• inventaire topographique, Bourgs et petites cités du Perche sarthois
La Bosse : présentation du bourg
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  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

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  • Aires d'études
    Pays du Perche sarthois
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    • Commune : La Bosse

En l'absence de sources et d'éléments architecturaux probants, peu d'éléments nous permettent d'appréhender précisément la morphologie et les caractéristiques architecturales anciennes du bourg de La Bosse. Il faut donc s'en tenir à un état des lieux du XIXe siècle, qui perdure encore aujourd'hui, en faisant, le cas échéant, des digressions vers les siècles précédents. Pour imaginer le bourg ancien, nous disposons néanmoins de quelques indications mentionnées dans les sources écrites, planimétriques, ainsi qu'au travers de quelques éléments bâtis et paysagers (église, motte castrale). Lors de l'enquête de terrain, 55 bâtiments du bourg ont été recensés, constituant de fait le corpus sur lequel s'appuie l'étude. Situé au nord du bourg mais indissociable de ce dernier, le château de Mondragon a également été étudié.

Dans la perspective d'une étude d'inventaire, les documents figurés occupent une place essentielle. Pour l'Ancien Régime, nous disposons du plan-terrier de 1788. Pour les périodes récentes, nous nous référons aux plans cadastraux, particulièrement instructifs et aux plans d'alignement qui établissent, à leur manière, un lien entre les évolutions du patrimoine architectural et la morphologie urbaine du bourg. Quelques vues anciennes, cartes postales et fiches d'inventaire d'objets des musées du Mans complètent cette documentation figurée.

Enfin cette étude s'appuie sur des photographies réalisées lors de l'enquête de terrain, un relevé topographique et divers travaux cartographiques, supports privilégiés de toute réflexion patrimoniale.

Les temps anciens

Les traces les plus anciennes d'occupation connues sur la commune de La Bosse remontent aux premiers siècles de notre ère. En effet, lors de prospections pédestres réalisées dans les années 1980 par le Service régional de l'archéologie, et documentées la décennie suivante, un atelier de poterie et un four ont été localisés au lieu-dit du Parc-aux-Bœufs, au sud du bourg. De nombreux fragments de poterie y ont été collectés. Il s'agit pour l'essentiel de pots destinés à la cuisson, d'assiettes, bols et cruches dont les couleurs varient du bleu foncé au gris dues à des modes de cuisson spécifiques. On retrouve des céramiques de ce type du IIe siècle à la première moitié du IVe siècle en Sarthe. La quantité de céramiques trouvées sur les parcelles prospectées révèle une production très importante, et parmi les ateliers de poteries connus aujourd'hui à l'échelle du département, celui de La Bosse est considéré comme l'un des plus importants et prolifiques. En effet, situés à proximité de deux voies romaines majeures reliant Le Mans à Évreux et Chartres, les ateliers de La Bosse semblent avoir largement diffusé leur production sur le territoire cénoman. De plus, la proximité avec les gisements d'une argile blanche (kaolinite), d'une grande qualité plastique propice à la réalisation de céramique étanche et résistante à la cuisson, a également facilité le développement de ce site. À ce jour, La Bosse est l'un des sites ayant fourni le plus de renseignements sur la production de poteries en Sarthe. Des fouilles au Mans (place des Halles, Etoile-Jacobins et résidence Beauregard) dans les années 1990 ont notamment mis au jour un bon nombre de céramiques (pots divers, bols à collerette, urnes et petits plats) datées par les spécialistes du 2e quart du IIe siècle et attribuées aux ateliers de La Bosse.

Un bourg castral

L'examen de la topographie, de la forme urbaine, du réseau viaire, du parcellaire et de certains éléments du bâti permet de dresser à grand trait une certaine morphogénèse du bourg autour des XIe-XIIIe siècles.

Il existe plusieurs types de bourgs paroissiaux : La Bosse semble appartenir au type de bourg dont la paroisse s'est identifiée à un domaine seigneurial, contrairement à certains bourgs formés par des colons autour d'une chapelle érigée par un seigneur laïc ou ceux créés par les moines autour d'un prieuré. Il semblerait, en effet, que la constitution du bourg et l'établissement de la paroisse de La Bosse soient étroitement liés à la motte castrale, implantée au nord de la commune et dont le terminus ante quem est fixé au XIIe siècle. Le développement médiéval de La Bosse est à mettre en relation avec l'essor de la féodalité et la création de La Ferté-Bernard. Cette forteresse stratégique est établie vers 1027 pour la défense du Perche et flanquée de postes avancés installés sur des mottes, parmi lesquels celui de La Bosse. Concédé en fief par les seigneurs de La Ferté-Bernard à un vassal, le domaine de la Bosse porte le titre de châtellenie et constitue une circonscription judiciaire (bailliage) jusqu'en 1573.

La Bosse constitue donc un poste d'avancée privilégié, confrontant notamment au nord le domaine des Rotrou, seigneurs rivaux des Bernard. la châtellenie de la Bosse est cédée en 1392 par Charles VI, suite à la confiscation de la seigneurie de La Ferté-Bernard, au chapitre de la cathédrale Saint-Julien du Mans. Ainsi, ce dernier porte le titre de seigneur de paroisse et perçoit les droits seigneuriaux jusqu'à la Révolution, pour en faciliter la perception, le chapitre cathédral fait dresser le plan terrier de la Bosse en 1788. Le premier seigneur connu de la Bosse est Séquart de Mondragon, mentionné à la fin du XIIe siècle, puis en 1211. Un certain Pierre de Mondragon est signalé en 1394, période à laquelle aurait été fondée la maison forte de Mondragon, située à quelques centaines de mètres au nord de la motte castrale, sans que l'on parvienne à déterminer précisément le lien entre ses deux entités seigneuriales qui ont peut-être cohabitées. Dans la 1ère moitié du XVe siècle, la seigneurie de la Bosse passe à la famille du Bouchet par le mariage d'Agnesse de Mondragon avec Etienne du Boschet.

Parallèlement, la paroisse de La Bosse est mentionnée pour la première fois en 1269. L'église, placée sous le vocable de saint Jacques, est construite dans la basse-cour sud de la motte castrale, à environ 100 mètres du tertre. Elle constitue le centre de l'enceinte villageoise. Son implantation laisse à penser un lien fort entre la seigneurie alors en place et le pouvoir religieux de la paroisse. Tout porte à croire que la vie villageoise s'est implantée, selon les contraintes topographiques, religieuses et seigneuriales au sein de l'enceinte castrale délimitée par des fossés en eau. Néanmoins, hormis les vestiges de la motte et l'église paroissiale, aucun témoignage architectural de cette période d'occupation ne nous ait parvenu.

Un bourg bien constitué aux Temps Modernes

Au XVIIIe siècle, La Bosse connaît des travaux d'urbanisme. Ces travaux entraînent la modification morphologique et architecturale du bourg de la commune. Le plan-terrier de la châtellenie de La Bosse, établi en 1788, nous renseigne sur l'organisation et la composition du bourg à la fin du XVIIIe siècle. Le plan fait notamment mention de 9 édifices implantés autour de l'église, dans l'enceinte castrale et le long des chemins de circulation reliant La Bosse à La Ferté à l'est, à Saint-Georges-du-Rosay au nord et aux communes de Tuffé-Val-de-la-Chéronne et Saint Hillaire-le-Lierru au sud. Un réseau de chemins secondaires dessert, à partir du réseau principal, les écarts bosséens. Parmi les 9 édifices du bourg relevés sur le document planimétrique, on note l'identification de l'église (n° 98), du presbytère et ses dépendances - dont le bâtiment d'école (n° 99), d'une auberge et ses dépendances (n° 95) et de bâtiments privés appartenant aux sieurs Manguin (n° 94), Vilpail (n° 95, 96, 97, 102) et Louvet (n° 100, 101). En 1743, des documents d'archives relatifs au château de Mondragon et ses possessions font mention d'une maison à boutique dite du maréchal au bourg et d'une maison servant de cabaret. Le bourg a donc des fonctions domestiques, économiques et religieuses. Les quelques écarts situés à proximité de ce dernier (Maison Neuve, L'Arpens, L'Etang, La Nouette et Les Virtons) semblent quant à eux tournés vers l'agriculture, en témoignent les nombreux champs et prés qui leur sont associés. On y cultive notamment du froment, du seigle et de l'avoine.

Le château de Mondragon, sûrement construit au XVIe siècle et remanié aux XVIIe et XIXe siècles, est également bien identifié au nord du bourg. Suivant un plan ordonnancé rectangulaire, il se compose alors d'un corps de logis avec dépendances et de quatre tours d'angle, le tout entouré de fossés en eau. Des jardins, bois et pâtures sont associés au domaine. Au XVIIe siècle, Mondragon est la propriété de la famille Lunel des Essarts jusqu'à la vente des biens de François Lunel des Essarts au moment de sa succession en 1743. Acquise par la famille Lonlay de Villepail, le domaine est ensuite transmis aux Mailly par le mariage d'Eugénie-Henriette de Lonlay de Villepail en 1816 avec Adrien-Joseph-Augustin-Amalric, comte de Mailly, marquis d'Haucourt et de Nesle. Le domaine de Mondragon est notablement augmenté par une politique active d'acquisition par la famille de Mailly jusqu'au début du XXe siècle. Arnoldine de Mailly (1834-1925) hérite de Mondragon mais après son décès sans descendance en 1925, le domaine passe à son neveu qui le cède en 1928, à Alexandre Yvon, dont les descendants sont les propriétaires actuels. 

La Bosse à l'époque contemporaine

Entre 1788 (date du plan-terrier) et 1831 (levé du cadastre napoléonien), la comparaison des sources planimétriques ne révèle aucun changement morphologique notable au bourg de la commune. L'activité économique du bourg semble prospère, ou du moins stable. Le recensement de population de 1896 fait mention de 73 habitants au bourg (sur 448 au total), dont les professions témoignent d'une activité artisanale spécialisée avec notamment la présence d'un maréchal ferrant, de bourreliers, charrons, sabotiers, aubergistes et cafetiers, charpentier, menuisier, etc. Parmi ces habitants du bourg, on note également la présence de cultivateurs propriétaires et journaliers.

Dans la poursuite des travaux engagés à la fin du XVIIIe siècle, de nouveaux aménagements de voirie sont réalisés. La mise en application des plans d'alignement oblige les habitants à ajuster les façades de leurs propriétés sur une limite verticale établie, constituant de fait un vecteur puissant de structuration des formes urbaines des communes. À La Bosse, le premier plan d'alignement, daté de 1849, dresse un constat des routes de la commune. Le bourg est alors traversé par une route pavée de bonne qualité. De 1867 à 1904, de nombreux plans de projets d'alignement sont réalisés par le service vicinal de La Sarthe afin d'uniformiser l'implantation des constructions le long des nouveaux axes routiers. Ces aménagements entraînent une rénovation partielle de l'habitat et la construction de nouveaux équipements publics au début du XXe siècle (mairie-école), sous l'impulsion et le contrôle financier de la famille de Mailly. En effet, cette famille qui possède dans le bourg seulement 5 maisons en 1743, puis 6 en 1831, acquiert progressivement toutes les maisons du bourg entre 1845 et 1905, à l'exception de l'école et du 2 rue de la Mairie. De plus, Adrien-Auguste-Amalric de Mailly (1878 †) fait bâtir ou reconstruire plusieurs maisons sur le chemin de grande communication traversant le bourg. Ces travaux ont pour point commun l'usage d'un répertoire architectural savamment choisi (frontons triangulaires, pilastres, écu armorié, corniche à denticules) donnant encore toute sa singularité au bourg.

Parallèlement, le territoire rural de la Bosse se développe grâce à l'implantation progressive de fermes, dont le nombre augmente au XIXe siècle par la division d'exploitations existantes et l'appropriation de terres incultes, en bruyères, pâtis et landes, encore nombreuses en 1833. À cette date, l'agriculture est principalement fondée sur la culture des céréales sur 679,51 ha de terre en labours, et un peu d'élevage sur 47,36 ha de prés. La commune compte aussi 244,66 ha de bois. C'est à cette époque que la population de la Bosse atteint son chiffre maximum en 1861 avec 507 habitants. Outre l'agriculture, l'espace rural compte également deux tuileries, celle de Louis Tessier à la Petite-Humelière et celle de la Bruyère-aux-Bœufs (à l'extrémité de la petite route entre le Parc-aux-Bœufs et la Guiberdière), fondée par François Bourdin, maçon au Joneaux en 1864. Leur installation est favorisée par les besoins en matière de construction et le caractère argileux des sols, mais ces établissements, comme beaucoup d'autres dans les environs disparaissent à la fin du siècle, elles sont toutes deux déclarées démolies en 1890. À cette période, l'exode rural affecte déjà la Bosse, il s'accélère ensuite au XXe siècle. Le nombre de fermes diminue progressivement, au point qu'il ne compte plus actuellement que le siège d'exploitation de la Grande-Bellangère. En outre, le bourg se vide peu à peu de ses habitants dans la seconde moitié du XXe siècle.

La commune de La Bosse, située dans le département de la Sarthe et dans la Communauté de communes de l'Huisne Sarthoise, fait partie du Pays d'Art et d'Histoire du Perche Sarthois. Elle s'étend sur une superficie de 10,75 km² et compte 138 habitants (recensement de 2018). Légèrement vallonné, avec une altitude qui varie entre 125 m et 176 m, le territoire communal confronte au nord Bonnétable et Saint-Georges du Rosay, à l'est Saint-Aubain-des-Coudrais, au sud Boessé-le-Sec et à l'ouest Saint-Denis-des-Coudrais. La commune de La Bosse est arrosée à l'est par le ruisseau de Ronsay, au nord par un petit courant d'eau et un étang, à l'ouest par La Vimelle et au sud par le ruisseau de Vimai. La rivière de l'Huisne passe à environ 8 km du site vers l'est. Sa proximité avec deux voies antiques et les quantités abondantes d'argile qu'offre le réseau hydrographique a permis à La Bosse de développer une activité de poterie importante dès le IIe siècle de notre ère.

D'un point de vue géologique, la commune est située sur la bordure occidentale du bassin parisien. Elle présente des terrains tertiaires, éocènes et quaternaires offrant des sables, grès, conglomérats et meulières, produits de l'altération tropicale et des argiles à silex issues de la décalcification des craies turoniennes. 

Le bourg de La Bosse conserve les traces de son ancien bourg castral, devenu bourg-carrefour puis bourg-rue, aujourd'hui structuré par deux axes principaux (nord-sud, est-ouest) formés par les départementales D7 et D85. Si aujourd'hui ce bourg rural connaît un déclin économique et démographique notable, il n'en a pas toujours été ainsi. Seigneurie et poste de défense de la baronnie des Bernard dès le XIe siècle, chef-lieu de paroisse au XIIe siècle, La Bosse tient alors une place importante dans l'histoire et la géographie sarthoise. De ce fait, elle revêt un intérêt pluriel, tant par son histoire que par l'homogénéité de son architecture et de sa forme urbaine.

Image non communicable
  • Plan cadastral parcellaire de la commune de La Bosse, 1831, levé par M. Pinson, géomètre en chef. 7 dess : encre et lavis. (Archives départementales de la Sarthe ; PC\041\001 à PC\041\007)

  • Carte postale ancien figurant le carrefour de La Bosse, vers 1910. 1 photo : N&B. (Archives départementales de la Sarthe ; 2Fi06546).

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Sarthe ; 3 P 41 9 à 15. Etat des sections de la matrice de la commune de La Bosse, 1832-1974.

Bibliographie

  • BOUTON, André. Le Maine : histoire économique et sociale, t. 1. Le Mans : Monnoyer, 1975.

  • CAUVIN, Thomas. Monographie des villes et villages de France. Essai sur les statistiques du département de la Sarthe. Paris : Res Universis, 1893.

  • COMBES-MESIERE, Lucette, GALBRUN-CHOUTEAU, Gil. Potiers et faïenciers de la Sarthe. Le Mans : éditions de la Reinette, 2002.

  • FLOHIC, Jean-Luc (dir.). Le Patrimoine des Communes de la Sarthe. Collection : Le Patrimoine des Communes de France, Paris : Flohic Editions, 2000. 2 vol.

  • FRANCE. Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Commission régionale Pays de la Loire. Sarthe. Canton de La Ferté-Bernard. Paris : Impr. nationale, 1983. 418 p. ; ill., cartes, plans ; 30 cm. [Inventaire topographie, 14]. Ministère de la Culture.

  • LE PAIGE, André-René. Dictionnaire topographique, historique, généalogique et bibliographique de la province et du diocèse du Maine. Le Mans : Toutain, 1777.

Documents figurés

  • 1788 : plan Terrier. (Archives départementales de la Sarthe ; E313 38/39).

  • 1849, 15 septembre : traverse de la Bosse - Extrait de plan et docs divers (lettre et rapports). (Archives départementales de la Sarthe ; 2 S 544).

  • 1888, 8 mars : extrait du plan d'alignement, Service vicinal de la Sarthe. (Archives départementales de la Sarthe ; 3 O 615).

  • 1868, 18 mai : carte d’ensemble – reconnaissance des chemins ruraux, Service vicinal de la Sarthe. (Archives départementales de la Sarthe ; 3 O 615).

  • 1867, 22 février : plan général de la commune, Service vicinal de la Sarthe. (Archives départementales de la Sarthe ; 3 O 615).

Date(s) d'enquête : 2021; Date(s) de rédaction : 2021
(c) Pays du Perche sarthois
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Ferey Marie
Ferey Marie

Chercheur auprès du Service Patrimoine de la Région des Pays de la Loire.

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