Dossier d’œuvre architecture IA49006562 | Réalisé par
Letellier-d'Espinose Dominique (Contributeur)
Letellier-d'Espinose Dominique

Letellier-d'Espinose Dominique ou Letellier Dominique, chercheur auprès de la Ville d'Angers.

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Biguet Olivier (Contributeur)
Biguet Olivier

Chercheur auprès de la Ville d'Angers jusqu'en avril 2024.

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  • inventaire topographique, Angers extra-muros
Hôtel Etienne Hervé, puis hôtel Ogeron de la Boire, puis école de charité, puis école des Frères des Ecoles chrétiennes, dit faussement hôtel du Roi-de-Pologne, actuellement institut municipal
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Angers extra-muros - Angers Centre
  • Commune Angers
  • Lieu-dit quartier Centre-ville
  • Adresse quai du Roi-de-Pologne
  • Cadastre 1999 DI 70

L'hôtel que l'on appelle improprement du Roi-de-Pologne était traditionnellement associé au duc d'Anjou et éphémère roi de Pologne, le futur roi de France Henri III. Cette dénomination erronée remonte au XIXe siècle : un dessin mal légendé du dessinateur d'origine anglaise Peter Hawke, dans son "Album des monuments de l'Anjou" vers 1838, semble être le début d'une méprise qui s'est poursuivie jusqu'à aujourd'hui. Toutes les sources convergent désormais pour appliquer cette désignation à la "maison, auberge et dépendance nommée le Roy de Pologne", appartenant en 1470 au marchand Étienne Tassin et située sans ambiguïté au bas de la montée de l'Esvière (actuelle rue Pitre-Merlaud). Et l'appellation Roi-de-Pologne renvoie en ce milieu du XVIIIe siècle au beau-père de Louis XV, le roi Stanislas Leszczynski, ex roi de Pologne devenu duc de Lorraine.

Cet hôtel est en fait redevable à un certain Étienne Hervé, probablement un négociant enrichi par une activité liée au port, qui en 1553, possédait plusieurs maisons dans ce secteur en bordure de la grève et du port de l'Esvière, en contrebas de la colline éponyme. La demeure devint ensuite celle de son fils Jean, fermier et fournisseur du grenier à sel puis de la Monnaie d'Angers, avant 1584 où ce dernier y est attesté. Elle est constituée de deux logis distincts, mais il est aujourd'hui impossible de déterminer si ces deux éléments ont été construits dans le même temps ou avec une légère différence de datation, le style architectural de la seconde Renaissance angevine étant identique ; grâce à la dendrochronologie, mais seulement d'un culot de poinçon de charpente détaché (1561d - la charpente d'origine est perdue), le corps principal peut être daté - prudemment - des débuts des années 1560. En 1602, par une vente judiciaire sur ce Jean Hervé, la demeure passa à un avocat puis à des voituriers par eau, à un charpentier, et en 1625 à la famille Ogeron de la Boire, qui acquit "la maison, court, jardin et appartenances vulgairement appelée la Maison de Jehan Hervé" - le patronyme de la famille du constructeur de l'hôtel était resté en mémoire. Bertrand Ogeron de la Boire (1613-1676) fut un fameux aventurier dans les Caraïbes, gouverneur de la partie française de Saint-Domingue et de l'île de la Tortue (partie d'Haïti). Au XVIIIe siècle, le logis devint une école pour les enfants des paroisses de l'Esvière et de Saint-Laud, puis une école de charité pour les pauvres et à partir de 1744, l'évêque Jean de Vaugirault affecta la propriété, surnommée par la suite la maison du Sabot, de Saint-Joseph ou de la Providence, à l'installation des Frères des Écoles chrétiennes. Vendu comme bien national à la Révolution, l'hôtel passa encore par plusieurs familles avant l'acquisition par la ville en 1912 de la partie gauche de l'édifice. La déchéance, déjà commencée au XIXe siècle, s'accentua au point qu'en 1937, l'immense toiture en pavillon de ce corps de logis secondaire s'effondra et celui-ci dut être rasé. Après encore des dommages, par l'explosion du pont de la Basse-Chaîne en 1944, un incendie en 1960, le corps principal droit subsistant, acquis alors par la ville, fit l'objet immédiatement d'une première restauration par l'architecte des monuments historiques Henri Enguehard puis d'une seconde en 1986 par son gendre l'architecte Guy Lamaison qui en permit l'affectation à l'association Accueil des villes françaises ; l'hôtel Étienne-Hervé est aujourd'hui dévolu à l'institut municipal.

  • Période(s)
    • Principale : 3e quart 16e siècle
  • Dates
    • 1561, datation par dendrochronologie

Le corps de logis principal subsistant, formant un bloc quadrangulaire allongé, présente un coffre de maçonnerie de moellon de schiste (mais non enduit) avec chaînages en tuffeau ; en façade, la tour d'escalier de plan rectangulaire abritant un escalier tournant à mur noyau est par contre en pierres de tuffeau appareillées. L'édifice est à un étage carré et comble à surcroît. Les couvertures sont à longs pans et pignons découverts ; la tour d'escalier est couverte en pavillon, et l'escalier en vis en encorbellement permettant de gagner la chambre haute est doté d'une couverture conique. Le rez-de-chaussée et le premier étage se subdivisent en trois pièces dont une étroite au centre qui était dépourvue de cheminée, mais à l'origine il ne devait y avoir que deux pièces. Un couloir voûté en un demi-berceau en tuffeau part de l'escalier pour desservir les pièces. Deux cheminées d'origine subsistent au premier étage, adossées aux murs-pignons, dont l'une, dans la pièce de gauche, remarquablement sculptée dans le style maniériste de scènes de la légende d'Actéon, est l'une des rares cheminées ornées de la Renaissance encore existante à Angers.

Le corps de logis gauche secondaire, disparu en 1937, était en rez-de-chaussée et un étage carré mais très bas de plafond, à deux pièces par niveau, avec les mêmes mises en œuvre de matériaux et pavillon abritant l'escalier hors-œuvre. La couverture en pavillon était à deux niveaux de comble habitables d'après les lucarnes et un immense comble perdu : la charpente, de plus de 15 m de hauteur, faisait presque le triple de hauteur de la partie maçonnée, exemple unique à Angers voire en Anjou.

  • Couvrements
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Protections
    classé MH, 1922/06/23
  • Précisions sur la protection

    (Cad.1840 78, 83) : classement par arrêté du 23 juin 1922.

  • Référence MH

L'hôtel Étienne-Hervé, encore au milieu du XXe siècle au sein d'un petit quartier ancien au bas de la colline de l'Esvière et longé d'un chemin et en bordure d'une grève descendant sur la Maine, est malheureusement aujourd'hui totalement décontextualisé, perdant progressivement dans les années 1960 son environnement bâti et désormais cerné par une voie rapide et une bretelle de rocade. Il a perdu de plus son logis secondaire, qui par son immense couverture, lui conférait une silhouette découpée particulièrement pittoresque, une apparence presque de petit château. Pour autant, l'hôtel Étienne-Hervé reste très présent dans le paysage de la Maine, meublant de sa silhouette familière aux Angevins le bas de la butte de l'Esvière.

Cet édifice si singulier comptait parmi les quelques belles demeures situées le long de la grève du Port-Ligny et de l'Esvière, au sein d'une architecture portuaire plus populaire. Ces logis, que l'on peut probablement pour la plupart attribuer à des négociants en lien avec l'activité portuaire de la Maine, dataient pour la plupart de la Renaissance au regard de l'iconographie ancienne, période faste de la construction de riches demeures à Angers : l'hôtel Étienne-Hervé en est l'ultime témoignage, présentant les caractéristiques des hôtels de la seconde Renaissance angevine : élévations en moellon de schiste, fenêtres avec moulurations plates à crossettes, bandeaux entre les niveaux, corniches à gros modillons, lucarnes à frontons triangulaires, curvilignes ou chantournées (comme ici, mais elles sont entièrement recréées ou refaites), où se niche souvent le seul décor sculpté de ces demeures à l'abord austère (ce qui n'empêche pas la présence d'une riche cheminée dans la salle principale comme ici (mais ces magnifiques cheminées de la Renaissance ont pour la plupart disparu - il n'en reste plus que trois encore en place, plus une autre remontée dans une salle de l'hôtel de ville).

Bibliographie

  • SARAZIN, André. L'hôtel du Roi de Pologne à Angers : une énigme enfin résolueLe Courrier de l'Ouest, 27 août 2004.

Périodiques

  • LETELLIER, Dominique, BIGUET, Olivier. Les hôtels particuliers de la Seconde Renaissance à Angers et le rôle de Jean Delespine. Archives d'Anjou. Mélanges d'histoire et d'archéologie angevines, 1999, n° 3.

    p. 67, 68, 78
Date(s) d'enquête : 1999; Date(s) de rédaction : 1999
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
(c) Ville d'Angers
Letellier-d'Espinose Dominique
Letellier-d'Espinose Dominique

Letellier-d'Espinose Dominique ou Letellier Dominique, chercheur auprès de la Ville d'Angers.

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Biguet Olivier
Biguet Olivier

Chercheur auprès de la Ville d'Angers jusqu'en avril 2024.

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