Dossier d’œuvre architecture IA53004266 | Réalisé par
Avila Laëtitia (Contributeur)
Avila Laëtitia

Étudiante à l'école d'architecture de Rennes, stagiaire au service du patrimoine du Conseil général de la Mayenne en 2001.

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Bureau Arnaud (Rédacteur)
Bureau Arnaud

Chercheur à l'Inventaire général, au service du patrimoine du Conseil départemental de la Mayenne, et Conservateur des Antiquités et Objets d'art de la Mayenne.

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Foisneau Nicolas (Rédacteur)
Foisneau Nicolas

Chercheur à l'Inventaire général, au service puis direction du Patrimoine du Conseil départemental de la Mayenne, de 2001 à 2020.

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Barreau Pierrick (Contributeur)
Barreau Pierrick

Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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  • opération ponctuelle
  • enquête thématique départementale, rivière Mayenne
Demeure de villégiature dite château, le Ricoudet
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Pays de la Loire - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Mayenne - Saint-Berthevin
  • Hydrographies la Mayenne
  • Commune Changé
  • Lieu-dit le Ricoudet
  • Cadastre 2021 ZS 70 à 72
  • Dénominations
    demeure
  • Précision dénomination
    demeure de villégiature
  • Parties constituantes non étudiées
    communs, écurie, logement, sellerie, chenil, blanchisserie, jardin d'agrément, jardin d'hiver, parc, portail, clôture

Une demeure unique en bord de Mayenne

Le château du Ricoudet est édifié ex-nihilo dans une ondulation de la Mayenne, pour le comte Auguste d'Aliney d'Elva et son épouse Alix de Quelen, résidant à Laval et à Changé : ceux-ci souhaitaient se construire une nouvelle demeure afin de laisser à leur fils aîné Christian, suite à son mariage avec Elise-Marie-Dumont (1879), la propriété du château familial du bourg de Changé. La date de construction est connue avec certitude grâce à plusieurs témoignages presque contemporains. Le guide de Laval et ses environs d'Isidore Guédon, publié en 1897, indique que le Ricoudet est bâti en 1885. L'instituteur Rossignol confirme cette date dans sa monographie communale de 1899. Les matrices cadastrales signalent la fin des travaux du château et des communs, incluant remise, écurie et maison de jardinier, en 1886 (devenus imposables en 1889). L'ajout d'une maison pour le piqueux et d'une buanderie est mentionné en 1887.

Aucun nom d'architecte auquel les plans de la demeure puissent être attribuésa n'a été retrouvé ; dans ses travaux sur les châteaux de la famille d'Elva, Laetitia Avila formule l'hypothèse d'un architecte italien (les d'Elva étant originaires du Piémont). L'inspiration néo-palladienne de la demeure, style pourtant déjà largement démodé en France à la fin du XIXe siècle, témoigne en effet d'une inspiration méridionale et d'une certaine nostalgie architecturale, voire d'un goût pour le désuet. L'esprit qui préside à la construction du Ricoudet est en tout cas radicalement différent de celui des agrandissements et remaniements du château de Changé, de style néo-Renaissance. C'est d'ailleurs ces importantes transformations commanditées par Alix de Quelen qui l'auraient poussée à vouloir retourner en son château de Changé et finalement céder le Ricoudet à Christian. L'échange des deux châteaux entre les parents, Auguste et Alix, et leur fils aîné Christian est ainsi conclu devant notaire le 4 octobre 1889.

Un château de fêtes et de plaisirs

Christian d'Elva (1850-1925), conseiller général, député puis sénateur, passionné de vénerie, résidant entre Paris et Changé, fait du Ricoudet le point de départ de ses chasses à courre. Dès 1879, il avait fondé un équipage de griffons vendéens dont il contribuait à améliorer la race par une sélection rigoureuse : il possédait également un équipage de douze bassets pour la chasse à tir. D'après les revues spécialisées de l'époque, il chassait assidument dans les forêts de la Mayenne (Concise, Bourgon, Laval, etc.) et faisait chaque année un déplacement en forêt du Pertre, près de Vitré. L'équipage du Ricoudet portait un "habit bleu-clair avec collet et parements amarantes, en velours pour le maître d'équipage, en drap pour les piqueurs, culotte blanche. Sur le bouton on lit la devise Courre à mort". Christian d'Elva conviait également la bonne société au Ricoudet pour des cours d'escrime.

La presse relate les nombreuses fêtes données par les d'Elva au château du Ricoudet, comme en 1891 dans le Gil Blas : "tablée des plus élégantes et dîner des mieux servis avant-hier au château du Ricoudet, appartenant au comte Christian d'Elva, un des grands veneurs de la Mayenne, qui figure dans l'Armorial de la Vénérie... Les convives ont ensuite dansé, jusqu'au matin, un cotillon conduit avec beaucoup d'entrain par la vicomtesse d'Elva et M. Emmanuel de la Beauluère". La navigation était un autre loisir pour les d'Elva qui avaient obtenu, dès 1878, l'autorisation de faire circuler sur la Mayenne un bateau à vapeur de plaisance, nommé "Stella Matutina". Les journaux de la 1ère moitié du XIXe siècle indiquent également que la demeure pouvait parfois être mise en location pour la belle saison.

L'évolution de la propriété au XXe siècle

Les cartes postales anciennes font état des quelques modifications réalisées au château dans le 1er quart du 20e siècle : surélévation de la partie accolée au belvédère, ajout d'un toit à longs pans brisés destiné aux chambres de domestiques sur le toit-terrasse originel, fermeture des baies de la loggia située à l'étage de l'avant-corps de la façade sur le parc. Une coupole amovible située au sommet de la tour aurait également été supprimée. L'abbé Angot, qui consacre un très court article au Ricoudet, signale une véranda couvrant le perron, qui ne figure pourtant pas sur les cartes postales anciennes et dont il ne reste aucune trace : celle-ci fut peut-être rapidement supprimée, à moins qu'il n'y ait eu confusion avec le jardin d'hiver placé sur le côté de la maison.

La propriété est vendue en 1931 par la fille cadette de Christian d'Elva, Christiane Horric de la Motte, à Marie-Louis Durand de Gevigney. L'acte de vente donne un état des lieux précis. Le château comprend "en sous-sol : un bûcher, une ancienne salle de bains, deux pièces de débarras, une salle de calorifère, une salle à manger de domestiques, une cuisine, une arrière-cuisine, des WC, une cave et un caveau ; au rez-de-chaussée : un vestibule, un bureau, un grand salon, un petit salon, une salle à manger, un office, WC". Les étages abritent les chambres avec cabinets de toilettes, une lingerie et le belvédère. Les communs comprennent une volaillerie, une remise, une sellerie, une ancienne sellerie, chambre de cochers, greniers à fourrages, garages, écurie, buanderie, hangar, maison de piqueux et chenils. Soigneusement entretenue, la propriété n'a pas connu d'autres transformations que quelques récents aménagements pour recevoir un gîte et des chambres d'hôtes.

Située au bord de la Mayenne, en position dominante, la demeure présente un plan massé régulier à deux avant-corps côté cour et un avant-corps central, abritant le perron et une loggia, côté parc. La symétrie de l'ensemble, avec cinq travées pour la façade principale, est rompue par une travée supplémentaire et une tour-belvédère carrée accolées au côté nord-est. L'édifice est construit en moellons enduits, avec des chaînages harpés et des décors en pierre de taille calcaire ; le soubassement en granite est orné d'un appareillage polygonal. Un jardin d'hiver est accolé au côté sud-ouest et s'ouvre directement sur un salon. La référence architecturale est néo-palladienne, comme l'indiquent la régularité et la sévérité de la composition ainsi que les toits initialement en terrasses et les balustrades. Le château comprend un sous-sol semi-enterré, un rez-de-chaussée surélevé - accessible sur les façades principales par un degré droit central -, un étage carré, un étage-attique et un étage de comble. La tour, qui culmine à près de 15 mètres, présente un belvédère au dernier niveau et un toit-terrasse. Le jardin d'hiver, qui possède un soubassement en granite et un muret en briques, présente une structure métallique et un toit bombé à trois pans.

Les lignes horizontales de la composition sont soulignées à chaque niveau par des bandeaux et, en partie haute, par la corniche et la balustrade qui bordait le toit-terrasse et dissimule désormais le toit brisé en zinc et ardoise. Les fenêtres, à l'exception de celles de la façade principale, sont pourvues d'un meneau central. Celles de l'étage présentent des larmiers. Les lambrequins en bois découpé qui les ornaient, d'après les cartes postales anciennes, ont disparu. La loggia, également pourvue d'une balustrade, est supportée par des piliers flanqués de demi-colonnes cannelées à chapiteaux toscans, conférant une certaine monumentalité. Le porche est couvert d'une voûte en arc-de-cloître peinte en faux-appareil. Des pilastres ornent les niveaux supérieurs de la tour, également coiffée d'une balustrade. Les larges agrafes qui décorent les ouvertures de la loggia et la porte de la façade sur cour, simplement ébauchées, suggèrent peut-être l'inachèvement du décor sculpté : peut-être étaient-elles destinées à recevoir les armoiries de la famille d'Elva.

Tandis que les pièces du sous-sol et du second étage sont desservies par un couloir transversal central, celles du rez-de-chaussée et du premier étage sont accessibles par un large vestibule. La distribution verticale, complexe, est assurée par quatre escaliers placés dans différentes parties de la maison. L'escalier d'honneur, tournant à retours avec jour, situé dans l'avant-corps nord-ouest, relie le rez-de-chaussée au premier étage. Construit en bois et richement sculpté, il prend place dans une cage carrée tapissée de bleu et couverte d'une coupole à huit pans. Un second escalier, plus modeste, situé dans l'angle sud-ouest du palier, relie le premier étage au second. Un troisième a été ajouté dans la pièce centrale donnant sur jardin pour permettre l'accès depuis le deuxième étage à l'étage de comble. Enfin, un escalier de service, montant du sous-sol jusqu'au niveau des caves, est placé dans la tour et se prolonge par une petite vis pour atteindre le belvédère et la terrasse.

Les différents communs forment, à l'extrémité nord du domaine, un front bâti perpendiculaire à la rivière. Le bâtiment principal, couvert de tuile mécanique, est construit en moellons apparents, avec un soubassement orné de pierres polygonales et des encadrements d'ouvertures et un bandeau en briques. Il abrite les garages et remises, l'écurie qui a conservé ses huit stalles et ses râteliers, la sellerie, le grenier à fourrages et le logement du cocher. Les chevaux étaient attachés à des anneaux pendus à des têtes de licornes en fonte. Il subsiste également le mécanisme destiné à déployer un auvent en tissu de l'entrée des garages. Placée près de la rivière, la maison du piqueux, en moellons enduits, décors de briques et couverture d'ardoise, a été reconvertie en gîte. A proximité se trouve l'ancien chenil-tour identique à ceux du château de Changé : il était couvert de grosses plaques d'ardoise dont il reste quelques vestiges.

Le château étant positionné près de la route, le parc d'environ 5 hectares, auquel on accède par des grilles en fer forgé, se déploie principalement entre la demeure et la Mayenne. Il est limité au nord par les communs, au sud par le court de tennis et un petit ruisseau. Il est planté d'arbres remarquables de taille imposante, tels que des séquoias, des cèdres, des érables, des tuyas, un magnolia grandiflora… Les cartes postales attestent également de la présence de nombreux sapins et de peupliers plantés le long des berges, aujourd'hui disparus. Il semble que l'espace à l'arrière du château était planté de rosiers dont il subsiste quelques exemplaires. De nouveaux arbres ont été plantés dans la partie basse du parc vers 2015 ; la vue sur la rivière et depuis la rivière est néanmoins conservée.

  • Murs
    • pierre moellon enduit
  • Toits
    ardoise, zinc en couverture
  • Étages
    sous-sol, rez-de-chaussée surélevé, 2 étages carrés, étage de comble
  • Couvrements
  • Élévations extérieures
    élévation à travées
  • Couvertures
    • terrasse
    • toit à longs pans brisés croupe brisée
  • Escaliers
    • escalier dans-œuvre : escalier tournant à retours avec jour en charpente
  • Jardins
    bois de jardin, prairie ornementale
  • État de conservation
    bon état
  • Statut de la propriété
    propriété d'une personne privée

Documents d'archives

  • Archives départementales de la Mayenne ; MS 80/5-2. Monographie communale de Changé, par l'instituteur Rossignol, 1899.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 P 518. Commune de Changé. Matrices foncières des propriétés bâties, 1883-1914.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 226 Q 901. Échange des châteaux de Changé et du Ricoudet entre Auguste et Christian d'Elva, 18 juin et 13 août 1889.

  • Archives départementales de la Mayenne ; 3 S 785. Autorisation donnée au comte d'Elva de faire circuler un bateau de plaisance à vapeur sur la Mayenne, 1878.

  • Archives privées. Vente du château du Ricoudet par le comte de la Motte-Saint-Genis à M. et Mme de Gevigney, 3 juillet 1931.

Bibliographie

  • ANGOT, Alphonse-Victor (abbé), GAUGAIN, Ferdinand (abbé). Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne. Laval : A. Goupil, 4 vol., 1900-1910.

    t. 4, p. 780
  • DAVOUST, Louis. Changé, dix siècles d'histoire. Siloë, 1995.

    p. 88
  • DENIS, Michel. Les royalistes de la Mayenne et le monde moderne (XIXe-XXe siècles). Paris : C. Klincksieck, 1977.

    p. 481-482
  • GUEDON, Isidore. Laval et ses environs, guide de l'étranger, 1897.

    p. 183
  • JACQUIER, Léon de. La vénerie moderne. 1889.

    p. 133-137
  • Le patrimoine des communes de la Mayenne. Paris : Éditions Flohic, 2002.

Périodiques

  • AVILA, Laëtitia. Les châteaux de Changé ou le règne oublié de la famille d'Elva. La Mayenne, Archéologie, Histoire, n° 24, 2001.

    p. 107-142

Documents figurés

  • Château du Ricoudet, à Changé : plan du sous-sol, plan du rez-de-chaussée, plan du premier étage, plan du deuxième étage, plan de l'étage de comble, plan des toitures du corps principal et du quatrième étage de la tour, plan d'ensemble des toitures / dessiné par Laëtitia Avila. 2001. 7 dessins.

Documents multimédia

  • Site internet : http://chateau-du-ricoudet.fr/histoire/ [consult. 28/09/2021].

Date(s) d'enquête : 2001; Date(s) de rédaction : 2006, 2019, 2021
(c) Conseil départemental de la Mayenne
(c) Région Pays de la Loire - Inventaire général
Avila Laëtitia
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Étudiante à l'école d'architecture de Rennes, stagiaire au service du patrimoine du Conseil général de la Mayenne en 2001.

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Bureau Arnaud
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Chercheur à l'Inventaire général, au service du patrimoine du Conseil départemental de la Mayenne, et Conservateur des Antiquités et Objets d'art de la Mayenne.

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Foisneau Nicolas
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Chercheur à l'Inventaire général, au service puis direction du Patrimoine du Conseil départemental de la Mayenne, de 2001 à 2020.

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Barreau Pierrick
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Chercheur auprès du Pays du Perche sarthois jusqu'en octobre 2020. Depuis novembre 2020, chercheur auprès du Conseil départemental de la Mayenne.

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