies et contourné de chemins. La ferme de la Chaussonnerie est incluse dans cet espace.

La propriété conserve l'ancienne cloche de la chapelle de la Merveille (détruite), datée de 1639.

  • Murs
    • pierre moellon enduit
  • Toits
    ardoise
  • Étages
    sous-sol, rez-de-chaussée surélevé, 1 étage carré, étage de comble
  • Couvrements
    • charpente en bois apparente
  • Élévations extérieures
    élévation ordonnancée, élévation à travées
  • Couvertures
    • toit à longs pans croupe
  • État de conservation
    bon état, restauré
  • Techniques
    • sculpture
  • Représentations
    • armoiries
  • Précision représentations

    Armoiries sculptées au-dessus de la porte d'entrée.

  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne privée

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 E 9/488. Adjudication de la succession de Pierre Manisse, incluant la terre de la Chaussonnerie à Saint-Jean-sur-Mayenne, 1er février 1851.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 396, 397, 702, 1628. Matrices cadastrales, registres des augmentations et diminutions de construction de la commune de Saint-Jean-sur-Mayenne, XIXe-XXe siècles.

  • Archives privées. Comptes de Victor Gaultier de Vaucenay pour la construction du château de la Chaussonnerie, à Saint-Jean-sur-Mayenne, 3e quart XIXe siècle (dossier Fondation du Patrimoine).

Bibliographie

  • ANGOT, Alphonse (abbé). Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne. Laval : Goupil, 1902.

  • ANGOT, Alphonse. La Mayenne : sites, monuments et souvenirs du département.

  • GUEDON, Isidore. Laval et ses environs, guide de l'étranger, 1897.

    p. 186
  • Le patrimoine des communes de la Mayenne. Paris : Éditions Flohic, 2002.

Périodiques

  • L'indépendant de l'Ouest, 10 janvier 1851.

    p. 4

Documents figurés

  • Collection de cartes postales anciennes des communes de la Mayenne. (Archives départementales de la Mayenne ; 5 Fi).

  • Plan cadastral napoléonien de Saint-Jean-sur-Mayenne, 1811 (?). (Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 2817).

Date(s) d'enquête : 2021; Date(s) de rédaction : 2021
(c) Conseil départemental de la Mayenne
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Barreau Pierrick
Barreau Pierrick

Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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